Kasbah 2, place du Gouvernorat à Tunis, février 2011

Instant tunisien. Les archives de la Révolution au Mucem

La révolution, intérieur

 

En haut du Fort Saint-Jean, dans la Galerie haute des officiers, l’exposition Instant tunisien. Les archives de la Révolution propose de revivre les vingt-neuf jours de la révolution tunisienne menant à la chute de Ben Ali. Les documents ont été collectés par le réseau Doustourna en collaboration avec plusieurs institutions publiques nationales tunisiennes, avec l’envie « d’éviter que cette histoire se perde, qu’elle soit réécrite, déformée, ou instrumentalisée. »

 

Quelques secondes avant de découvrir l’exposition, une ouverture magnifique sur la Méditerranée s’offre au visiteur. Un énième rappel, peut-être, de l’infime distance qui nous sépare de la Tunisie. Une fois entré dans la galerie, on découvre un lieu d’archive d’une richesse et d’une intensité remarquables. Houria Abdelkafi et Élisabeth Cestor, les deux commissaires de l’exposition, ont choisi de mettre en avant l’importance des réseaux sociaux lors de ces mouvements contestataires, via des documents très « vivants et [qui] donnent chair au récit ». On peut y voir de nombreuses vidéos filmées par les manifestants à l’aide de téléphones portables. L’information se révèle brute et frontale, et on ne peut qu’être happé par la force des images qui viennent à nous.

Chaque salle nous plonge dans une nouvelle étape de la révolution et nous aide à mieux comprendre les moments qui ont fait date. Petit à petit, on se familiarise avec les caricatures, graffitis, slogans et chansons nés pendant le mouvement. Dans la troisième salle, on peut par exemple lire des posts Facebook ou des pages de blogs sur des écrans d’ordinateurs. Par cette restitution des cyber cafés tunisiens, on comprend mieux comment s’est développé et organisé le mouvement contestataire. L’expérience s’avère presque immersive : on a l’impression d’y être, tout devient familier rapidement, ce qui facilite la compréhension du sujet.
On ressort de la cinquième salle — intitulée De la grande clameur au jour d’après — avec l’impression d’avoir (re)vécu ce moment crucial de l’histoire moderne tunisienne. L’exposé est clair, pertinent et didactique. En quittant le lieu, le visiteur sera forcément enclin à penser aux actuels mouvements contestataires en Algérie ou en France. Cet Instant tunisien nous invite à questionner notre implication citoyenne et notre responsabilité en tant que spectateur de la violence et de l’injustice.

 

Christophe Huguenot

 

Instant tunisien. Les archives de la Révolution : jusqu’au 30/09 au Mucem (7 promenade Robert Laffont, 2e).

Rens. : www.mucem.org