librairie rue Paradis au début du XXe siècle

Humeur | Livre et bataille

Livre et bataille

 

Cette année, le monde du livre s’est doucement rapproché d’un roman dystopique. Si la crise sanitaire et économique aura eu un impact fort sur les chiffres d’affaires attendus, la bibliomanie, elle, n’aura pas faibli. Les lecteurs, nouveaux comme anciens, auront cliqué et collecté leurs bouquins favoris avant de reprendre le chemin des librairies, dans un fort élan de solidarité envers nos commerces de proximité. Le monde du livre est-il en train d’écrire un nouveau chapitre, révolutionnaire ?

 

 

« Un livre est une fenêtre par laquelle on s’évade »

— Julien Green

 

Jamais en tant de guerre nous n’aurons autant lu. La Peste de Camus devient viral, avec 1984 d’Orwell et quelques livres de cuisine veggie.

Mais du côté des librairies, la colère monte, à raison. Durant le premier confinement, les libraires français tournent une page sensible ; beaucoup d’entre eux se retrouvent au chômage partiel et bénéficient d’une compensation des frais fixes pendant la fermeture, aidés par un fond de solidarité de l’État et de la Région. Les chiffres varient mais n’excéderont pas 10 000 euros, que la boutique soit grande ou petite. On dira les avoir aidés. Alors que les petites librairies indépendantes perdent environ 20 % de leur chiffre d’affaires annuel, les grandes en sont au moins à 40 %.

Une concurrence pour le moins déloyale face aux géants du e-commerce et aux grandes enseignes ! Jeff Bezos, président-directeur d’Amazon, qui empoche l’équivalent du salaire mensuel d’un smicard en six secondes, a largement de quoi se brocher sur du papier Arche… Car en mars, la chaîne du livre s’arrête : nos commerçants n’auront qu’à s’asseoir sur leur stock.

Si certains d’entre eux retirent alors leurs livres d’Amazon, parce qu’il y en a assez, d’autres privilégient la vente grâce au site de Libraires du Sud, sur la Place des Libraires ou via leur propre plateforme. Une organisation complexe : il faut du temps et des perspectives, mais lesquelles ? Le « Click & Collect » redonne de la couleur aux couvertures pour la plupart des librairies qui n’ont pas de site marchand. Le prix unique du livre en France, on y tient, et les acheteurs compulsifs le savent. L’offre est culturelle : plus les vitrines sont montrées, plus les ventes explosent. Ne l’avez-vous pas remarqué ? Le livre est une denrée dont on ne peut se passer.

Il devient un ingrédient essentiel pour le second confinement. La chaîne du livre a redémarré : des nouveautés, un nouveau souffle. Comment s’organiser pour que cela puisse continuer ? Les rapports humains sont au centre de l’attention et la vie des centres-villes doit être repensée.

Les libraires sont des acteurs culturels primordiaux et leur métier englobe la préface et la postface d’une relation à la clientèle efficace, agréable et utile pour les idées cadeaux de fin d’année. Une véritable histoire de confiance. Si les jauges d’accueil sont plus strictes qu’au mois de mai, les librairies amplifient leurs horaires et les acquéreurs y viennent en masse. Les messages de soutien envahissent les réseaux sociaux et les boîtes mails des commerçants. Cet élan de solidarité émeut particulièrement les librairies Poisson Lune, Maupetit et les Arcenaulx, avec qui nous avons eu le plaisir d’échanger. Il n’y a pas que les habitués qui se montrent, mais aussi des nouveaux clients. Le livre reprend une place essentielle dans une vie confinée. Fallait-il attendre cet évènement si particulier ? Découvrir, redécouvrir les boutiques aux livres, c’est déjà un pas de plus vers une meilleure organisation de notre monde.

Si vous aussi vous avez envie d’échapper au marasme ambiant, rendez-vous chez votre libraire de quartier !

 

Zac Maza

 

Petits conseils de nos libraires :

 

  • Maupetit (Acte Sud) : L’Enfant lézard de Vincenzo Todisco aux éditions Zoe.

https://www.maupetitlibraire.fr/

  • Poisson Lune : Notre cabane de Marie Dorléans chez Seuil jeunesse et Peau d’homme de Hubert & Zanzin chez Glénat (bande dessinée)

http://le-poisson-lune.com/

  • Les Arcenaulx : Les Graciées de Kiran Millwood Hargrave chez Robert Laffont.

www.les-arcenaulx.com/la-librairie/