Marseille Noir de Cédric Fabre

Marseille Noir, sous la direction de Cédric Fabre (Editions Asphalte)

Noir désir

 

La ville « fausse et haine », selon l’expression de Cédric Fabre, anthologiste du recueil Marseille Noir, se livre ici sous toutes ses coutures : de l’Estaque au Vieux-Port, de la Joliette à la Plaine, de la Belle de Mai au stade Vélodrome, en passant par le Panier ou le Frioul…

 

Après Paris, Los Angeles, Rome et bien d’autres, la collection Noir des éditions Asphalte s’enrichit d’une anthologie marseillaise confiée à Cédric Fabre. Journaliste, animateur d’ateliers d’écriture et écrivain, l’homme se définit comme un « militant du polar » : « Pour qu’un jour il y ait enfin une place pour ce “sous-genre” dans les émissions télévisées, les prix littéraires et les chroniques ! Parce que le polar est à hauteur d’homme, et traite de toutes les arcanes de la société. » Et l’auteur de donner sa définition du genre : le récit d’une interaction entre un personnage et son environnement, les conséquences terribles d’une société criminogène. Exemple type dans la nouvelle de Patrick Coulomb, Le Panier – Le silence est ton meilleur ami : un mec, soi-disant très calme, va finir par tuer son voisin pour tapage nocturne.
Un bon écrivain serait un homme qui observe son environnement pour livrer une sorte de diagnostic sur ce qu’il découvre. Un chercheur, donc, ou un archéologue des bas-fonds de la ville. Dans le présent ouvrage, le point de départ est toujours le lieu, et Marseille se prête particulièrement bien au jeu. Ici, il est pratiquement impossible de faire abstraction du lieu où l’on se trouve. La ville nous rattrape sans cesse avec un cri, un coup (de vent), une odeur. Marseille est un parfait matériau d’écriture avec ses mythes, son folklore et les fantasmes qu’elle génère. Elle est le personnage principal de chaque histoire et se donne en spectacle, à mi-chemin entre tragique et comique. Comme le rappelle l’anthologiste en citant Stevenson : « Certains lieux parlent distinctement. »
A l’heure où les écritures du réel la gagnent, la fiction montre patte noire. Elle est surréelle, à l’image d’une ville ô combien excessive. Dans Marseille Noir, la subjectivité est assumée : ici, on ne fait que raconter des histoires.

Sacha Steurer

 

Marseille Noir, sous la direction de Cédric Fabre (Editions Asphalte), dans les bacs le 2/05 (21€).