Plan Bis - Bastien Lallemant et JP Nataf jouent devant les dessins de Charles Berberian et Alfred

Des nouvelles de… Des livres comme des idées

Malgré l’annulation de ses deux grands évènements annuels, le festival littéraire Oh les beaux jours ! et les Rencontres d’Averroès, l’équipe de Des livres comme des idées ne chôme pas, nous concoctant même un joli cadeau de Noël sous la forme d’un podcast pour penser la Méditerranée du XXIe siècle. Fabienne Pavia et Nadia Champesme, co-fondatrices de l’association, tirent le bilan en attendant… les beaux jours.

 

 

À quoi aurait ressemblé l’année 2020 de votre structure sans la crise sanitaire ? 

On imagine que se seraient tenus les deux événements que nous organisons, le festival littéraire Oh les beaux jours !, en mai, et les Rencontres d’Averroès, fin novembre. Oh les beaux jours ! aurait bien porté son nom puisque la météo était au beau fixe aux dates du festival (on a vérifié !) et les Rencontres d’Averroès auraient rempli la grande salle de la Criée, comme toujours — les réservations allaient bon train lorsque nous avons été contraints d’annuler à l’annonce du deuxième confinement. Tout au long de l’année auraient eu lieu les nombreuses actions culturelles que nous organisons avec un public jeune et avec des lecteurs, à l’échelle de la ville. Et nous aurions pu aussi programmer les conférences du Collège du Méditerranée, université populaire qui a lieu dans des lieux éloignés du savoir, à Marseille et dans la métropole. Bref, on finirait l’année 2020 épuisés mais heureux !

 

Suite à l’arrêt brutal de vos activités provoqué par le premier confinement, avez-vous pu compter sur des soutiens physiques, psychologiques, financiers ?

Nous avons la chance d’être à l’année une équipe de sept personnes et nous avons su garder un lien entre nous en organisant des réunions hebdomadaires et en mettant en place aux dates du festival une programmation numérique intitulée « Le festival auquel vous avez [hélas] échappé ». Certes, cela n’a en aucun cas remplacé le véritable festival en public, mais cela nous a permis de garder une trace de notre programmation et de faire connaître les livres des auteurs que nous aurions dû accueillir. Et puis, nous n’étions pas sans travail car il fallait songer à la rentrée, aux actions que nous menons dans les établissements scolaires et, bien sûr, aux Rencontres d’Averroès dont nous espérions qu’elles pourraient se tenir.
Grace aux soutiens de nos partenaires publics (État, Ville, Région) et privés, qui ont maintenu leurs subventions et leurs aides, nous avons pu rémunérer les auteurs, artistes, intervenants en ateliers, modérateurs, intermittents qui devaient être à nos côtés. Nous remercions ces partenaires car grâce à eux, c’est toute une chaîne solidaire qui a été mise en place et qui a limité les dégâts, du moins matériels. Certes, nous avons perdu nos recettes de billetterie, mais elles ne sont pas prépondérantes dans notre économie puisque nos événements sont en grande partie gratuits. On ne parlera pas de « cataclysme » nous concernant, comme c’est le cas hélas pour certaines structures culturelles, mais du naufrage d’un paquebot dont nous avons pu sauver les passagers !

 

 

Avez-vous eu la possibilité de vous réorganiser, voire de vous réinventer, afin de pouvoir profiter un minimum des quelques mois de répit partiel qui ont précédé cette nouvelle épreuve ?

Comme nous n’avions pas perdu le lien, ni entre nous ni avec nos partenaires, il n’était pas très difficile de poursuivre notre tâche et de penser la suite. En août, le Mucem nous a proposé de programmer trois soirées Oh les beaux jours ! dans le cadre de leur programmation Plan Bis. Elles se sont déroulées au fort Saint-Jean, en plein air, et c’était une grande joie de retrouver les artistes et le public qui étaient au rendez-vous !

Quant au terme « réinventer », nous en sommes un peu las, ou du moins refusons de le considérer comme une injonction. Disons qu’on fait au mieux pour s’adapter aux conditions sanitaires et pour trouver les meilleures formes possibles pour pallier les annulations successives en essayant de rester positifs, prudents et confiants. Et en lisant beaucoup aussi !

 

 

Quelles sont vos attentes quant à la considération de l’État pour le milieu culturel face à cette crise sanitaire ?

Nous espérons que l’État pourra maintenir ses aides (maintien des subventions acquises, chômage partiel en cas de reconfinement…), comme cela a été le cas jusqu’ici pour les deux confinements. Nous espérons aussi que les salles pourront rouvrir avec les mesures sanitaires appropriées (jauges réduites, respect des gestes barrières…) qui permettront à la cinquième édition d’Oh les beaux jours ! de se tenir à peu près correctement en mai 2021. En attendant un retour à la normale le plus vite possible !

 

Arrivez-vous à trouver un quelconque aspect positif, qu’il soit personnel, organisationnel ou communautaire, à toutes les difficultés engendrées par ces handicaps répétitifs ?

Oui, croire à ce qu’on fait, au sens profond et à la nécessité de son projet à l’échelle de la cité. Apprendre à discerner ce qui est vraiment important et ce qui peut attendre… Être réactif et cultiver une capacité d’adaptation dont on se dit qu’elle sera utile dans le futur et transférable à d’autres situations. Par exemple, la création d’un podcast audio nous amène à développer de nouvelles compétences, les actions culturelles qui se tiennent en visioconférence aussi…

 

Quel est votre sentiment par rapport à ce deuxième confinement ? Quelles sont vos perspectives d’avenir ?

Nous avons malheureusement dû annuler les Rencontres d’Averroès et cette deuxième annulation, après celle d’Oh les beaux jours !, était tout aussi douloureuse, bien qu’elle ne nous ait pas pris de court comme la première… En vingt-sept ans, les Rencontres d’Averroès avaient dû être annulées une première fois en 2015 car elles se tenaient le lendemain des attentats du 13 novembre à Paris. Cette fois, c’est une pandémie planétaire qui aura eu raison d’elles. Deux grands maux du XXIe siècle qui ne peuvent que nous inciter à poursuivre cet événement qui pense le monde et la Méditerranée des deux rives et contribue à de nécessaires et salutaires débats d’idées. Plutôt que d’imaginer des débats en visioconférence, nous avons opté pour la création d’un podcast audio, comme une émission de radio mêlant la voix de notre vingtaine d’invités à des temps de lecture et de musique. C’est un énorme travail d’enregistrement, de montage, de direction artistique qui nous mobilise à temps plein. Le résultat devrait être prêt et écoutable pour Noël et laisser une trace qualitative de cette édition annulée.

Cette fois, les établissements scolaires ne sont pas fermés et nous poursuivons donc les actions culturelles dans les collèges, les lycées, avec Sciences Po Aix… Nous avons également pu décerner le Prix littéraire du Barreau de Marseille, un nouveau projet que nous aurions dû mener à bien pendant le festival en mai dernier. Imaginé à l’initiative du Barreau de Marseille, nous avons pu le maintenir avec un jury qui s’est tenu à distance et la diffusion d’une vidéo faisant entendre le lauréat, l’écrivain Laurent Petitmangin, qui a été récompensé pour son livre Ce qu’il faut de nuit (publié à La Manufacture de livres). Et puis nous travaillons déjà sur la programmation de la cinquième édition d’Oh les beaux jours du 24 au 30 mai 2021. On ne s’ennuie donc pas et ce deuxième confinement mobilise toute l’équipe à temps plein dans des formules mêlant télétravail et présence partielle au bureau.

 

 

Avez-vous mis en place des mesures spéciales pour garder le lien avec votre public pendant ce reconfinement ?

Nous sommes actifs sur les réseaux sociaux et continuons d’envoyer des lettres d’information à notre public, qui nous répond souvent et cela fait chaud au cœur !

 

Propos recueillis par la rédaction

 

Pour en (sa)voir plus : http://deslivrescommedesidees.com