L'annulation de Seconde Nature

L'annulation de Seconde Nature

Contre Nature

C’est une catastrophe, un changement subi(t) de situation. Deux jours avant le début de la troisième édition du festival des musiques électroniques et des arts numériques, la décision du Tribunal d’Aix tombe comme un couperet : il n’y aura pas de Seconde Nature en 2009.

Tout semblait pourtant réussir à la jeune association, réunissant deux entités respectées dans leur domaine, Arborescence et Terre Active qui, en novembre, s’étaient vues confier par la Ville d’Aix les clés d’un espace municipal, la Scène Numérique, leur permettant de donner une visibilité à leur activité toute l’année.
Les choses commencent à se gâter trois semaines avant la manifestation. Suite à une pétition du CIQ de la Méjanes, signée par 107 personnes (sic), l’équipe du festival— qui a alors déjà réalisé toute sa communication papier — se voit en effet notifier par la Ville l’impossibilité de réaliser son édition à la Cité du Livre et proposer une installation à la Fondation Vasarely.
Echaudés par les expériences difficiles de leur précédente manifestation, Territoires Electroniques, les organisateurs demeurent inquiets, craignant un prochain campement de gens du voyage pentecôtistes sur le même terrain. Les services municipaux les rassurent, mais à tort. Quand, six jours avant le début du festival, les Pentecôtistes débarquent à Vasarely, comme annoncé dès février selon les procédures légales de déclaration à la mairie, la panique s’empare de l’équipe de SN. Mais rien n’y fait.
Alors, à qui la faute ? Dans un discours déplorable, Sophie Joissains invoque le manque de coopération des Pentecôtistes, qui auraient refusé de s’installer avec une autre communauté de gens du voyage. Faisant un amalgame malheureux entre lesdites communautés, la fille du maire et élue à la Culture (sic) ignore ainsi que la venue des Pentecôtistes est parfaitement légale.
A aucun moment de la conférence de presse faite dans l’urgence (1), il n’est fait mention de la responsabilité de la Ville, qui finance pourtant le festival à 35 %, conjointement avec la Communauté du Pays d’Aix. Il semble qu’une fois véhiculée l’image d’une ville tournée vers le futur (« La culture de demain, c’est la culture d’aujourd’hui », dixit Sophie Joissains), la concrétisation d’un tel projet soit devenue accessoire. La culture doit-elle se réduire à une vaste opération de communication municipale ? Comment se mettre à l’abri des manœuvres politiques quand on ne peut se libérer de la main qui nourrit ? La billetterie — 3 000 personnes par soir — aurait permis à SN de gagner quelque indépendance en générant ses propres recettes.
Ce malheureux événement repose la question de la nécessaire émancipation financière des projets culturels, ainsi que du poids de certains lobbies particulièrement réticents à l’expression artistique et culturelle. L’heure est grave : ce monde où la culture se voit instrumentalisée sonne étrangement aux oreilles d’une jeunesse pas si abrutie par les sons électroniques…

Joanna Selvidès

Vidéo de la conférence de presse

une vidéo du reseaumarseillais