Festival Les Émouvantes

Jazz et motions

 

Après les « esquisses » de l’édition à voilure réduite en 2020 (des duos), retour à des propositions alignant des formations complètes pour le festival Les Émouvantes dirigé par Claude Tchamitchian.

 

 

L’organisation de l’évènement dans les murs du Conservatoire — dirigé par ce féru d’improvisations tous azimuts qu’est Raphaël Imbert — renforce le haut degré d’exigence artistique et éthique du festival.

On imagine les fondations de la vénérable institution onduler de plaisir sous les vibrations du trio de la sémillante Naïssam Jalal, dont la quête musicale orientalisante se déploie dans un blues universel, grâce à des sidemen aux palettes sonores infinies — qu’il s’agisse de Tchamitchian à la contrebasse, qui ne dédaigne jamais les notes bleues, ou de Leonardo Montana au piano, pourvoyeur de grooves raffinés. La flûtiste donnera d’ailleurs une master-class sur la musique arabe à destination d’étudiants confirmés.

Le pianiste Jean-Marie Machado, qui vient du classique, aura à cœur de prouver, si tant est que nécessaire, que, décidément, l’impro c’est pas du ghetto, avec son projet Majjaka pour lequel il tourne actuellement dans tout l’hexagone. La présence à ses côtés du violoncelliste Vincent Ségal ou de Keyvan Chemirami aux percussions promet de belles séquences poétiques.

« Au carrefour des imaginaires » (puisque tel est le titre de cette édition 2021), le festival abolit toute territorialité pour restituer des paysages émotionnels à visée utopique. Ainsi de la création Chiapas II, portée par le quartet du batteur Jean-Pierre Jullan, qui devrait résonner de quelques échos de la Jungle Lacandone. De là à convertir les étudiants du Conservatoire en zapatistes…

Le sens de la fête ne sera pas oublié, avec le deuxième volet de la Petite Histoire de l’Opéra déployée par le groupe du jazzman Laurent Dehors ou par le duo amoureux Monniot (sax)/Ithursarry (accordéon) qui fait guincher l’impro.

Les artistes du label Émouvance, organiquement rattaché au festival, auront à cœur de déployer l’exigence du croisement entre les musiques d’inspiration afro-américaines et les musiques européennes, trop souvent présumées savantes. Ainsi du quartet Corneloup/Molard (avec Catherine Delaunay à la clarinette et Vincent Courtois au violoncelle) : entre le sax’baryton fou et groovy du premier, le violon délirant du deuxième, et le sens du métier des deux autres devraient jaillir des pépites.

C’est la même exigence d’être à la croisée des chemins qui fonde les perspectives déployées par le quartet Carravagio, avec son jazz tangentiel teinté d’électro, au sein duquel officie notamment à la basse l’immense Bruno Chevillon.

Émouvant, non ?

 

Laurent Dussutour

 

 

Festival Les Émouvantes : du 22 au 25/09 au Conservatoire Pierre Barbizet (2 place Auguste et François Carli, 1er).

Rens. : https://tchamitchian.fr

Le programme complet du festival Les Émouvantes ici