Marc Pistolesi

Identités Remarquables | Marc Pistolesi

Courir sur scènes

 

Tout le monde le connaît, mais qui sait qui est vraiment Marc Pistolesi ? Cet artiste assidu poursuit tranquillement sa route malgré un Molière pour le spectacle musical Ivo Livi qu’il a mis en scène, et une multitude de projets dans le OFF d’Avignon.

 

Formé au Conservatoire de Marseille, élève de Myrtille Buttner, « jeune talent » Adami pour un court-métrage avec Zabou Breitman, vu dans quelques téléfilms, passé par la commedia dell’arte chez les Carboni avec son personnage de Pénible, au cinéma chez Jugnot… Marc Pistolesi s’est essayé à plusieurs formes artistiques avant de trouver « sa » marque. Proche d’un théâtre populaire, voire du divertissement, tout en s’appuyant sur une qualité de jeu et un sujet de fond, il aime s’attacher au parcours d’un individu et sonder l’âme humaine.

Après des années à bourlinguer entre projets collectifs et compagnies, il vient de créer la sienne, au nom improbable : Moonschurzboom. Juste parce qu’il trouve que ça sonne bien, que c’est graphique, que le logo a lui-même une identité, une signature.

Ce perfectionniste qui se soigne est devenu optimaliste : « Quand je décide de faire quelque chose, j’essaye de tout faire pour que ça aboutisse. Même si ça tape à côté, ce n’est pas grave, ça veut dire qu’il faut encore du travail. »

Fortement influencé par l’univers de Philippe Genty, c’est un bricoleur d’images qui multiplie les casquettes, aussi bien sur sa tête que dans sa profession. Ainsi, de la mise en scène au jeu, il aura quatre spectacles dans le Off d’Avignon cette année. Ce marathon, annonciateur d’un burn out imminent chez tout un chacun, stimule cet aficionado de la création dans l’urgence et le dépassement de soi.

 

Journée type d’un mec ordinaire

Il va de fait aborder Avignon à mille à l’heure mais avec philosophie : « Il ne faut pas trop se poser de question et gérer les problèmes immédiatement. Après, c’est dans la tête, ce n’est pas de la volonté, juste de l’efficacité. Il faut se conditionner comme pour une course. Par contre, dès le premier août, je dors dans une piscine durant tout le mois », ironise-t-il.

13h : Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty ? au Théâtre du Roi René. Dans ce spectacle musical mis en scène par Johanna Boyé, Marc interprète une quinzaine de personnages, dont les amours qui ont traversé la vie d’Arletty : Prévert, Jouvet…

15h50 : Monsieur Ducci au Théâtre ArtoCe seul en scène, créé par Didier Landucci et Jean-Marc Michelangeli des Bonimenteurs, et qui a déjà reçu deux Devos d’or, raconte le parcours d’un bonhomme au fond du trou qui va finalement retrouver goût à la vie. Un rebond. Marc aime bien les rebonds. Ici, ils sont autant clownesques et burlesques que poétiques. Une performance physique, une vraie invitation au voyage introspectif.

17h00 : Tio, itinéraire d’une enfant de Brassens au Théâtre du Grand Pavois. Dans cet autre spectacle musical, il retrouve sa complice, la passionaria flamenca Christina Rosmini. Elle a écrit un texte avec 97,56 % des mots de Brassens, que Pistolesi met en scène sous forme d’itinéraire initiatique.

19h00 : Le Cabaret Louise de Régis Vlachos. Un hommage à Louise Michel à travers un cabaret qui part dans tout les sens… Une révolution… La mise en scène de Pistolesi prend le parti de la rupture, théâtrale, amoureuse, du peuple face au pouvoir…

Ajoutez à cela le tractage et les retours scène, il reste peu de temps pour souffler. Mais on peut parier que malgré la fatigue, on le verra courir voir jouer quelques potes ou traîner le soir du côté de la place des Carmes pour boire des verres avec ses très nombreux amis. Car Marc n’est pas un solitaire, pas plus dans la vie qu’artistiquement. Loin de là… Le Théâtre des Carmes lui rappellera le triomphe du spectacle qu’il a mis en scène, Ivo Livi d’Ali Bougheraba, qui a reçu le Molière du meilleur spectacle musical en 2017. Une distinction qui ne l’a pas rendu plus heureux, si ce n’est la fierté d’être reconnu par ses pairs. Une étape dans un parcours.

 

Théâtre physique

Ce qui le motive ? Inventer, tout le temps. Il aborde ses mises en scène et son écriture par le visuel. Il en dessine toute la mécanique et jongle avec les feuilles A4 griffonnées. Passionné de musique et batteur, il a besoin d’associer les mots au sons, mais aussi à leur graphie pour en trouver le rythme. Idem avec son approche du jeu.

Travailler avec des amis lui apporte une confiance qui est la base de son travail. Longtemps passionné de skate, il compare sa façon de créer à ce sport. Il lui a emprunté le tempo, le mouvement et le sens de la figure.

Insatiable, il se nourrit de chaque projet comme d’une expérience qui ferait reculer ses doutes. Rien d’étonnant à ce que Lettre à un jeune poète de Rilke ait été longtemps son livre de chevet. Il y trouve assurément des explications à son éternel questionnement sur le processus de création.

 

Léonard, le projet d’une vie

Présenté en 2016 dans le Off d’Avignon en mode crash test, sa pièce Léonard est en perpétuelle évolution. C’est le côté Caubère de Pistolesi, un maître qu’il admire. Dans cette pièce autobiographique sur bien des points, il se raconte au travers d’une ville fantôme, en souffrance, qui ressemble fort à Gardanne, sa ville natale dont il ne s’est jamais vraiment détaché. Léonard est un objet fragile, très touchant, avec une vraie recherche artistique et beaucoup de poésie. Léonard (et son anagramme, Arnolde) semble être le double théâtral de Marc. Un personnage onirique, un peu clown, burlesque, inspiré d’un mélange entre l’imaginaire et l’environnement social dans lequel il évolue.

Cet insaisissable, affable et boulimique de travail n’a pas encore commencé son Avignon 2018 qu’il prépare déjà celui de 2019. Il projette d’y rejouer Léonard, sans l’interpréter, et il accompagnera également les Épis Noirs de Pierre Lericq, probablement avec une mise en scène de Fabien de Pagnol.

Mais où s’arrêtera donc Marc Pistolesi ?

 

Marie Anezin

  • Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty ? d’Éric Buet Élodie Menant(mise en scène de Johanna Boyé, assistée de Lucia Passaniti) :
    du 6 au 29/07 à 13h au Théâtre du Roi René (4 bis rue Grivolas).
    Rens. : 04 90 82 24 35 / 07 81 41 24 96

  • Monsieur Ducci :
    du 6 au 28/07 à 15h50 au Théâtre Arto (3 rue Râteau).
    Rens. : 04 90 82 45 61

  • Tio, itinéraire d’une enfant de Brassens :
    du 6 au 29/07 à 17h au Théâtre du Grand Pavois (13 rue Bouquerie).

  • Le Cabaret Louise de Régis Vlachos :
    du 6 au 29/07 à 19h au Théâtre des Barriques (8 rue Ledru Rollin).
    Rens. 04 13 66 36 52

Pour en (sa)voir plus : www.facebook.com/marc.pistolesi / www.facebook.com/MOONSCHURZBOOM/