Banan’N Jug est composé de quatre chanteuses et musiciennes : banjo, ukulélé, washboard, contrebasse, kazoo, claquettes, mais aussi glockenspiel, percussions....
À l’instar des jugs bands du début du vingtième siècle, Banan’N Jug revisite sans complexe et tous azimuts blues, jazz, calypsos des Bahamas, mentos Jamaïcains, fado en français, blues chinois...
Les harmonies vocales captivantes combinées à la virtuosité des solos (voix, kazoo, et claquettes) mettent en relief ces chansons de tous horizons : autant d'histoires dans diverses langues, racontées en musique et ponctuées d'arrangements pleins de rebondissements.
Animé par une énergie débordante, Banan’N Jug s’approprie le « Jug Spirit » avec humour et générosité. Se refusant à faire un compromis entre exigence artistique et liberté de ton, le groupe Montpellierain se sent à sa place partout où l'on veut bien lui tendre une oreille !
Club Convergences Le samedi 25 novembre 2023 à 20h30 8/12 € www.jazzsurlaville.org
Place Evariste Gras 13600 La Ciotat 04 42 71 81 25
Article paru le mercredi 25 octobre 2023 dans Ventilo n° 489
Jazz sur la Ville
Des racines et du zèle
L’évènement automnal Jazz sur la Ville ressurgit tel un rhizome. Même si les partenaires de l’opération se plaisent à nommer « réseau » la synergie musicale évidente qui en ressort, on ne peut que se rendre à l’évidence : le jazz irrigue cette structure en évolution permanente, en toute horizontalité et, quelque part, dénuée de niveaux, voire de hiérarchie.
En prélude, l’un des derniers grands Soul Men viendra retourner l’Espace Julien : Lee Fields y défendra son dernier répertoire, concocté dans les nouveaux studios du label Daptone, désormais basé en Californie. Sa folie sentimentale aux accents de prêcheur perché devrait d’autant plus ravir le public qu’il sera accompagné des plus redoutables musiciens du genre. Transpiration assurée.
Les jazzfan·e·s seront comblé·e·s à Vitrolles avec les Rendez-Vous de Charlie. Comme il est de mise depuis les perturbations engendrées par la pandémie covidesque, la vénérable association Charlie Jazz se délocalise dans la salle Guy Obino pour un festival qui ne dit pas vraiment son nom. La scène verra se succéder rien de moins que le quartet du sémillant trompettiste américain d’origine érythréenne établi à Paris Hermon Mehari (un jeune et redoutable bopper toujours en quête d’expérimentations débridées) et le quintet Sounds From the Ancestors du légendaire virtuose du sax’ alto Kenny Garrett, ancien compagnon de route de Miles Davis (un répertoire inspiré par l’histoire musicale de sa ville de Detroit, en particulier le R’n’B et le gospel… non, pas la techno, faut pas pousser quand même). Erik Truffaz sera là également avec sa trompette lyrique aux effluves d’acid-jazz, sans oublier le tromboniste Daniel Zimmermann et son hommage à Gainsbourg (lui qui joua avec Nougaro). Retour à Fontblanche mi-novembre pour l’incontournable Black Lives : from generation to generation : ce projet, qui s’inscrit dans la lignée des revendications du mouvement Black Lives Matter, aligne un all-star de l’Atlantique noir aux parfums d’émancipation plus que salutaires, avec notammment « brother » Jacques Schwarz-Bart au sax’ténor, Sonny Troupé à la batterie et Reggie Washington à la basse (c’est d’ailleurs l’épouse de ce dernier, Stefany Calembert-Washington, qui, face à la marée montante du racisme aux États-Unis comme en Europe, a été l’architecte de ce beau projet). Toujours au Théâtre de Fontblanche, la sémillante association vitrollaise convie l’une des légendes vivantes du piano jazz, Craig Taborn, pour un récital en solo dont on se doute qu’il empruntera des chemins de traverse dans les méandres de l’histoire de l’instrument.
Le collectif Jazz sur la Ville met sur un même pied d’égalité toutes les propositions, qu’elles émergent dans la métropole marseillaise, à sa périphérie, en Vaucluse, jusqu’à Nice (Titi Robin), en passant par Var (au Fort Napoléon à Hyères notamment, signalons la présence de la chanteuse oudiste Kamylia Jubran en duo avec le trompettiste Werner Hasler). Le Non-Lieu, cette petite salle de la rue de la Palud, en centre-ville de Marseille, sera de la partie dès l’entame de l’évènement avec l’ancienne voix des légendaires « manoucheux » de Bratsch, Dan Gharibian, et sera le lieu de clôture avec le bluesman « historien » Karim Tobbi (qui auparavant se sera produit avec un ensemble en hommage à la rare période chantée du Quintet du Hot Club de France — avec le fabuleux guitariste de swing manouche Jérémie Schacre dans la peau de Django Reinhardt). Les « petites salles » du centre-ville sont des lieux où le rhizome se porte à merveille : l’Éolienne et la Mesón (l’éthio-jazz d’Azmari, l’arab-jazz de Sarab Quartet, la harpiste soul Sophye Soliveau) sont de la partie, avec des propositions qui font mouche à tous les coups.
Valeurs sûres et jeunes pousses de la cité phocéenne sont de la partie. Ainsi du pianiste Lionel Dandine qui est actuellement en tournée avec son nouvel album À la Rue (avec Lilian Bencini, contrebasse, et Cédrick Bec, batterie), ou encore du trio Odyssey & Legacy du percussionniste/batteur Famoudou Don Moye (« l’ancien » de l’Art Ensemble of Chicago est certainement plus marseillais que vous et moi désormais) avec Christophe Leloil (trompette, bugle… what else) et Simon Sieger (fantastique multi-instrumentiste que l’on aimerait voir développer un jour un projet en «leader »). Deux concerts dans cet extraordinaire lieu qu’est La Caverne à Jazz, tenu par des brocanteurs jazzophiles. Gageons que les prestations du quintet conduit par la fabuleuse chanteuse et violoniste Elise Vassallucci remueront les publics jusqu’aux tréfonds : elle et son groupe (avec notamment le remarquable contrebassiste Nghia Duong) seront présents au Théâtre Comœdia d’Aubagne et à l’Hôtel C2, au pied du quartier Vauban. Tant qu’à évoquer la hype, signalons dans les nouveaux lieux de l’évènement le Château de Forbin, dont les « jazz days » aligneront notamment le trio de Cyril Benhamou, Grabuge, qui fait habituellement les beaux mardis soirs du rooftop de l’Artplexe-Canebière à un tarif somme toute modique.
Enfin, le rhizome produira des pousses surprenantes, comme la pièce de théâtre musical Zzaj, à ceux qui se ratent ou bien le concert « augmenté » via lnstagram du plus gramscien des pianistes de jazz, Giovanni Mirabassi — son jazz marxien et néanmoins lyrique aura-t-il raison de la logique marchande du réseau social ? Dans cette profusion musicale, on retrouvera avec plaisir le Cri du Port : la salle aux marches des quartiers Nord convie notamment la pianiste et chanteuse créole Clélya Abraham, dont l’album La Source est un ravissement. Encore un effet rhizomique, assurément. Comme la subjectivité revendiquée et le oaï assumé dans la présente sélection !
Laurent Dussutour
Jazz sur la Ville : du 1/11 au 3/12 à Marseille et en Provence.