Le Zef © Vincent Beaume

Des nouvelles… Du ZEF

À peine venait-elle de souffler ses premières brises artistiques sous le nom de ZEF que la Scène nationale de Marseille a dû suspendre son envol créatif. Mais pas les activités du théâtre, qui « continue de grouiller d’artistes » et dont l’équipe fourmille d’idées pour porter haut et fort les couleurs de la culture dans les quartiers Nord. On fait le point avec la directrice du ZEF, Francesca Poloniato.

 

 

À quoi aurait ressemblé l’année 2020 de votre structure sans la crise sanitaire ? 

L’année 2020 est une année très importante pour la scène nationale de Marseille, c’est la naissance du ZEF : un outil augmenté, des modalités d’interventions pour les artistes et pour les publics plus hybrides, une équipe plus grande plus diverse.

Alors oui, la crise nous a amputé d’une naissance pleinement heureuse. Après s’être donné les moyens « d’une gestation longue », cet épisode est très castrateur et suspend nos énergies en plein envol.

 

 

Francesca Poloniato © cmarc

Suite à l’arrêt brutal de vos activités provoqué par le premier confinement, avez-vous pu compter sur des soutiens physiques, psychologiques, financiers ?

Sans nul doute les soutiens ont été multiples et véritables.

Que ce soit mes interlocuteurs au sein des collectivités ou au sein de l’État, présents tout au long de ces étapes pour informer, rassurer, prendre des nouvelles, soutenir ! Que ce soit bien évidemment dans le maintien des subventions et dans la mise en place de manière réactive de nouveaux dispositifs, etc.

Le public nous a adressé de nombreux messages de soutien, qui nous ont réchauffé le cœur pendant la période.

Et puis mon équipe, restée drôle, présente, impliquée, inventive, qui m’a soutenue et que j’ai tenté de soutenir autant que faire se peut.

 

 

Avez-vous eu la possibilité de vous réorganiser, voire de vous réinventer, afin de pouvoir profiter un minimum des quelques mois de répit partiel qui ont précédé cette nouvelle épreuve ? 

Nous avons réouvert les portes du théâtre aux compagnies en mai afin qu’elles puissent reprendre un travail de création. Dès le mois de juin, afin de se remettre en perspectives et de retrouver le sensible de la relation, nous avons réinvité nos partenaires relais (centres sociaux, établissements scolaires, associations, etc.) pour des présentations de saison tout en dentelle avec performances chorégraphiques ou théâtrales pour un spectateur, puis nous avons poussé l’activité de la scène nationale plus loin qu’à l’usage durant l’été, et tout au long du mois de juillet, quand il a été effectivement possible de réinventer en chair une présence artistique ouverte et des retrouvailles avec le public. Nous avons été là et massivement : résidences d’artistes, actions de transmission et de pratique théâtrale, sonore, chorégraphique, plastique, photographique, démarche artistique participative en pied d’immeuble, animation culturelle, séances de cinéma, etc. Le tout dans le cadre d’une relation étroite avec nos quatre centres sociaux voisins (Agora, Flamant Iris, MFA de Font Vert, Plan d’Aou). Soit en quelques chiffres sur le seul mois de juillet : 128 heures d’atelier pour 424 participants ou bien encore 33 jours de résidence en quatre projets de création.

Tout cela fabriqué en un temps record.

Et puis après l’épreuve du confinement, la densité de la reprise de fin de saison, la complexité nous attendait bien évidemment à la rentrée, construire, déconstruire, reconstruire… Il n’y a pas eu de répit, mais la vitalité du ZEF était là. Les retrouvailles avec le spectacle et les spectateurs ont été fortes. L’annonce de ce nouveau confinement a été le dernier coup dur.

 

 

Quelles sont vos attentes quant à la considération de l’État pour le milieu culturel face à cette crise sanitaire ? 

Sans hésiter, de ne plus se faire entendre dire que nous sommes non essentiels !

 

 

Arrivez-vous à trouver un quelconque aspect positif, qu’il soit personnel, organisationnel ou communautaire, à toutes les difficultés engendrées par ces handicaps répétitifs ? 

J’ai vu et continue de voir de la solidarité partout : qu’elle soit dans les quartiers entre acteurs de territoires et habitants, qu’elle soit interprofessionnelle, des structures culturelles entre elles, entre lieux et artistes, entre les réseaux : scènes nationales et centres dramatiques nationaux, intersyndicale, etc.

Le sentiment — à nos dépends malheureusement peut-être — de défendre la même raison d’être… le même combat…

 

 

Quel est votre sentiment quant à ce deuxième confinement? Quelles sont vos perspectives d’avenir ?

La ministre de la Culture a ouvert une fenêtre pour ce deuxième confinement, celui de la résidence, de la recherche et de la création des œuvres, nous nous y engageons pleinement. Portes fermées, maison ouverte, le théâtre continue de grouiller d’artistes.

La relation aux établissements scolaires ou autres structures de formation, de soutien ou d’accueil périscolaire reste très active aussi dans le cadre de ce reconfinement.

Nous nous saisissons « de chaque brèche » pour rendre possible notre action de création, de transmission ou de pratiques artistiques.

Évidemment, l’œuvre, le spectacle en ce qu’il a de vivant, face et avec une salle, nous manque cruellement.

Et — surtout — ne pas réussir à se projeter au-delà des quinze jours qui viennent devient fortement usant, démotivant parfois.

 

 

Avez-vous mis en place des mesures spéciales pour garder le lien avec vos spectateurs pendant ce reconfinement ?

Les Chroniques sont nées pendant le confinement. Cet outil disponible sur notre site Internet a été évident à mettre en place pour garder le lien. Elles peuvent raconter de manière souple et réactive l’anecdote intime, l’actualité réinventée, l’initiative nouvelle, les coulisses du ZEF, en donnant la parole à l’équipe, aux artistes, aux partenaires, au public…

D’autres outils pour permettre plus spécifiquement la relation à l’œuvre sont en cours de conception, en attendant la reprise de notre programmation.

 

Propos recueillis par la rédaction

 

Pour en (sa)voir plus : https://www.lezef.org/fr/