L'équipe Foresta © Yes We Camp

Foresta : nouvelle aire

Foresta, parc métropolitain, ou quand le sauvage s’incruste pour du bon.

 

Au pied des lettres hollywoodiennes de Marseille que l’on voit depuis les autoroutes du nord de la ville, derrière le vaisseau Grand Littoral, se trouve une « coulée verte », une sorte de terrain vague, une colline argileuse de pas moins de seize hectares, à ciel ouvert, faisant face à toute la rade littorale. Le nez au ciel, face à la mer, un peu secret… le terrain n’en est pas plus idyllique : il n’y a pas d’eau, pas d’électricité, le dénivelé est important, parfois glissant et carrément aux quatre vents… Mais voici un défi qu’ont relevé les fous qui rêvent d’un autre monde et qu’on connaît déjà un peu depuis l’été 2013 et leur camping éphémère à ciel ouvert, construit au bord de route entre l’Estaque et le port de Corbières : les Yes We Camp ont relevé leurs manches mais sont déterminés à vous faire mouiller la chemise. Et font le pari que ça vous fera du bien — et notre bien à tous.

Les chantiers collectifs, on connaît ça dans les Cévennes, dans les ZAD ou dans des coins encore un peu à l’abri des grandes métropoles et de la modernité qui nous rend anonymes les uns aux autres. Le principe est simple : on prend un espace, on réunit les savoir-faire de chacun et leurs bonnes volontés, et on peut jouir après quelques efforts, quelques galères et quelques rires d’un espace en commun, à partager, à vivre. Ici, à Marseille, dans ces quartiers nord à l’abandon, entre les tristement célèbre cités de la Castellane, de la Bricarde et de la Viste, c’est ce qu’une équipe de motivés nous propose de construire : un parc, oui, mais un parc métropolitain, qui répondrait au nom évocateur de Foresta.

Le chemin n’est pas sans embûches. Détenu pendant des siècles par la famille du marquis de Foresta, bombardé, ancien refuge de bidonvilles puis d’une fabrique de tuiles, et plus récemment vendu par la Ville de Marseille à une société privée, Résiliances, en 2015, le sort de ce terrain aurait pu prendre la direction d’une construction massive de tours supplémentaires ou de petites propriétés individuelles. Mais les deux acheteurs n’ont pas fait ce choix : emballés par leurs souvenirs de l’été 2013, ils confient l’exploitation du terrain pendant huit ans à l’association. À elle seule, elle pourrait aller vite, mais c’est bien connu, à deux — et à plusieurs —, on va plus loin. Voilà pourquoi depuis deux ans, l’équipe s’est fait accompagner par d’autres activistes qui connaissent bien le terrain et la question : la coopérative d’habitants Hôtel du Nord et Julie De Muer. Qu’on ne s’y méprenne pas : ce n’est pas parce qu’ils sont adossés à des zones d’urbanisation sensibles que le projet est nécessairement et exclusivement dédié à la question sociale. « La question écologique et la question sociale sont évidemment proches, mais c’est sous l’angle écologique que nous avons abordé le projet, explique Léa Ortelli, coordinatrice générale de Foresta, Parc métropolitain, du fait de sa biodiversité exceptionnelle et de la mémoire qu’il porte. Ce terrain est déjà ouvert, tous les jours et depuis longtemps, des gens le traversent. Il est un peu sauvage, un peu artificiel aussi, du fait des remblais nécessités par l’architecture du centre commercial qui le jouxte. Mais notre idée, c’est de générer maintenant du positif et de l’énergie commune pour ce terrain. » Après plusieurs balades pour connaître le site (le sentier du GR2013 entre Saint-Antoine et Saint-André le traverse), de nombreuses discussions avec les associations du coin, des ateliers de pratique, et sous le radar d’une observation publique, le projet se structure : grâce à un financement européen (un FEDER, précisément), Foresta peut s’imaginer plus loin dans le rêve d’un lieu-ressource, qui crée de l’hospitalité, maître mot de cette aventure, un lieu qu’on appellera « le Hameau » par exemple. Entre autres. Et de revendiquer qu’on pourrait rêver plus, mais on voudrait le rêver avec nous. Alors, la mise en œuvre s’organise, et avec cette Fête du Printemps, c’est à tout cela qu’on nous convie. Mettre la main à la pâte, ensemble, pour devenir à nous tous, habitants ou habitant un peu plus loin, les magiciens de Foresta.

 

Joanna Selvides

 

Rens. : http://parcforesta.org
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