Thomas Couderc et Teoman Gurgan – Les Vacances d’automne

Thomas Couderc et Teoman Gurgan – Les Vacances d’automne à Diagonales 91

Des racines et des 4L

 

Stationnement interdit devant les vitrines de Technè, rue Jean de Bernardy, pendant toute la durée des RIAM, où Thomas Couderc et Teoman Gurgan ont garé leur œuvre.  A la question « comment reboiser nos villes ? », les deux artistes apportent une réponse digne de Gaston Lagaffe…

Les Vacances d’Automne 2012, c’est l’histoire d’un arbousier, natif de la garrigue de Nîmes, qui a fait le voyage jusqu’à Marseille dans une fourgonnette 4L pour se planter devant la vitrine de Diagonales 61. Enfin, pas vraiment, puisque l’arbre, demeuré dans la voiture, déraciné, sera privé de terre et seulement humidifié pour tenter d’être gardé en vie, puis replanté à la fin de l’exposition. Thomas  Couderc et Teoman Gurgan ont préféré investir la rue plutôt que la vitrine qui leur était offerte, proposant au passant l’image « broodthaersienne » (1) d’un arbre sortant d’une voiture, à l’intérieur de laquelle on découvre un système d’humidification assez élaboré (à première vue). L’image est absurde et l’histoire ne l’est pas moins…
Etre un héros d’aujourd’hui, du quotidien, voire un anti-héros, renouer avec les plaisirs juvéniles de se raconter des histoires, se servir de l’art pour rencontrer des gens, des spécialistes (chercheurs du CNRS, mineurs d’Alsace…)… C’est ainsi que Teoman Gurgan et Thomas Couderc conçoivent la vie d’artistes.  Et parce que « à deux, c’est mieux », ils collaborent depuis leur quatrième année aux Beaux-Arts de Luminy. Chaque nouveau projet est une œuvre à quatre mains, qui s’inscrit dans un programme artistique et littéraire, Lépopée, leur petite histoire de l’art personnelle qui se raconte sous forme de textes dialogués et s’étoffe à chaque fois que le duo sévit.
Vivre la grande aventure pousse à sortir du white cube et à parcourir les campagnes. L’œuvre de Couderc et Gurgan est à la fois performative et formelle, puisque leur démarche aboutit toujours à une installation, parfois à une sculpture, qui ne nécessite pas forcément d’en connaître la genèse. Mais vous auriez tort de vous passer des vidéos postées sur le blog qui accompagne leurs projets, dans lesquelles on apprécie la démesure des moyens mis en œuvre et sa résonance humoristique avec le résultat. Dans le fond, ce sont des types simples. Quand ils creusent une galerie de trois mètres de profondeur dans cent mètres cubes de terre, c’est pour trouver des vers de terre et partir à la pêche. Les défis qu’ils se posent à chaque projet sont sans principe de précaution, l’échec les guette en permanence. Et si leur démarche a quelque chose de Dumb et Dumber, elle n’en pose pas moins des questions artistiques et philosophiques cruciales, notamment celles de la galerie d’art et de son système, du marché et des publics, de comment vivre sa vie d’artiste et, finalement, sa vie tout court.

Céline Ghisleri

 

Thomas Couderc et Teoman Gurgan – Les Vacances d’automne : jusqu’au 15/12 à Diagonales 91 (91 rue Jean de Bernardy, 1er).
Rens. 09 52 52 12 79 / www.techne-marseille.com / http://lepopee.tumblr.com / http://lesvancesdautomne.tumblr.com

Notes
  1. à la fois poétique et farfelu, en référence à l’artiste plasticien belge Marcel Broodthaers[]