Main basse sur la ville de Francesco Rosi

Cycle italien au Cinéma Les Variétés

La route de Rome

 

L’Institut Culturel Italien de Marseille s’associe au cinéma Les Variétés pour la deuxième édition de son impressionnant cycle consacré au cinéma transalpin. Aux cinémas transalpins, devrions-nous préciser, au regard de la belle diversité qui traverse cette sélection.

 

 

Si quelques pays d’Europe entraperçoivent une éclaircie dans la fréquentation des salles de cinéma, après une année 2022 dramatique qui semblait sonner le glas de l’exploitation cinématographique, la situation est toute autre de l’autre côté des Alpes : l’Italie fait en effet face à une crise sans précédent, et les salles obscures, à Rome comme ailleurs, ferment à tour de bras, face à une dégringolade des entrées qui dépasse désormais les 50 %. Une réalité qui impactera de facto toute l’industrie cinématographique du pays, l’État s’étant déjà largement désengagé, depuis de nombreuses années, dans la production d’œuvres filmiques. Un bilan qui n’augure rien de bon dans l’un des pays majeurs de l’histoire du cinéma, qui a, dès l’après-guerre, écrit les plus belles pages de l’image en mouvement. Il est donc plus que nécessaire de rappeler sans cesse tout ce que l’on doit aujourd’hui aux productions cinématographiques transalpines : dont acte avec le passionnant cycle italien proposé au cinéma les Variétés par l’Institut Culturel Italien, lors d’une deuxième édition fourmillante, qui s’étendra du 7 juin au 8 août. La manifestation s’ouvrira en présence de Céline Gailleurd et Olivier Bohler, pour leur remarquable film Italia, le feu, la cendre, sorti récemment en salle, et savamment composé d’archives tournées entre 1896 et 1930, propres à ranimer une histoire engloutie, dans un geste d’une rare poésie. L’Italie est par ailleurs bien connue des cinéphiles pour avoir poussé les limites du cinéma de genre dans des limbes parfois déroutants, du giallo au western, en passant par le snuff movie ou, pire, la nazisploitation ! Ce cinéma bis made in Cinecittà a tout de même accouché d’opus tout à fait jouissifs, à l’instar du El Chuncho de Damiano Damiani, que présentera le sémillant Marc Rosmini, philosophe bien connu du public phocéen, auteur entre autres des Méditations westernosophiques. Un premier focus sur le nouveau cinéma italien ouvrira également ces festivités, qui nous permettra la découverte, en avant-première, de La Stranezza de Roberto Andò, Siccità de Paolo Virzì, Calcinculo de Chiara Bellosi ou Delta de Michele Vannucci, présent à Marseille lors de la projection. La manifestation reviendra ensuite sur l’un des plus éminents cinéastes politiques italiens, Francesco Rosi, qui a su décortiquer les méandres de la corruption, à toutes les échelles, en l’occurrence à travers les deux opus présentés : Cadavres exquis, et surtout le sublime Main basse sur la ville, œuvre exceptionnelle habitée par l’immense Rod Steiger. Il faut d’ailleurs féliciter le courage des distributeurs qui s’investissent régulièrement dans la restauration et la ressortie en copies numériques de films disparus des circuits de diffusion : c’est le cas de Mary-X Distribution, qui nous gratifia voilà quelques mois de deux films savoureux de Fernando Di Leo, génie du polar sanglant durant les années de plomb, Milan calibre 9 et Le Boss. Suivront l’hommage au couple mythique Giulietta Masina / Federico Fellini, avec les inoxydables La Strada et Fortunella, deux raretés cinématographiques, Un vrai crime d’amour de Luigi Comencini et Deux sous d’espoir de Renato Castellani, ainsi que, du 26 juillet au 8 août, une belle rétrospective de classiques du répertoire italien en huit films. Un vaste panorama qui permet en tous points d’embrasser la puissance, la beauté, la cruauté, la poésie du cinéma transalpin.

 

Emmanuel Vigne

 

Cycle italien : du 7/06 au 8/08 au Cinéma Les Variétés (37 rue Vincent Scotto, 1er).

Rens. : cesar-varietes.com

Le programme détaillée du Cycle italien ici