Philippe Pujol © Astrid di Crollalanza

Les États Généreux de la Culture au MuCEM

Cultiver la culture

 

A quelques mois des élections et à l’heure où l’on n’attend plus que les politiques prennent des initiatives, Télérama lance les Etats Généreux de la Culture. A Marseille, c’est autour de débats et rencontres au MuCEM que s’organiseront les idées de ce grand projet.

 

Télérama a souhaité faire son Tour de France de la vie culturelle et montrer toutes les expériences artistiques de l’hexagone. Le journal a choisi de donner la parole aux acteurs, intervenants de la culture, et de se poser dans les grandes villes comme Marseille afin de proposer des rencontres, débats et forums pour montrer comment la culture est constitutive de lien social et permet de rassembler. L’idée étant de faire part à l’actuelle ministre de la Culture, Audrey Azoulay, des idées et des projets dans un livre blanc et, au-delà, aux futurs candidats à l’élection présidentielle, comme une idée de démocratie participative…
Rappelons que les ministres se sont succédé sur ce quinquennat et qu’aucun n’a vraiment marqué par ses choix, à part en démissionnant. La Charte pour l’éducation artistique et culturelle proposée conjointement et tardivement (cet été lors du festival d’Avignon) par les actuelles ministres de l’Éducation et de la Culture ne semble pas trop réaliste tant l’accès à la culture dépend du milieu socioculturel et de l’environnement, et qu’elle doit surtout se construire avec les personnes et s’imprégner des pratiques qui marchent. C’est aujourd’hui l’enjeu de ces États Généreux que de montrer les expériences locales et de se questionner sur la culture comme un véritable projet de société, dont les politiques devraient s’inspirer. Car aujourd’hui, les projets foisonnants touchent tous les domaines et se révèlent transversaux, dans des sphères aussi diverses que le social et les traditions culinaires (partage de savoir-faire autour de repas et d’ateliers pour les réfugiés), le marché de l’emploi et le théâtre (création scénique à partir de vécus collectifs du licenciement), la nature et le commerce (épiceries bistrots créant du lien social et luttant contre l’isolement des campagnes…), pour ne citer que quelques exemples. A Marseille, il y a évidemment la Friche La Belle de Mai qui joue ce rôle de pôle culturel et de créateur de lien social, permettant de la rencontre et de la diversité (crèche, jardins partagés, salle de concert, restaurant, ateliers d’artistes, librairie, skate park…) mais pas seulement, car d’autres initiatives existent, qui seront évoquées lors des débats au MuCEM. Comme l’association Tabasco vidéo — qui avait développé le projet 100 paroles avec les habitants du Panier grâce à l’outil numérique. C’est d’ailleurs l’une des particularités du monde culturel marseillais : le système D. Comme le disait si bien Pascal Neveux, directeur du FRAC PACA, dans nos colonnes : « Le meilleur atout est indéniablement son tissu associatif et son implication alors que les moyens sont très précaires. La faiblesse, c’est sa dynamique institutionnelle, muséale, insuffisamment forte, lisible. Les structures sont présentes, mais les financements ne sont pas à la hauteur. Marseille, qui possède un patrimoine incroyable, n’a pas compris — ou très tardivement — que la culture était un vecteur de développement économique et d’image. On vit actuellement une situation complexe : un potentiel et un gâchis énormes. »
Les fameux outils numériques et multimédias sont désormais indissociables de la culture. Même s’il a rendu la culture est accessible à tous et a permis une certaine forme d’égalité, Internet doit aussi être utilisé comme un outil de partage d’expériences ou de bons plans, et non comme un moyen individuel d’exister et, surtout, pas uniquement comme un moyen de consommer la culture. Il ne doit pas empêcher les gens d’aller au cinéma, d’assister à des concerts ou simplement d’acheter des livres. C’est pourquoi il faut cultiver l’envie d’aller voir des films, des artistes se produire et de ne pas vivre la culture seulement chez soi. Car la culture n’a de l’intérêt que si elle est partagée, et collective. Elle doit donc rester abordable et ne doit pas devenir une activité à destination d’une certaine élite. A l’Etat d’être le garant de cette égalité et de financer une politique qui va dans ce sens. Cette question reste un véritable enjeu à l’heure où les discriminations persistent et où l’entre-soi reste une réalité. »
Les collectivités locales doivent s’appuyer sur les ressources existantes, les expériences, et faire remonter à l’échelle de l’Etat les réflexions et les pratiques qui marchent, qui créent du lien. Et continuer de réfléchir à des nouveaux projets incluant (les ressources culturelles sont immenses) toutes les populations, populations qui sont invitées à participer aux débats sur Internet et à donner leur avis.
Si les projets existent déjà partout en France, c’est que la culture a toujours été une nécessité pour que les populations restent soudées, se comprennent, en partageant. C’est bien la volonté de ces États Généreux que de proposer un projet de société fédérateur en ce temps incertains. Ces débats se feront en présence du cinéaste Robert Guédiguian et du journaliste Philippe Pujol, figures locales parrainant le projet, mais aussi de Macha Makeïeff ou encore de Charles Berling, sensibles à la question du « sortir de l’entre-soi » et de l’accès à la culture pour tous.

Cécile Mathieu

 

Les Etats Généreux de la Culture : le 26/11 au MuCEM (Esplanade du J4, 2e).
Rens. : 04 84 35 13 13 / www.mucem.org / etats-genereux.telerama.fr