atelier Virage

C’est arrivé près de chez vous | Atelier Virage

Développement durable

 

Au cœur du Chapitre, l’atelier Virage — laboratoire associatif de photographie argentique — s’est installé pour permettre à ceux qui chérissent la pellicule de pouvoir réaliser leurs travaux en toute autonomie, (presque) comme à la maison.

 

 

Mardi, 18h00. Maxime discute avec un copain sur le petit banc en bois dehors. À l’intérieur, derrière un bureau esprit 60’s et bercé par une playlist jazz/funk, Ariel vérifie les inscrits pour les créneaux de ce soir. Le rez-de-chaussée se constitue comme un grand salon un peu fourre-tout, où les gens viennent acheter des pellicules, s’inscrire en adhérant à l’association et réserver un créneau d’initiation, de tirage ou de développement, et même partager leurs idées pour le lieu, soigneusement inscrites dans un carnet. Derrière Ariel, une vitrine avec plusieurs modèles de boîtiers — de différentes époques — et une petite photo polaroid un peu passée d’une bande de copains devant le labo, sur le trottoir, sourire aux lèvres.

« On a ouvert il y a pile un an. Le projet est venu du besoin d’avoir un laboratoire photo accessible et collectif, pour qu’on puisse nous-mêmes être en autonomie sur notre pratique et en faire profiter d’autres photographes. On est trois à l’avoir fondé, après pas mal de travaux entre amis pour réhabiliter ce lieu anciennement dédié à la fête. Tout est du don ou de la récup, du prêt de certaines personnes qui nous aident, de la débrouille, quoi ! Au total, huit résidents bénévoles participent au bon fonctionnement de l’association en tenant des heures de permanence, les mardis soir et samedis. »

La salle de développement se trouve au sous-sol. Entre deux grands frigos qui conservent les différentes chimies, des tirages papier sèchent et des travaux passés sont archivés soigneusement. En bas de l’escalier, un immense tableau de suivi répertorie une multitude d’informations. « Au labo, tout est mis en commun. Le permanent a pour mission de réguler les stocks, mais l’idée est aussi de responsabiliser les adhérents. Chaque personne qui passe déclare ce qu’elle utilise et en quelle quantité, ainsi que le type de travail en cours. De cette manière, on peut suivre les chimies et dilutions simultanées, et, surtout, on évite d’abîmer le travail de quelqu’un. »

Un jeune homme qui développe est justement entre deux bains, en train de chronométrer le temps de lavage de ses pellicules. « Je les ai retrouvées la semaine dernière, elles datent de je sais plus quand, du coup ça va être la surprise ! Moi, je fais surtout du noir et blanc, et en une heure je peux développer jusqu’à quatre films. C’est cool d’avoir un espace, un tarif intéressant (40 euros la carte de dix développements, soit 4 euros la pellicule développée, ndlr) et encore plus de partager de l’humain à travers une pratique collective. »

Derrière de grands rideaux noirs, une nouvelle tête apparaît. « Maxime, tu sais où sont les filtres de contraste ? » Yann est sur l’agrandisseur, en plein tirage, dans la pièce à côté. « C’est la deuxième fois que je fais du tirage tout seul. Je suis venu à la formation du samedi matin il y a deux semaines, c’était bien parce qu’on n’était que deux. Les garçons privilégient les tout petits comités pour que tu puisses vraiment intégrer la technique directement. Aujourd’hui, j’ai cinq heures devant moi, jusqu’à 23 heures. Je pense que je peux tirer trois photos, parce que je suis novice, ça ira plus vite les prochaines fois. Au fait, Maxime, j’ai apporté des bières ! »

Derrière une toute petite porte, une dernière salle. « C’est une salle noire. On y fait la mise en spire et on stocke aussi le papier à tirage qu’on découpe et conditionne nous-mêmes. Les bobineuses nous servent à faire nos propres pellicules de 24 poses à partir de pellicules de cinéma en rouleau, pour proposer un prix vraiment abordable aux adhérents. En noir et blanc, on a de la Washi, de la Ilford HP5 ou encore de la Foma Fomapan, et en couleurs de la Kodak Vision 3 avec un développement un peu spécial. Les prix varient entre 2,50 € et 5 €. On a tous commencé il y a quelques années avec de la Porta à 6-7 €, et maintenant c’est au moins le double dans le commerce à cause de l’engouement pour l’argentique. On essaye en tout cas d’avoir très peu de charges et de rentabiliser le non investissement financier de l’association avec de l’investissement humain ! » Un petit groupe vient d’arriver dans la salle de développement. Ils ont tous réservé pour le créneau de 18h30 et seront en totale autonomie pour les prochaines heures. Certains arrivent avec leur pizza attrapée au coin de la rue, d’autres sont déjà en train de préparer leurs différents bacs de chimie pour procéder aux travaux.

En remontant du sous-sol, des parfums épicés se dégagent de la cuisine où un permanent prépare un mafé pour ceux qui restent toute la soirée. Les dernières marches qui mènent à l’étage donnent sur l’espace numérique. « On avait vocation à rester un labo argentique, mais la demande fait qu’il faut s’étendre. On a donc ajouté un scan, auquel les adhérents ont accès dès qu’ils ont développé leur film et qui est inclus dans le prix de la carte développement. On compte se lancer dans une activité d’édition numérique pour du print photo, parce qu’on pense que vraiment les deux techniques se complètent ! C’est en cours, on recherche quelques subventions pour y parvenir. »

 

Hermine Roquet Montégon

 

Atelier Virage : 17 rue Flégier, 1er.

Rens. : https://atelier-virage.fr