Didier Petit – Aaaaahhh… Zut ! à l’Artothèque Antonin Artaud

Didier Petit – Aaaaahhh… Zut ! à l’Artothèque Antonin Artaud

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Anatomiques et belles dentelles

Depuis 1988, l’Artothèque Antonin Artaud (1) consacre à l’art contemporain expositions et publications, en plus d’initier les publics liés au collège à de nouvelles formes d’expression. Didier Petit vient compléter la longue liste des artistes passés par là en présentant des œuvres anciennes, peu vues pour certaines, et une nouvelle série de papiers découpés. L’exposition Aaaaahhh…. Zut !!!! sonne comme une rétrospective de l’artiste aux mains d’argent.

A un moment donné, le dessin minutieux de Didier Petit a glissé vers l’extraction de la matière, l’image en négatif et un dessin en réserve. A ce moment-là, le scalpel a pris la place du crayon, celui avec lequel il travaillait depuis ses premières œuvres, celui dont il conserve les mines et les copeaux de taille depuis toujours… Didier Petit considère l’un comme la suite de l’autre et l’outil comme le prolongement de la main : « C’est d’abord du dessin avec un crayon un peu sec pour qu’il n’en reste pas de traces. Et puis après, j’incise avec le scalpel, et doucement l’ombre apparaît. »
L’exposition porte bien son nom, tant on sent devant chacune des pièces de Petit que le geste doit être sûr. Le regardeur comme l’artiste retiennent leur souffle à chaque mouvement…
Que penser de l’artiste qui a passé deux années entières à dessiner environ 100 000 mouches sur la toile d’un sommier (Le Sommeil, 2003/2005, crayon sur tissu) ? Que l’art peut parfois faire office de sablier, et que l’œuvre de Didier Petit, depuis le commencement, semble se faire l’écho du temps qui passe, lentement et silencieusement. Que sa pratique du dessin se mesure au temps, qu’elle en découle même, que peut-être son œuvre ne parle que de ça. Que la dextérité du geste de Didier Petit n’est pas une fin en soi mais un outil elle aussi. Les papiers découpés sont comme des fleurs que l’on effeuille — images de la fugacité de l’existence humaine.
Quant à Didier Petit, amoureux des mots presque autant que des images, il joue avec les titres et les motifs qu’il trouve dans des planches d’anatomies (L’Os et le Sang, 2006), dans les muséums d’histoire naturelle ou dans l’histoire des lieux où il expose (Les Epoux, 2010, pour le Château d’Avignon). Chaque sujet est renseigné à un niveau encyclopédique, le travail de l’artiste s’inscrivant d’abord dans une connaissance scientifique de ce qu’il représente. Alors qu’on pourrait penser que le sujet est un prétexte à travailler, on comprend alors que ce qui l’intéresse dans sa pratique radicale et minutieuse, c’est autant ce qu’il apprend que ce qu’il crée.

Texte : Céline Ghislery
Photo : L’Os et le Sang

Didier Petit – Aaaaahhh… Zut ! : jusqu’au 16/12 & du 3 au 13/01 à l’Artothèque Antonin Artaud (25 chemin Notre Dame de la Consolation, 13e).
Rens. 04 91 06 38 05 / www.lyc-artaud.ac-aix-marseille.fr/artotheque

Notes
  1. L’Artothèque Antonin Artaud est une association animée depuis 1988 au sein du lycée Antonin Artaud par une équipe d’enseignants, sous la présidence du Proviseur.[]