FIDMarseille 2012

FIDMarseille 2012

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Reconstitution d’un monde

Début juillet, Marseille devient la place forte de l’un des plus grands événements cinématographiques internationaux, le FID, qui cette année encore propose une programmation de très haut vol.

Depuis peu, le FID a officialisé son long et passionnant travail de défrichage cinématographique en modifiant sensiblement sa dénomination : le D de « documentaire » a laissé place au C de « cinéma », entérinant l’idée qu’entre les genres, la porosité des frontières a laissé place à l’infinie liberté d’expression. Ce basculement n’est donc pas innocent. Depuis vingt-trois ans, Jean-Pierre Rehm et son équipe n’ont eu de cesse de démontrer que l’expression cinématographique pouvait ainsi revêtir les formes les plus variées, et qu’il était parfaitement absurde de réaliser quelque classification entre une œuvre de Raoul Ruiz, Robert Kramer, Frédérick Wiseman ou Jonas Mekas. Le rapport au réel est une question intrinsèque à cet art du « mentir vrai », et les moyens d’y répondre furent nombreux. La nouvelle édition, foisonnante comme il se doit, vient ainsi questionner cette dimension du réel avec, toujours, le même souci : proposer une programmation fournie en avant-première mondiale, hissant le FID au rang des plus dynamiques manifestations cinématographiques internationales. Parmi les heureux élus des deux mille cinq cents films visionnés en présélection, près d’une quarantaine se retrouvent dans les trois compétitions officielles, représentant dix-neuf pays de production. Parmi eux, le spectateur phocéen retrouvera les nouveaux opus de cinéastes confirmés, dont certains ont déjà croisé les programmations passées, comme Philippe Grandrieux (White Epilepsy), Tsai Ming-Liang (No Form) ou Damien Odoul (La Richesse du loup). Mais c’est également avec la richesse des sélections parallèles que le FID a construit sa réputation. Et cette année offre derechef son lot de (belles) surprises. A commencer par une rétrospective Glauber Rocha, artiste essentiel de l’histoire des cinématographies mondiales. On aurait tort de limiter l’œuvre du réalisateur brésilien à sa seule implication dans l’un des principaux mouvements libertaires du cinéma, le Cinéma Novo. Le parcours du cinéaste est d’une fulgurance à découvrir sans réserves. Autre réalisateur d’origine sud-américaine à l’honneur de ces écrans parallèles, le Chilien Raoul Ruiz, disparu l’année dernière, est à l’honneur de cette vingt-troisième édition, pour un hommage intelligent sous forme d’une poignée de films rares. Par ailleurs, l’équipe du FID laisse régulièrement quelques espaces de sa programmation, au sein des sélections parallèles, à quelques grandes structures de diffusion internationales. C’est le cas cette année avec la Viennale, Festival International du Film de Vienne, qui souffle pour l’occasion ses cinquante bougies. L’occasion, à Marseille, de découvrir quelques films classiques, rares mais sublimes, à l’instar de Puissance de la parole de Jean-Luc Godard, d’Itinéraire de Jean Bricard du couple Straub et Huillet, des Mains négatives de Marguerite Duras ou de The Ladies Man de Jerry Lewis. Enfin, citons pêle-mêle, parmi les autres écrans proposés, les thématiques « Les fils du pouvoir », « Portraits » ou « Les fils du son », qui offrent une multitude d’œuvres à découvrir durant les cinq jours du festival. Ce travail de défrichage se révélerait incomplet si l’équipe de Jean-Pierre Rehm ne prenait soin, également, de mettre à l’honneur de jeunes cinéastes en devenir, parfois issus des arts plastiques, pour une présentation de leur travail, soit au sein d’une exposition, soit lors de projections, comme c’est cette année le cas avec la jeune Amélie Derlon Cordina.

Texte : Emmanuel Vigne
Photo : White Epilepsy de Philippe Grandrieux

FIDMarseille : du 4 au 9/07 à Marseille.
Rens. 04 95 04 44 90 / www.fidmarseille.org