Sylvie et Gil Aniorte Paz dans Barrio Chino

Identités Remarquables | Sylvie et Gil Aniorte Paz

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Différents et pourtant tellement complices, Sylvie et Gil Aniorte Paz pensent, agissent, créent et vivent dans un même souffle.

 

Assis en équilibre sur le bord d’une chaise, Gil est un homme pressé. Il a toujours mille projets en cours et ne fait pas de longues tartines de sa vie. Il confie : « J’ai recherché avec rage l’Eldorado à la recherche de mes racines disséminées entre Almeria, Oran et Marseille. » Sa sœur, Sylvie, est quant à elle ancrée au fond du siège et respire le calme. Ses commentaires témoignent de son bonheur de vivre. « Nous, on est marseillais de cœur et de choix », dit-elle avec fierté.

Le binôme a grandi au sein d’une famille espagnole expatriée à Oran en Algérie. « Notre fratrie chope le virus de couleurs musicales vivaces et dissemblables, en participant aux bœufs familiaux et des fêtes comme savent les tenir les Méditerranéens ! » Ils deviennent financièrement indépendants dès l’âge de quinze ans, entourés d’une flopée de musiciens tels qu’Antonio Negro ou le percussionniste Riad Bensalem. Gil suit brillamment des cours de guitare à l’Académie de Guitare de Catalogne, où la tribu passe quelques années avant de s’installer à Marseille. Ils évoquent leurs études au lycée Montgrand, entourés d’amis venus de tous les horizons. Gil y suivra les cours de la section musique et Sylvie des cours trilingues qu’elle complétera par des études en communication. Ils gardent un souvenir ému de cette époque où le brassage de cultures et de musiques les inspire et les maintient dans un bouillonnement créatif. Mais Gil en veut plus et décide de suivre des études de musique à l’Université de Musique de la faculté d’Aix-en-Provence, puis à Paris, où il suivra les cours de l’American School of Modern Music (diplôme d’arrangeur) et intégrera très tôt les studios en tant que bassiste, guitariste ou arrangeur pour Désiré Mikhail ou Georges Guétary, entre autres.

En 1993, Gil Aniorte Paz revient à Marseille et fonde avec sa sœur le fameux orchestre Barrio Chino, groupe précurseur de la fusion latino-magrébine. C’est dans cette esthétique musicale qu’ils donnent libre cours à leurs inspirations glanées au sein des différentes communautés qu’ils ont pu côtoyer. Sur scène, ils choisiront parmi leurs amis huit pointures locales tels que Tony Gavila ou Charly Thomas. Le projet Barrio Chino durera treize ans, et fait depuis peu son retour en trio avec Lucas Aniorte Paz, le fils de Gil.

Parmi leurs autres projets, le duo met en place en 2002 Les Orientales avec l’Orchestre à cordes de la radio nationale algérienne, dont le répertoire reprend l’héritage culturel de l’Algérie d’avant-guerre revisité par les arrangements de Gil. Peu après, Sylvie rejoint la Compagnie Rassegna dont la réputation n’est plus à faire. Depuis peu, Gil forme avec ses quatre compagnons de route le groupe Radio Babel, qui se produit principalement a capella et groove des compositions originales portées par la poésie du navigateur marseillais Louis Brauquier. Ils y racontent le voyage, la rencontre, l’exil, le partage, les quais, un monde ouvrier oublié, notamment à travers leur dernier EP, Vers des Ailleurs, sorti l’an passé. Gil est aussi chanteur, directeur artistique des Chants Gitans Sacrés de Provence avec le chanteur Tchoune Tchanelas, qui se produit aussi dans Radio Babel.

Sylvie est quant à elle une des Dames de la Joliette, dont elle raconte le récent voyage au Sénégal : « J’y ai appris de nouveaux codes socioculturels, tellement différents de ceux du monde européen… Mais ceci n’est que le début d’une aventure qui perdurera. » Également chanteuse et compositrice, elle crée avec le guitariste Diego Lubrano le répertoire du groupe La Última!, aux frontières du jazz et du flamenco. L’album A la Mar Fui por Naranjas recevra un écho extrêmement positif dans la presse nationale grâce à une tournée dans des lieux prestigieux (le Mucem, le Sunset à Paris…). Sylvie Aniorte Paz est également l’auteure de l’œuvre La Nuit d’Antigone au sein du collectif Sublimes Portes qui tournera en France, en Algérie et en Turquie. Elle forme avec la chanteuse grecque Kalliroi le duo Zoppa autour de compositions gréco-hispaniques. Cette artiste multiple sillonne le monde et dessine au quotidien des carnets intitulés Last Amapolas qu’elle expose à l’Éolienne et à la Maison du Chant.

 

Catherine Moreau

 

Rens. : http://sylviepaz.com
http://cargocollective.com/radiobabelmarseille
www.artsetmusiques.com/musique-du-monde/la-ultima
http://lesdamesdelajoliette.fr
http://ensemble-multitudes.com