Edito n° 185

Edito n° 185

Destinés à nous retrouver seuls dans l’isoloir à retourner dans nos petites têtes les slogans (souvent) fumeux, les propositions (le plus souvent) décevantes et les images (toujours) d’Epinal de nos limités candidats, nous allons bientôt…

Dans le doute, ne t’abstiens pas

Destinés à nous retrouver seuls dans l’isoloir à retourner dans nos petites têtes les slogans (souvent) fumeux, les propositions (le plus souvent) décevantes et les images (toujours) d’Epinal de nos limités candidats, nous allons bientôt pouvoir crier à la face du monde que nous ne sommes pas des panélistes de l’IFOP, mais des êtres humains sensibles et aimants qui voulons changer le monde. Mus par nos convictions sans cesse et nécessairement mises à l’épreuve, munis de notre passeport électoral, nous allons devoir choisir. Le choix appelant l’embarras, du vote utile au ras-le-bol, nous devons dessiner notre futur.
Putain, tant que ça ? Et oui Sancho, le suffrage universel n’est ni un piège à cons[1], ni un moulin à mistral. N’est pas Enfant de Don Quichotte qui veut, me diras-tu. Et bien si : nous ne sommes pas tous berlinois, mais tous enfants de la Mancha. Nous souhaitons tous intimement que ce rendez-vous régulier avec notre Histoire change la vie. Espoir si souvent déçu ou déception d’un trop grand espoir, qu’importe, on veut repartir pour un tour (si possible deux). Car l’élection de l’une ou de l’autre des prétendants au sommet de la déclinante République va en déterminer la nouvelle et les personnages qui vont avec.
Et en premiers ses électeurs. Si le 21 avril 2002 a laissé des traces que nous n’avons pas encore toutes découvertes, ce vote pour se faire peur a fait prendre conscience à nombre de Français que le droit de choisir librement ses représentants n’est pas donné à tout le monde. Cette année, jamais autant d’électeurs n’auront été appelés à choisir le Président de la République et les députés. Le nombre d’inscrits sur les listes a bondi depuis 2002. Nous serons 2,8 millions de plus à pouvoir voter[2] ! + 11 % dans les Bouches-du-Rhône et + 14 % en Seine-Saint-Denis ! Ces nouveaux participants, en partie sortis d’un premier engagement politique un peu violent en novembre 2005, vont faire que leur voix compte, même si personne ne peut prédire à qui elle s’adressera.
Alors si une page est tournée — celle du « Chi » —, une page va s’écrire. Ce scrutin ne peut aboutir à une élection blanche. Celle où aucun choix clair ne montrera la voie à des dirigeants frileux, voire centristes. Vous voulez qu’ensemble tout soit possible ? (Non, ne sifflez pas…) Vous voulez que ça change fort ? Ni l’un, ni l’autre ? Vous n’avez pas vraiment confiance en ces douze salopards réunis autour d’un présentateur-chronomètre ? Quelle que soit notre envie, quelle que soit notre vie, courage, votons.

Pascal Luongo

Notes

[1] Jean-Paul Sartre dénonçait, par sa formule, les élections d’après mai 1968 qui virent les Hexagonaux, « effrayés par la liberté, s’en allant voter par millions pour l’ordre et la sécurité ».

[2] Nous sommes 43 973 024 inscrits au 1er mars 2007 (source : Ministère de l’Intérieur), contre 41,194,689 inscrits pour l’élection du 21 avril 2002 (source : Conseil Constitutionnel).