Alain Sauvan - (In)certains regards 

« Pour voir, il ne faut rien savoir, sauf savoir voir »

— Wols

Le (In), seul, peut venir d’inverser, procédé de création des images ou d’introspection peut être. Ou alors, lié à Certains, témoigner d’une forme d’incertitude. Regards. Rechercher des regards quitte à les inventer. On en vient à penser au miroir qui lui aussi inverse (ça se discute).

Voilà pour le titre.

Ces regards, ce sont ceux d’une famille. Famille imaginaire dont je n’ai pas le souvenir.

Le père s’appelle Platane, figure tutélaire faisant preuve d’une grande résilience grâce à sa faculté à digérer les objets qu’on lui plante et scarifications diverses. La mère c’est Bouleau Blanc, sa peau d’une blancheur diaphane fabrique le meilleur des pansements quand elle se détache délicatement du tronc. L’enfant, lui, c’est Loupe de Peuplier. Comme son cousin Ronce de Noyer, c’est une excroissance, cela étant vrai pour tous les enfants. Une excroissance un peu particulière, plutôt une tumeur, effrayante par sa prolifération de pustules, qui porte en elle des trésors de beauté une fois finement débitée et polie.

Voilà pour l’exposition. J’espère que ceci vous éclairera un peu. Pour moi cela a été le cas.

J’ai perdu ma mère quelques heures après ma naissance. Mon père, se retrouvant le même jour père et veuf, me confie à sa soeur le temps de faire face. Il décèdera peu après. Je serai donc élevé par ma tante et mon parrain. Un billet de loterie permettra d’acheter une télévision au début des années 60. Un cycle Eisenstein (en particulier Alexandre Nevski), l’expressionisme allemand, le procès de Jeanne d’Arc de Bresson, tout seul tard dans la nuit, l’oeil ne peut que s’ouvrir. Plus tard Georges Bataille et Antonin Artaud m’apprendront la mise en marge du réel afin d’accepter une dérive, d’en saisir le sens et alors de la transformer en quête. Quand j’ai ouvert les yeux, le monde m’entourant m’étant complétement étranger, du fait de l’absence maternelle, je l’observe depuis avec peu de référents en déclinant tous les sens du mot appréhender. Je vis au Brusc dans le vent près de la mer.

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