Images Contre Nature 2012

Images Contre Nature 2012

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Etrange et pénétrant

Pour sa douzième édition, le festival international de vidéo expérimentale de Marseille continue son exploration des champs visibles et invisibles de l’image en mouvement.

Chaque année, la fine équipe de P’Silo offre à la cité phocéenne une vraie respiration dans la sourde chaleur qui s’abat sur la ville. Une bouffée d’air frais, mêlant le plaisir de l’expérience visuelle à la convivialité de l’accueil. Ainsi, se rendre aux soirées d’Images Contre Nature est une double aventure en soi : la rencontre d’êtres humains aux antipodes de la représentation élitiste que l’on peut s’en faire, et la découverte de films totalement inédits, qui ne bénéficieront presque jamais d’un réseau de diffusion digne de ce nom, souffrant de la radicalité pourtant salvatrice avec laquelle les réalisateurs abordent leurs films. Si les opus sélectionnés contribuent à développer chez le spectateur ses fonctions sensorielles, le plaisir se parachève autour du bar, à converser des heures durant avec Hélène Bez ou Claude Ciccolella. Ce qui n’empêche en rien l’exigence d’un travail unique porté depuis douze ans. Lors de cette nouvelle édition, l’équipe de P’Silo a derechef opté pour une formule, à présent rôdée, qui convient parfaitement aux mécanismes de sélection des principaux intéressés : sept programmes (espace, identité, long, mouvement, perception, sens, temps), réunissant plusieurs dizaines de films, souvent courts, propres à approfondir l’expérimentation de tous les aspects intrinsèques de l’image projetée. L’équipe organisatrice étant particulièrement connue pour sa fidélité et les liens d’amitiés tissés avec les artistes, certains réalisateurs ont déjà été croisés dans les sélections précédentes. Mais chaque année, certains thèmes se révèlent plus particulièrement que d’autres. Comme le souligne Hélène Bez, « nous avons été surpris de recevoir cette année, bien plus que d’habitude, de nombreux films construits sur le principe du found footage, l’utilisation d’images déjà filmées. Plus ça va, plus le cinéma se cite, ou se récite. Au-delà, même, le cinéma cite la télé, qui cite Internet, qui cite à son tour le cinéma… Tout est en boucle. Nous sommes là tout autant dans l’hommage que dans le détournement. » En ouverture et en clôture de l’événement, Images Contre Nature nous propose de découvrir le surprenant travail de Doplgenger, duo d’artistes en provenance de Belgrade, qui bénéficie cette année de deux cartes blanches autour du cinéma amateur yougoslave. « La programmation n’est pas une programmation pour élire les meilleurs films, mais pour faire part de notre propre réflexion sur ceux-ci, rajoute Hélène Bez. En cela, nous nous sentons très proches de la démarche libertaire d’un collectif comme Doplgenger. » Au menu de cette douzième édition, le spectateur curieux pourra par ailleurs assister aux cartes blanches offertes à Peuple et Culture d’une part, structure phocéenne particulièrement active, souvent citée dans ces colonnes, et au live de Denis Cartet, autre Marseillais que l’on ne présente plus, aux commandes de Digital Borax, accompagné ici par Mister Frac. Le tout agrémenté d’installations vidéos et d’expositions, à l’instar du travail de Samuel Bester et Sophie-Charlotte Gautier à l’Espace Culture, ou des œuvres imposantes de Julien Chesnel, peintre possédé et brillant, dont les portraits extatiques ou funéraires, selon les angles, couvriront les murs du Théâtre des Chartreux, prolongeant le plaisir extrasensoriel que procure une soirée en compagnie de l’équipe d’Images Contre nature.

Texte : Emmanuel Vigne
Photo : Transimage du duo Doplgenger

Du 10 au 14/07 au Théâtre des Chartreux (105 avenue des Chartreux, 4e).
Rens. 04 91 42 21 75 / www.p-silo.org