Toi, moi, Tituba...

Performance solo par la Cie Kadidi (1h). Direction artistique et interprétation : Dorothée Munyaneza 

Dans sa nouvelle création, Dorothée Munyaneza poursuit son dialogue autour des corps dominés avec la philosophe Elsa Dorlin et son texte Moi, toi, nous… : Tituba ou l’ontologie de la trace, qu’elles abordent à partir de la pensée de Maryse Condé. Par la danse et la voix, la pièce se reconnecte à une mémoire résistante, convoquée à travers la figure de femmes noires, Isabelle, aïeule d’Elsa Dorlin, Tituba et tant d’autres aux vies oubliées. Manière de remédier à ce qu’Elsa Dorlin qualifie de « rature historique », caviardage mémoriel infligé par les archives coloniales, Dorothée Munyaneza arbore un corps dressé, exposé, qui se tient vent debout contre les tentatives d’effacement. Entre ombre et lumière, la chorégraphe, qui se reconnaît dans ces récits de vie invisibilisés, ravive les traces d’un passé éteint en donnant corps à une archive vivante, puissante incarnation de ces voix ignorées à travers le monde. Portée par une création musicale composée par Khyam Allami notamment à partir d’archives orales, la pièce fait ainsi œuvre de commémoration pour engager un acte de transmission réparateur.


Dorothée Munyaneza est basée à Marseille et développe une œuvre ardente. Originaire du Rwanda, elle s’installe à l’été 1994, à l’âge de 12 ans, avec sa famille en Angleterre. Elle étudie la musique à la Jonas Foundation (Londres) et les sciences sociales à Canterbury, avant de s’établir en France. En 2006, elle rencontre François Verret, ils collaborent sur Sans RetourIceCabaret et Do you remember, no I don’t. Elle travaille ensuite avec Alain Buffard, Alain Mahé, Stéphanie Coudert, Ko Murobushi, Rachid Ouramdane, Maud Le Pladec, Jean-François Pauvros, Radouan Mriziga, Maya Mihindou et Ben Lamar Gay. En 2013, elle fonde sa compagnie, Kadidi. Naissent Samedi Détente (création novembre 2014 au Théâtre de Nîmes), Unwanted (création juillet 2017 au festival d’Avignon) et Mailles (création octobre 2020 Charleroi Danse). Avec la musique, le chant, la danse, le texte, Dorothée Munyaneza part du réel pour saisir la mémoire et le corps, porter les voix de celles et ceux qu’on tait, pour faire entendre les silences et voir les cicatrices de l’Histoire. En 2020, Dorothée Munyaneza traduit de l’anglais Hopelessly Devoted de Kae Tempest (auparavant Kate Tempest), paru sous le titre Inconditionnelles chez L’Arche Éditeur. Artiste associée au Théâtre la Ville - Paris de 2018 à 2021, Dorothée est aujourd’hui associée au Théâtre National de Chaillot et à la Maison de la Danse à Lyon, et en résidence à la Fondation Camargo de 2022 à 2024.

 

Direction artistique et interprétation Dorothée Munyaneza 
Musique originale Khyam Allami, Dorothée Munyaneza 
Création costumes Stéphanie Coudert 
A partir d’un texte d’Elsa Dorlin
Création & régie lumière Marine Levey 
Régie son Camille Frachet 

Montévidéo
Les 04 et 5 oct. : mer 19h - jeu 21h
8/16 €
www.actoral.org
3 impasse Montévidéo
13006 Marseille
04 91 37 97 35

Article paru le mercredi 13 septembre 2023 dans Ventilo n° 486

Festival Actoral

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En pleines formes

 

Filant la métaphore d’une couronne de pain dès son identité graphique, la nouvelle édition d’Actoral met en bouche notre temps et vient chercher l’appétit de tous nos sens.

    À l’heure où nous écrivons ces quelques ligne, les crayons de couleur de l’été sont un peu mâchouillés, et la rentrée de septembre nous accable déjà de ses nouveautés et de surinformation. Si c’est à contrecœur que nous quittons la nonchalance estivale, on peut se consoler en se rappelant que septembre est aussi le mois d’un rendez-vous devenu incontournable dans cette rentrée culturelle qui s’étirera jusqu’à la mi-octobre. Si le festival Actoral est synonyme de profusion, il n’en est pas moins aux antipodes du consumérisme appauvrissant qui nous entoure : ici, chacune des soixante-douze propositions est une petite pépite en soi, la signature d’un regard délicat et parfois en même temps une œillade provocatrice envers une société qui s’emballe. Dans la cour de Montévidéo, la petite équipe nous attend pour un point presse avec Hubert Colas, fondateur de cet événement qui a acquis sa dimension actuelle en 2013, il y a dix ans. Celui-ci se plaît d’ailleurs à rappeler le rendez-vous confidentiel que furent les toutes premières éditions, qui réunissait quelques aficionados de la littérature poétique et autres mordus de théâtre, avant que d’évoquer les différentes propositions des deux cents artistes invités au festival cette année. Mais comme à son habitude, Hubert étant de ceux qui se mettent aussi au service des autres artistes, il offre la primauté du tour de parole à trois artistes alors en résidence dans ce formidable outil qu’est Montévidéo : Anne-Sophie Turion et Éric Minh Cuong Castaing nous parlent ainsi de leur installation performative intrigante sur les hikikomori (voir ci-dessous), tandis que le jeune Darius Dolatyari-Dolatdoust nous parle de son amour pour le textile, davantage passionné par le réinvestissement de ce qui existe déjà que par la création, dans une perspective écologique plus que louable dans l’art du vêtement, et dont on peut voir les immenses fresques brodées sur les murs de Montévidéo jusqu’en octobre. Tout les distingue, mais on flaire une même dynamique, sensible au monde qui les entoure et immergée dans celui-ci, bien loin d’une expérimentation incongrue et confidentielle menée dans une tour de verre. De ce même lieu, épicentre du projet d’Actoral menacé par une expulsion comme beaucoup le savent déjà, nous ne parlerons guère dans ces colonnes car l’heure est aux délicates négociations. Nous apprenons que l’État et la Ville de Marseille semblent avoir répondu à l’appel à l’aide d’Hubert Colas, tous conscients de l’incontournable utilité de cet espace de fabrication des œuvres les plus singulières, souvent reconnues par la suite dans les plus gros lieux de diffusion, et maillon incontournable de la vitalité artistique de notre temps pour la ville, l’hexagone et au-delà. Non sans un certain paradoxe, la question devient presque patrimoniale pour la création contemporaine. Estimant cet archipel fertile et prolixe, une ordonnance 45 du ministère de la Culture impose désormais une pérennité de l’usage culturel de ces bâtiments. Puisse le propriétaire l’entendre aussi de cette oreille, c’est tout ce que nous leur — et que nous nous — souhaitons ! Pour revenir à notre présent, l’édition 2023 d’Actoral reprend les ingrédients et les (bonnes) recettes qui ont fait son succès : un investissement du territoire marseillais avec un week-end d’ouverture qui se lie aux dix ans du Mucem, une politique de partenariat avec des grands théâtres comme avec de petites librairies, une polymorphie des formes proposées et une dynamique festivalière qui, par sa programmation journalière sur quatre semaines et ses moments festifs, permet une densification et une unité du public qui se retrouvera de soir en soir, au fil des propositions. Un public à qui ces artistes semblent vouloir faire écouter ce que la société éveille en eux, dans une pluralité de formes « souvent aux confins du burlesque et du macabre »… Vaste programme, dans lequel nous vous invitons à prendre le risque sur quasiment chaque proposition, tant l’ensemble est alléchant. Faisant fi de l’exhaustivité, mais conscients que notre lectorat reconnaîtra beaucoup de noms dans la programmation faite de fidélités artistiques (Christophe Fiat, Mohamed El Khatib, Laura Vazquez, Dorothée Munyaneza, Tommy Milliot, Léa Drouet, Rodrigo Garcia, Dieudonné Niangouna, Dana Michel, la Need Company… et tant d’autres qui échappent à ce name dropping, faute d’espace), nous avons sélectionné des propositions qui arrivent tôt dans l’agenda. Affaires sensibles, à faire, à suivre…  

Joanna Selvidès

 

Actoral : du 21/09 au 14/10 à Marseille.

Rens. : www.actoral.org

Le programme complet du festival Actoral ici

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