Cluzel, Pierlo, Halcyon et Nahum à la Galerie Dejavu

Cluzel, Pierlo, Halcyon et Nahum à la Galerie Dejavu

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Petit mais costaud

Dejavu, galerie de poche en plein centre d’Aix, mise pour son ouverture sur un quatuor de choc. En plus d’être de talentueux artistes, Cluzel, Pierlo, Halcyon et Nahum partagent l’esprit de sincérité et de fratrie autour d’un fil rouge accroché au « corps ».

Luc Nahum, maître du lieu situé juste en face — chez Alter ego, la voie alternative fut montrée depuis longtemps — a la modestie d’exposer ailleurs que chez lui ses tirages aux matières charnelles. Filles ailées et instants magiques de « rapteur » d’âme. L’alchimie avec le modèle s’avère grandiose sur l’éphèbe encastré dans une benne à ordures. Ayant visité différents supports (vêtements, mobilier…), Halcyon délaisse le dessin et goûte le châssis à travers un début de série prometteur autant que sacrilège de zooms buccaux. Angelo Pierlo, plasticien symboliste au cheminement prolixe et certainement trop précoce pour son temps, porte la parole après sa croix. Impulsant dans la ville un mouvement de jeune peinture aixoise à l’écoute d’autres formes, il remarque qu’ici, « c’est un peu le portfolio de notre vie. » Tous s’investissent en apôtres en proposant de creuser des thématiques plusieurs fois l’an grâce à l’incubateur qu’est déjà ce nouvel espace. On s’attardera davantage sur Nicolas Cluzel. Il vous secoue comme une auto tamponneuse, vous bringuebale toutes tripes retournées et pince hauts les cœurs. Ses toiles sonnent comme des coups de semonce et réactivent en nous l’idée que la picturalité gestuelle est l’expression d’un déménagement des sens. Une œuvre carnivore et frénétique dans laquelle l’humain se démène, grimaçant, tout en vous claquant la face. Pourtant, les figures sont belles comme des clichés d’hystériques. L’organique puisé dans les compositions et couleurs savamment agencées nous fait toucher à une sorte d’orgasme glaçant que l’artiste a dû traverser en travaillant car, parmi ces cris de transe qui partent de la panse, on devine un cinglant murmure, qui commencerait comme un vers de Supervielle (1) : « Tu seras mortel, mon petit… »
Au final, une expo pas « m’as-tu-vu » mais à voir…

Texte : Marika Nanquette-Querette
Photo : Pie-IX de Halcyon

Jusqu’au 31/07 à la Galerie Dejavu (26 rue de l’aumône vieille, Aix-en-Provence).
Rens. 06 66 42 71 72 / www.dejavugalerie.com

Notes
  1. Jules Supervielle conclue Dieu pense à l’homme (dans son recueil La Fable du monde) par ces mots : « Puisque je ne peux pas finir / Je veux que tu sois périssable / Tu seras mortel, mon petit / Je te coucherai dans le lit / De la terre où se font les arbres. »[]