La frontière de l’aube - (France - 1h45) de Philippe Garrel avec Louis Garrel, Laura Smet…

La frontière de l’aube – (France – 1h45) de Philippe Garrel avec Louis Garrel, Laura Smet…

Au-delà du réel

cine-La-Frontiere-de-aube.jpgSi vous tenez Philippe Garrel pour un auteur majeur, pour un franc-tireur libertaire qui a su renouveler, avec grâce et courage, une certaine avant-garde post-soixantuitarde, n’allez surtout pas voir La frontière de l’aube ! Vous risquerez d’abord — durant la première moitié du film — de vous ennuyer. Du noir & blanc très (trop ?) contrasté, des personnages — le beau photographe et la blonde star — qui ressemblent plus à des caricatures qu’à de réelles figures de cinéma : on a l’étrange sensation d’assister à une auto-parodie, comme si Garrel avait voulu pousser à l’extrême une recette et un savoir-faire qu’il sait parfois déplaisants. On aurait aimé ne reprocher au film que cette impression de déjà-vu, cette sensation assez vite lassante que rien de nouveau ne va se jouer sous nos yeux. On se serait alors secrètement avoué que la politique des auteurs est une bien belle arnaque théorique et qu’en définitive, un film, c’est vraiment comme une mayonnaise : parfois ça prend, parfois ça ne prend pas. Malheureusement, la seconde partie du film va bien plus loin, autrement dit bien plus bas. Entre La frontière de l’aube et les frontières du réel, la différence devient alors plus que ténue. Des morts qui viennent hanter les vivants en apparaissant dans un miroir, un questionnement faussement profond sur l’amour et la culpabilité, le tout entrecoupé de scènes qui frisent sérieusement le grotesque : rien ne nous est épargné. Résultat, on s’ennuie ferme, indifférent aux images qui défilent, à ce récit dont nous ne percevons que la pauvreté et l’artificialité. Au moins s’il versait ouvertement dans le second degré, on pourrait rire, mais c’est n’est pas le cas. Mais que veut dire Garrel à travers cette histoire de spectre ? Pourquoi inflige-t-il à son fils et à la fille du vieux chanteur jauni un pareil désastre cinématographique ? Est-ce vraiment le même réalisateur qui nous a offert le sublime Les amants réguliers trois ans auparavant ? On pourrait ainsi continuer longtemps à se questionner, mais peut-être qu’à l’image du film, la vérité est ailleurs…

nas/im