L'ivresse du pouvoir - (France - 1h50) de Claude Chabrol avec Isabelle Huppert, François Berléand, Robin Renucci, Patrick Bruel…

L'ivresse du pouvoir – (France – 1h50) de Claude Chabrol avec Isabelle Huppert, François Berléand, Robin Renucci, Patrick Bruel…

L’ivresse du pouvoir marque une nouvelle étape dans la collaboration entre Claude Chabrol et Isabelle Huppert, commencée en 1978 avec Violette Nozières. Pour ce cinquante-quatrième film du réalisateur français, un constat s’impose… (lire la suite)

Le gendarme et les voleurs

L’ivresse du pouvoir marque une nouvelle étape dans la collaboration entre Claude Chabrol et Isabelle Huppert, commencée en 1978 avec Violette Nozières. Pour ce cinquante-quatrième film du réalisateur français, un constat s’impose. Même si les obsessions restent les mêmes (la jalousie, l’ordre et son contournement, la lutte de classe…), il semble que Chabrol ait abandonné toute idée d’ambition et de grand cinéma. Depuis La Cérémonie, son dernier « grand film », il agit comme un vieil artisan, sûr de ses recettes et de son savoir-faire, mais qui oublie de se remettre en question. Pourtant, il en faut un peu, de l’ambition, pour se décider à faire une fiction d’une intrigue politico-financière dont tout porte à croire qu’il s’agit de l’affaire Elf. « Toute ressemblance avec des personnages connus serait, comme on dit, fortuite » nous avertit le premier plan du film. C’est dans ce « comme on dit » qu’il faut entendre le film, par ce détachement du réel, ce travail fictionnel qui réserve au film un traitement ludique et évite heureusement à son auteur de nous servir un film-enquête qui aurait pu se révéler très vite ennuyeux, pour nous proposer un film-jeu qui fait la part belle aux actrices (et acteurs). L’aspect politique est ignoré, rien n’est dénoncé, et le film s’attache à suivre les investigations du juge d’instruction, Isabelle Huppert aussi chic que dynamique, réel moteur du film. L’enquête est un jeu et les hommes de pouvoir mis en cause apparaissent avec un naturel surprenant, bien plus sympathiques et bonhommes que vicieux et calculateurs. Ceux qui abusent deviennent ceux qui amusent, sans que le film ne ressemble jamais à un téléfilm. Mise en scène fluide, rythme plaisant, jolis numéros d’acteurs (Jean-François Balmer en intermédiaire louche et faussement naïf), L’ivresse du pouvoir évoque autant les travers des grands décideurs que le plaisir égocentrique du magistrat qui les combat. Avec cette dernière réalisation, Claude Chabrol nous prouve que son cinéma, comme les gants et les lunettes rouges d’Isabelle Huppert, est une affaire de style.

nas/im