La Rumeur (le Bavar à droite) © Ai?da

La Rumeur : l’Interview Le Bavar (Festival Avec le Temps)

 

La Rumeur a récemment monté sa propre maison de production, s’offrant ainsi la liberté que le groupe a toujours revendiquée. En novembre dernier sort Les Inédits 2, un nouvel album où s’enchaînent morceaux solos entrecoupés d’interludes narratifs et dialogues cinématographiques. Le cinéma, l’édition, les projets photos, le webzine… L’actualité est chargée pour La Rumeur, qui offrira au public marseillais un concert et la projection du film De l’encre d’Hamé et Ekoué. La parole au Bavar…

 

Comment vous positionnez-vous, en tant que groupe de rap, dans ce festival de chanson française ?
On apprécie de jouer dans des festivals où la programmation est éclectique, le mélange des genres nous correspond. Dans nos concerts, il y a une grosse mixité en termes de catégories professionnelles, d’âges ou d’origines. Participer à un festival où il y a une variété de champs musicaux, c’est plus motivant et enrichissant.

 

On sépare souvent le rap de la chanson française, est-ce une consécration pour le rap et le hip-hop de participer à un tel festival ?
On a été programmé dans pas mal de festivals assez prestigieux comme les Vieilles Charrues ou le Printemps de Bourges, dans lesquels il y a toujours eu une petite part de hip hop, même si ce sont les autres genres musicaux qui s’y font la part belle. Pour le coup, des structures se sont développées et ont créé des festivals vraiment spécialisés. On ne le prend pas comme une reconnaissance, rien n’est acquis. De toute façon, le rap est une musique où rien n’est apporté sur un plateau. Je ne parlerais pas de reconnaissance, mais d’un juste retour des choses.

 

Les nouveaux talents, c’est aussi une volonté du festival. Quels sont les découvertes actuelles de La Rumeur ?
Demi Portion, LED-K, 400 Hyènes…

 

En ce moment, on parle beaucoup de collectifs tels que L’Animalerie (d’où est issu Kacem Wapaleck) ou La Fronce, qui usent d’autres réseaux de communication pour se faire connaître. Le rap alternatif, ça vous parle ?
Quand on sait que Skyrock veut faire la pluie et le beau temps sur le hip-hop, il est très sain qu’un courant alternatif se développe en marge des canaux officiels, en imaginant d’autres modes de promotion.

 

Il paraît que vous avez fini l’écriture d’un long métrage. Où en est ce projet ?
Le tournage aura lieu d’ici le printemps 2015, il ne reste plus qu’à mettre les choses en place, chercher les financements… Faire des concerts et vendre des disques, ça ne suffisait plus au groupe et on a décidé d’élargir le champ des possibilités, notamment dans le cinéma. Au mois de novembre, quand on a sorti notre dernier album, on a créé un webzine d’informations, Larumeurmag.com, qui nous permet d’avoir un moyen d’expression nouveau : on n’y parle pas que de nous, mais aussi de l’actualité sociale, politique, culturelle… C’est aussi une manière de contourner les médias officiels.

 

La rumeur avait déjà fait de la réalisation…
Ce chemin devant moi, un court-métrage réalisé par Hamé, a été sélectionné au Festival de Cannes en 2012 et a reçu le prix de la meilleure photographie à Clermont-Ferrand. Et il y a eu aussi un long métrage, produit par Canal+, à destination de la télé, diffusé une trentaine de fois en 2010 : De l’encre, avec Reda Kateb et Béatrice Dalle.

 

L’histoire du prochain film porte sur le quartier de Pigalle…
On ne dévoile rien du tout, ça porte la poisse à ce qu’il paraît !! (rires) C’est un quartier qu’on affectionne et qui a une histoire, c’est là qu’on tourne tous nos clips, nos bureaux sont dans le coin… C’est un quartier très vivant qui a son lot de culture, d’histoires…

 

Vous avez également des projets concernant la photo, l’édition…
Dans l’édition, ça c’est précisé : on a un projet avec le photographe Jean-Yves Donati, qui a mis en scène certaines phrases issues de nos morceaux. Et récemment, on a acquis les droits d’un livre autobiographique du rappeur new-yorkais Nas.

 

Au-delà de la musique, parlons actualité… Après deux ans de présidence, quel regard portez-vous sur l’action de François Hollande ?
Je n’ai pas vraiment l’impression que ça ait changé… Les manifestations sociales se multiplient, c’est toujours la merde dans les quartiers, j’ai même l’impression d’un durcissement quelque part. Un durcissement général… Sur le plan international, j’ai pu le constater avec l’intervention au Mali où on a voulu nous faire croire au discours sur la démocratie et les droits de l’homme alors que c’est uniquement pour protéger les intérêts de la France en Afrique. Cela reste un bel exemple de ce que peut être la Françafrique. L’affaire Léonarda aussi était choquante…

 

La Rumeur est connue pour son positionnement par rapport à l’abstentionnisme. La récente avancée pour la reconnaissance du vote blanc change-t-elle quelque chose aux considérations du groupe ?
C’est une petite avancée. Le vote blanc, contrairement à l’abstention, c’est participer au scrutin, c’est aussi se déculpabiliser d’une espèce d’incivisme… mais ça ne changera rien au résultat. J’ai le sentiment que ça reste un leurre et qu’on nous lâche un peu de lest pour désamorcer les tensions.

 

Votre venue dans le Sud a-t-elle une signification particulière pour vous ?
On a vocation à faire entendre notre musique au plus large public possible ; on est vraiment un groupe de scène, il ne se passe pas un an sans que l’on fasse de concerts. Dans le Sud, il y a une ambiance particulière. La notoriété du groupe fait que les gens commencent à savoir ce que ça donne en live, et on aime ça. Le Sud et la Bretagne sont des régions très chaleureuses. Dans le Sud, il y a aussi une histoire avec le rap français, donc c’est assez symbolique pour un groupe de rap parisien.

Propos recueillis par Elise Lavigne

La Rumeur et Kacem Wapaleck : le 20/03 à l’Espace Julien (39 cours julien, 6e).
Rens. 04 91 24 34 10 / www.espace-julien.com

Pour en savoir plus : http://larumeurmag.com/

Projection du film De l’encre : le 13/03 à 20h au Cinéma Les Variétés (37 Rue Vincent Scotto, 1er).
Rens. 09 75 83 53 19 / www.cinemetroart.com