La Brasserie Communale

C’est arrivé près de chez vous | La Brasserie Communale

Brasser de l’art

 

Véritable poumon social du Cours Julien, logée entre un cinéma re(bio)dynamisé et un Summer Camp à succès, la Brasserie Communale ouvre ses portes à qui souhaite muser sans compter. Cet espace resté chantier — évolutif sans jamais vraiment être achevé — accueille depuis maintenant plus d’un an les Marseillais friands d’audace, de festivités et de houblon bien dosé. Petit tour de piste.

 

Que des enseignes bohèmes poussent d’un quartier à l’autre de la cité — sur la base d’un engrais souvent insolite à souhait — n’est plus un scoop depuis quelques années. Mais gare à celles qui s’émoussent sans que nous y ayons traîné nos souliers tannés ! Une réalité contre laquelle la Brasserie Communale a progressivement lutté. Il n’y avait pourtant rien de saugrenu dans les racines du projet, l’objectif étant d’ouvrir un bar populaire cohérent avec son environnement et d’étoffer le propos grâce à une programmation culturelle au niveau. Les quatre membres fondateurs du lieu se sont d’ailleurs toujours interdits de suivre un fil rouge — comme s’il s’agissait d’un automatisme pour la bonne santé identitaire d’une enseigne ! — et préfèrent varier leur sélection — non sans une certaine exigence — au gré des coups de foudre et des (bonnes) influences.

Mais que trouve-t-on concrètement dans ce repaire à haut degré de savoir-faire ? Des bières pardi ! Artisanales et peu coûteuses (de 2,50 euros à 4,50 euros le demi), elles côtoient des vins délicieusement naturels (2,50 euros le godet) et arrosent les mets — tout récemment proposés — d’une carte volontairement simplifiée. Si le menu privilégie les productions locales, le commerce équitable et les subtilités gustatives de saison (houmous veggie, coquelet garni ou douceurs choco-friendly sont à notre portée pour une douzaine d’euros, c’est cadeau !), la singularité se retrouve dans chaque bouchée puisque même les farines cuisinées sont à base de bière. Voilà qui va nous plaire !

Côté programmation, les cycles sont de mise et les rendez-vous, toujours un carton. Qu’il s’agisse de concerts, de théâtre, d’expositions photo ou d’évènements plus ciblés, le talent n’est jamais un coup de poker. Des soirées de soutien — aux festivals du coin tels que Enfin Seule ou Les Cancans — offrent au public l’occasion de « brasser » du lien sans modération, de considérer l’expérience de l’art comme une mission et de l’honorer en peloton. De ces 340 mètres carrés mis à disposition pour des installations et performances régulières, il faut retenir leur capacité à se réinventer. À l’étage, la charpente joliment géométrique couve bien des possibilités : résidences d’artistes, conférences de presse et ateliers rodés (que les effrontés se le disent, la prochaine session de novembre portera sur le thème de la désobéissance civile).

Et pour chalouper en soirée ? La Brasserie Communale nous tient « show » toute l’année puisque de jazz en hip-hop ou de post-punk en électro, qualité et underground forment un seul et même tempo. Sans se comparer aux autres structures marseillaises (certaines étant plus abouties, notamment en matière de rock), le lieu n’oublie point sa genèse (un bar, en somme) et permet une accessibilité à la culture à moindres frais, aussi bien régulière que singulière (autres temps forts de café à venir : le festival musical de rap féminin ou sérigraphique autour du dessin et de la bière). Autre volonté de l’équipe en place : faire matcher artistes renommés et jeunes pousses créatives de la région pour accroître la visibilité d’une communauté bourrée d’idées.

Depuis son ouverture en août 2018, la Brasserie Communale s’est vue grandir, façonnée par ses voisins, par l’opinion collective d’un territoire aussi emblématique et coloré que le Cours Julien. C’est aujourd’hui un bordel « mutant », qui ne manque ni de joie ni de fadas et qui ne craint d’attribuer les raisons de son succès à sa clientèle et à ses habitués. Ici, l’engagement se raconte jusqu’au bout du zinc, sur les bancs de bois ou les chaises d’écoliers, en appui sur les cuves généreuses de l’entrée : l’excès de gentrification, la normalisation d’un centre-ville devenu plus « bourgeois » que « fiesta », le hic du recours impératif aux subventions publiques sont autant de dangereux constats que l’enseigne cherche à cicatriser, pour que la scène culturelle de la ville s’épanouisse dans une absolue mixité, sans péricliter ou se dénaturer.

Respectueuse des desiderata de sa « famille » de clients mais aussi soucieuse de rester éthique en favorisant les partenaires de cœur — tels que le Vidéodrome 2 — la Brasserie Communale choisit mais n’exclut point, fait « communier » les âmes du soir au matin. Très loin de l’inertie, son ambiance quotidienne encourage une véritable vélocité phocéenne. En tant que dénominateur commun du bien-vivre, du bien-ensemble, du bienheureux et du bien-curieux, nul doute que cette fourmilière de caractère, configurée entre ombre et lumière, se fait entendre jusqu’aux Chartreux.

 

Pauline Puaux

 

La Brasserie Communale : 57, Cours Julien, 6e. Rens. : http://brasseriecommunale.fr/

Ouvert du mardi au samedi de 11h à 02h, les dimanche et lundi de 17h à 01h

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