Aires de repas - Le César Place

Aires de repas – Le César Place

C’est vraiment très fin

Notre journaliste a troqué sa casquette de responsable musique pour celle d’apprenti gastronome. Il raconte par le menu son expérience au César Place, fine adresse de la cuisine moderne à Marseille.

resto-cesar-place.jpgC’est une amie, et pas des moindres, qui m’en parle en ces termes : « un restaurant de la Place aux Huiles, sur le Vieux Port, plutôt « nouvelle cuisine » dans l’esprit. Dans le menu de base, tu ne choisis que le plat principal : pour les entrées et les desserts, c’est le patron qui décide, tu ne sais pas ce que tu vas manger… Et la carte change toutes les semaines. » Bon, au moins, il y a du concept, et le concept, c’est très important pour les gens comme moi qui, par nature, s’enfilent tout ce qui peut ressembler à un jouet, sandwiches en forme de Tetris, saucisses taillées pour une partie de flipper : je l’invite. Arrivés sur place, grand bien nous fasse, nous optons pour la terrasse. Un coup d’œil à l’intérieur : design sobre, épuré, plutôt chic mais à mille lieux des restaurants « lounge » qui sont au moins aussi rédhibitoires que les compilations du même nom. Le jeune homme qui nous accueille nous met à l’aise : petit malin, va, ton sourire taquin en dit long sur les surprises que nous prépare le chef… Et m’entraîne illico vers la réserve à vin, bien que je n’y capte rien, c’en est à croire que j’ai une tête qui lui rappelle le Guide Michelin. Le vin est ici une affaire sérieuse : on vous en parle comme s’il était ton nouvel ami sur les deux prochaines heures, et nous optons pour un blanc, ou plutôt trois, tous impeccables, du sec au moelleux, c’est bon d’avoir des amis moelleux. Les entrées arrivent. Nouvelle cuisine oblige, elles sont aussi minuscules que recherchées. Ça commence avec un velouté de carottes à la cacahouète, servi dans une toute petite bouteille en verre, avec paille. Je m’apprête à le sniffer puis me ravise, nous sommes en place publique. La suite est à l’avenant, avec des intitulés dont la taille est inversement proportionnelle au contenu de votre assiette : tartare de saumon à la mangue & blinis aux œufs de poisson, magret de canard au gros sel & beurre de foie gras, salade de lactaires & allumette de fromage… C’est très bon. On passe au plat principal, préalablement choisi, donc : cuisse de canard à l’orange avec son gratin pour moi, carré de veau avec fanes de carottes pour elle, qui est du même avis que moi, oui, c’est très bon, et oui, c’est très joli. Le même serveur, pointant nos choix de gastronomes, nous fait un speech un peu moins long qu’à l’accoutumée. Je le raille : « c’est un peu court, jeune homme. » Il élude en observant que je suis certainement plus jeune, c’est vrai, je fais jeune, voilà qui s’appelle un service de qualité, je reviendrai. A quelques mètres, on peut distinguer le chef (1) dans ses grandes œuvres : une large ouverture donne directement sur les cuisines, souci de transparence, de faire corps avec ses hôtes, superbe allégorie, je m’enflamme, la cuisine, c’est aussi de l’Art, et pas seulement du cochon. Je tâche de ne point manger comme ce rose mammifère, quand bientôt surgissent les desserts. Soupe d’agrumes au Grand Marnier avec son sorbet ananas, attendez je prend des notes, gelée de Passoa sans son petit dictionnaire, crumble de je-ne-sais-quoi et son moelleux au chocolat : cinq miniatures aussi exquises qu’éphémères, c’est un choix, car avec le menu au-dessus, le chef nous prenait en charge de A à Z, en insistant bien sur toutes les lettres de l’alphabet. Une prochaine fois, pour y goûter.

PLX

César Place, 21 Place aux Huiles (1er). Rens. 04 91 33 25 22
www.cesar-place.com

Notes
  1. Roland Schembri[]