Husbands © Cauboyz

Portrait : Husbands

L’échappée belle

 

Autoproclamés « branleurs et fans de Cindy Lauper », Mathieu “Kid Francescoli” Hocine, Mathieu “Oh! Tiger Mountain” Poulain et Simon Henner (Nasser) unissent leurs sensibilités pour livrer un premier album de pop hédoniste et décalée.

« Ne va pas dire que c’est un album fait à la va-vite avec des chutes de Nasser, hein ! »
L’entretien avec les trois amis à la Friche, où ils ont établi leur quartier général, s’achève comme il a commencé : dans un grand éclat de rire. Il faut dire que Mathieu « Tiger », accessoirement squatteur en chef de ces colonnes, n’est pas le dernier pour la déconne, n’hésitant pas à prendre sa plus belle voix pour se lancer dans des imitations un brin douteuses. Un humour (très incorrect) que partagent ses deux compères, hilares, et dont témoigne à sa façon Michel, chanson-sketch entre français et yaourt qui clôt le premier album du trio par un étonnant « hommage » à… Michel Platini : « C’est parti d’une blague sur son intervention dans la chanson des Enfoirés. Il y fait une espèce de slam à la Grand Corps Malade. C’est même pas qu’il chante faux, il parle faux ! »
L’humour n’est pas la seule chose que les trois jeunes hommes ont en commun. Il y a la musique bien sûr, notamment ce faible partagé pour le R’n’B des 90’s, « TLC, Kelis, Mary J. Blidge, le morceau de Busta Rhymes avec Mariah Carey… On adore sa chanson de Noël aussi ! » (sa plastique ne semble également pas déplaire à Kid, qui dessine les courbes de la chanteuse avec ses mains), et le septième art, à commencer par John Cassavetes, immense cinéaste de la classe moyenne américaine et chantre de la « Nouvelle Vague new-yorkaise » dans les années 70. C’est justement de l’un de ses films ­— le premier en couleurs, tout un symbole ­— que le trio va tirer son nom : Husbands, ou l’histoire de la fugue pour Londres de trois quadragénaires après la mort de leur ami. Parallèle (presque) parfait pour nos trois élégants trentenaires, « échappés de [leurs] projets respectifs » pour s’envoler ensemble vers les sommets de l’Internationale pop. « Les trois du film lâchent la pression, confirme Mathieu « Kid ». De notre côté, on ne voulait pas s’enfermer dans un style alors qu’on aime plein de choses… Certes, le film est plus grave. » Et Simon de rajouter : « Ils sont plus vieux aussi, on n’en est pas là ! » (rires)
Tenant plus du hasard et de l’alchimie instantanée que du projet longuement réfléchi, Husbands est en effet une fugue. Une échappée belle, très belle même, dans les parcours musicaux des trois jeunes hommes, dont les projets respectifs étaient déjà marqués du sceau de l’inceste. Kid et Tiger ont en effet formé un duo quasi inséparable pendant plusieurs années, s’accompagnant l’un l’autre sur scène, tandis que tous deux ont successivement joué les remplaçants de luxe sur les tournées de Nasser depuis deux ans.

Le chœur des hommes
Désormais, la B.O. rêvée du film de leur vie s’écrit, se compose et se chante à trois, spontanément. « Il y a toujours un de nous pour apporter une idée » : une boucle pour Simon (dont on peut découvrir, via les instrumentaux atmosphériques de son projet solo French 79, toute la sensibilité pop), un couplet pour Tiger, un thème ou des cordes pour Kid… La musique d’Husbands ne ressemble pourtant en rien à un compromis bâtard entre leurs formations d’origine. Libre (« On a fait tout ce qui nous passait par la tête ») et raffinée, elle embrasse le genre pop dans ce qu’il a de plus moderne. Si, de l’hymne Dream au non moins fédérateur You, Me, Cellphones et son final « héroïque », la douzaine de chansons que compte ce premier album respectent le format pop classique (morceaux courts et « légers », mélodies imparables, harmonies vocales omniprésentes), elles ne s’interdisent aucune incartade ou mélange a priori hasardeux, à l’instar de la rythmique reggae de Who Knows ou des bizarreries « un peu zoukées » de l’enthousiasmant Everyday. Fort du savoir-faire de chacun et d’une production impeccable, l’ensemble se révèle pourtant très cohérent. Le chant choral n’y est sans doute pas étranger, le mariage des trois voix ­— instruments à part entière — fonctionnant à merveille, entre la puissance de Tiger, le timbre velours de Kid et la délicatesse de Simon. Sensible mais quasiment débarrassée de toute mélancolie, la pop de Husbands semble être guidée par la recherche du seul plaisir, celui que le trio avoue bien volontiers avoir pris à la créer, tout comme celui, jubilatoire, procuré à l’auditeur.
Un hédonisme manifestement partagé par les trois doux rêveurs du label Sounds Like Yeah!, qui ont fait preuve d’un flair rare en signant le groupe sur la foi de deux singles et de la coupe de cheveux de Tiger (cf. interview ci-contre). « Comme ils avaient dans l’idée de travailler de manière assez cool, ça s’est bien goupillé : on a un label pas très loin de nous, on n’est pas obligé de traîner nos guêtres à Paris pendant des plombes pour vérifier à qui on peut faire confiance. » Soufflant un vent de fraîcheur dans le monde impitoyable de l’industrie du disque, cette première expérience prend en tout cas des allures de coup de maître, Husbands affolant déjà la presse et la toile, comme en témoignent les quelque 760 000 vues du clip de Dream sur Youtube. Un succès inattendu qui doit certainement beaucoup au duo Cauboyz, amis d’enfance de Simon et responsables de l’identité visuelle, elle aussi parfaitement pop, de la petite bande. Là encore une première aventure frappée du seau de la réussite, le duo faisant désormais l’objet de toutes les convoitises (clips pour Vincent Delerm et Luce notamment, signature à Los Angeles…), se payant même le luxe de « refuser plein de propositions ». « Ils n’avaient jamais rien fait avant, n’avaient pas d’argent ; c’était le tout début de quelque chose, comme notre projet qui, au départ, était vraiment sans prétention… En fait, on les a lancés comme eux nous ont lancés », résument en chœur (encore) les inséparables « maris ». Avec une telle rampe de lancement, aussi énergique qu’enthousiaste, le décollage semble imminent.

Cynthia Cucchi

 

 

Husbands (Sounds Like Yeah) : déjà disponible sur les internets et le 16/03 dans les bacs

Husbands Release Party : le 26/03 au Poste à Galène (103 Rue Ferrari, 5e).
Rens. : 04 91 47 57 99 / www.leposteagalene.com/

Pour en savoir plus : www.wearehusbands.com/ https://soundcloud.com/wearehusbands