Giono au Mucem

Laisse parler le Jean

 

Le Mucem consacre une grande rétrospective à Jean Giono. Sous le commissariat de l’écrivaine Emmanuelle Lambert (Prix Fémina Essai 2019), avec le concours du président de l’association des Amis de Jean Giono, Jacques Mény, il s’agit ici de « Rendre à Giono ce qui est à Giono ».

 

Giono, le Manosquin, le collabo, le résistant, le pacifiste, fut l’un des écrivains les plus importants du XXe siècle. Pour la première fois, la quasi-totalité de ses manuscrits est exposée au public. En écho, des créations contemporaines répondent à l’appel.

L’auteur de Colline nous plonge dans sa Provence noire, sombre et austère. La scénographie nous ouvre ses portes sur une installation, sensible, de Jean-Jacques Lebel. D’emblée, cette mitraillette et ces croquis (inspirés d’Otto Dix) nous emmènent au cœur des blessures de guerre. Loin du chant des cigales, Jean était un homme profondément marqué par les deux grands conflits. Celui qui n’était pas qu’un folkloriste narrait un environnement dur, où l’ennui et la rudesse du quotidien pouvaient aussi faire des ravages. L’artiste Thu-Van Tran redonne un peu de couleurs à la grisaille de Giono.

Fan de western, Jean s’était aussi essayé au cinéma avec son seul et unique film, Crésus, sans grand succès, dans lequel il donna la parole à Fernandel. Mais nombre de ses histoires ont été adaptées admirablement à l’écran, notamment par Pagnol, qui lui doit une bonne partie de sa notoriété.

En souvenir du traumatisme des tranchées, une salle entière est dédiée à son ami Bernard Buffet et à ses immenses toiles de L’Enfer de Dante. Entre les peintures du Minotaure ou de Lucifer, Jean le lecteur de La Divine Comédie vivait ses séquelles de la guerre à travers cette œuvre magistrale.

Des archives, correspondances, reportages photographiques ou encore des carnets de travail permettent une immersion complète jusque dans les entrailles mêmes de l’écrivain. À cette occasion, Clémentine Mélois revisite sa bibliothèque de manière très humoristique et osée. Des tableaux de ses amis peintres et des séquences des films Un roi sans divertissement, Le Hussard sur le toit ou encore de L’Eau vive viennent agrémenter la visite. L’exposition se clôt sur le film d’animation L’Homme qui plantait des arbres réalisé par Frédéric Back en 1987. Jean Giono, fervent avant-gardiste écolo, nous donne à voir un magnifique récit de sa Provence en semant des graines d’espoir…

 

Zac Maza

 

Giono : jusqu’au 17/02/2020 au Mucem (1 Esplanade du J4, 2e).

Rens. : www.marseille.fr