Festival Utopia

Technopolis

 

Dans une époque que l’on qualifierait plus volontiers de dystopique, le festival Utopia entend sonner le clairon d’un gai optimisme en dressant sa cité éphémère au sein de la Friche. Le temps d’un week-end festif survolté et planant, l’ancienne fabrique, idéalement recomposée, vibrera sous les ondes électroniques.

 

 

Ce ne sont pas moins de quarante-cinq artistes issu·es de la scène électronique globale qui se produiront lors de ce tout nouveau festival, rêvé et conçu par l’équipe du Cabaret Aléatoire. S’inspirant de la cité idéale imaginée par l’humaniste anglais médiéval Thomas More, Utopia se projette comme une « expérience multi-sensorielle unique ».

Ses maîtres-mots affichent une certaine ambition : « Donner, sensibiliser, comprendre », et depuis plusieurs semaines, grâce aux forces vives d’OPN Tv, Utopia a su faire gonfler les attentes à travers des préludes sous forme d’« Odyssées », dont le dernier en date s’est tenu au Baou.

Concrètement : les lieux, désormais familiers des usager·es de la Friche, ont été rebaptisés et repensés pour l’occasion. Treize espaces renommés aux couleurs d’un monde fantasmé : le Cabaret Aléatoire deviendra ainsi « Thélème » en référence à l’abbaye inventée par Rabelais ; la Cartonnerie sera « Kallipolis », la cité idéale de Platon ; le Toit-Terrasse rutilera sous le nom d’ « Eldorado » ; tandis que la Tour-Expo se changera malicieusement en « Babel », et ainsi de suite…

Si on risque de s’emmêler un peu les pinceaux au début, nul doute que notre ouïe guidera nos pas pour se repérer dans ce line-up — paritaire — chargé à bloc, qui se targue d’un quart d’artistes inédits à Marseille.

Parmi les headliners, à Kallipolis, il y en aura pour tous les genres. On retrouvera entre autres Kittin, pionnière de l’électroclash underground, qui fait son retour à Marseille après huit ans d’absence ; d’autres sons en provenance d’Allemagne, grâce au grand Chris Liebing à la techno ciselée et à Dax J, incontournable des plus grands événements ; les américains Dubfire aux sets endiablés, et Robert Owens, voix légendaire de la house music made in Chicago ; notre Jack de Marseille international sera lui aussi immanquablement de la partie.

Deux labels seront à l’honneur avec des scènes dédiées. Le mythique label de microhouse et techno minimale berlinois Perlo, aura carte blanche à « Libertalia », soit le Petit Plateau, avec son cofondateur Markus Nicolai, ainsi que Jack Ollins, résident et programmateur du Cabaret et du festival, ou encore l’éclectique suisse Sonja Moonear. Le tout jeune label Possession, né du collectif éponyme « libertaire libéré » organisant déjà de mémorables raves techno parisiennes, investira quant à lui Thélème avec ses artistes maison comme Parfait, cofondatrice du collectif, la portugaise basée à Londres Øtta et son puissant set inédit à Marseille, la russe et non moins talentueuse Varya Karpova, et l’industrieux Trym, qui clôturera le bal du vendredi soir.

Les artistes marseillais·es seront également fièrement représenté·es avec Lion’s Drums, l’avatar tribal d’Abstraxion, aka Harold Boué, figure incontournable de la scène locale, la fulgurante Mila Dietrich ou encore les DJs du collectif d’Extend & Play, qui regroupe trois labels et un magasin de disques bien connu des aficionados de musique club.

De plus, plusieurs artistes hors-normes locaux accueillis et soutenus par l’AMI en résidence artistique seront aussi à l’affiche. En effet, plusieurs projets ont été façonnés durant le(s) confinement(s) afin d’être révélés en exclusivité à Utopia. Parmi eux, l’envoûtant collectif afro-futuriste Maraboutage, dont les soirées coupées-déchaînées ont déjà fait leur preuve, le trio Triceratops, proposant plusieurs performances qui viendront rythmer les deux soirs du festival, les mystérieux Sigma 555 avec un spectacle immersif, ainsi que Ziris, duo de complices aguerris des machines.

En marge, ou plutôt à l’unisson avec ces performances toniques, les citoyen·nes éphémères d’Utopia auront le loisir de visiter Ecotopia, un marché responsable réunissant des créateur·ices et initiatives engagé·es et dans l’air du temps comme Localanques Textiles x La Ficelle, qui produisent des sacs recyclés au sein d’un atelier de réinsertion ; Marseille Vintage, vintage shop nomade et sonore, et La French Pique et ses broderies sur-mesure.

Dans l’Agotopia se tiendront des conférences et des débats ouverts et participatifs sur l’avenir de la fête.

La cité démocratique et solidaire a tout de même prévu un espace « Happy few » d’ordinaire réservé aux artistes et professionnels, et ici accessible à quiconque « pour une expérience idéale » pour quelques deniers de plus : « Uluru » (d’après la montagne du centre de l’Australie).

Oscar Wilde a dit qu’« Aucune carte du monde ne mérite un regard si le pays de l’Utopie n’existe pas. » Marseille pourrait-elle devenir la capitale de ce pays de rêves ? On a envie de croire que oui.

 

Barbara Chossis

 

Festival Utopia : les 24 et 25/09 à la Friche La Belle de Mai (41 rue Jobin, 3e).

Rens. : https://utopiafestival.fr/