Nos corps sont vos champs de bataille

Documentaire d'Isabelle Solas (France - 2021 - 1h40). Projection suivie d'un échange avec la réalisatrice, dans le cadre du Cycle de Cinéma 2023-2024 de Peuple & Culture Marseille
 
 

Dans une Argentine divisée entre un conservatisme profond et un élan féministe inédit, le film dépeint les trajets de Claudia et Violeta, dans leur cheminement politique et leur vie intime. Femmes trans se revendiquant travesties, elles se heurtent avec leurs camarades à la violence patriarcale, jusque dans leur chair. Convaincues d’être les actrices d’une révolution en cours à la croisée des luttes, face à la défiance du vieux monde elles redoublent d’énergie pour inventer le présent, aimer et rester en vie.

 

Grand Prix du jury – Chéries-Chéris 2021 ; Cinéma du Réel 2022

 

Videodrome 2
Le samedi 3 février 2024 à 17h
Prix libre (+ adhésion annuelle : 6 €)
www.videodrome2.fr
49 cours Julien
13006 Marseille
04 91 42 75 41

Article paru le mercredi 27 septembre 2023 dans Ventilo n° 487

Cycle « Intimité(s) / Immensité(s) » à Coco Velten

Intimes convictions

 

L’incontournable structure Peuple et Culture nous propose, du 27 septembre au 8 décembre à Coco Velten, un programme de huit films sélectionnés lors d’ateliers de programmation : une autre manière, bien plus enrichissante, de mettre en œuvre collectivement les résonances filmiques.

    De nouvelles pratiques se sont développées ces dernières années au sein des festivals, et parfois des salles même, qui conduisent à réinventer les gestes du passeur, à rendre horizontal l’acte programmatique. S’échappant peu ou prou d’une conception verticale lors des choix des films projetés — une seule personne dispense au public son unique regard —, les ateliers de programmation invitent toutes et tous à enrichir collectivement leurs perceptions des œuvres, à étayer leur choix, en vue d’un corpus ainsi créé qui sera alors présenté au public. Une démarche passionnante, et non exclusive, qui constitue la pierre angulaire du programme « Intimité(s) / Immensité(s) » proposé par Peuple et Culture Marseille, du 27 septembre au 8 décembre, à Coco Velten, au sein de la cité phocéenne. Ce travail de visionnage collectif fut étalé durant plusieurs mois, et l’on ne peut que se féliciter des films retenus, à commencer par Cameraperson de Kirsten Johnson. La cheffe opératrice, à l’impressionnante filmographie, nous fait parcourir le monde, dans une juxtaposition des regards entre filmeuse / filmé.e.s, forme contemporaine d’un ciné-train partant à la rencontre, avec force empathie, des destinées humaines. Huit opus auront finalement été sélectionnés lors de ces ateliers de programmation. Entrant particulièrement en écho aux discours politiques et médiatiques ignobles qui ont suivi l’arrivée récente de migrants à Lampedusa, l’opus de Sarah Leonor, Ceux de la nuit, plonge quant à lui son regard sur ces femmes, hommes, enfants qui tentent désespérément la traversée de la frontière alpine aux abords de Briançon, vers Montgenèvre. Celles et ceux que l’on ne sait nommer que d’un dénominatif, migrants, afin de réduire sémantiquement à sa portion congrue leur existence et leur dignité même. Autre beau choix de cette dynamique de programmation, Il n’y aura plus de nuit d’Éléonore Weber nous a enthousiasmés lors de sa sortie en salles, par sa manière tout à fait originale, et expérimentale, d’aborder l’horreur des conflits armés, de l’Afghanistan à l’Irak, au moyen d’un montage subtil de vidéos enregistrées par les armées américaine et française, par des pilotes en opération, en caméras thermiques. Une prouesse cinématographique qui se révèle passionnante, grâce, en l’occurrence, à la maîtrise totale des outils sémiologiques. Citons enfin épars Aucun d’eux ne dit mot, de Jacques Lin, plongée humaniste, et juste, au sein d’enfants autistes, Overseas de Sung-A Yoon ou Chaylla de Clara Teper et Paul Pirritano, documentaire tout à fait saisissant, et qui mériterait une très large diffusion, sur les violences faîtes aux femmes. Sans oublier les deux beaux opus que sont Nos corps sont vos champs de bataille d’Isabelle Solas et Soy libre de Laure Portier — distribué par l’excellente structure marseillaise Les Alchimistes — portrait émouvant, par la réalisatrice, de son jeune frère Arnaud. Cette remarquable programmation, geste collectif, vient démontrer ainsi toute l’intelligence du dispositif où se fondent les perceptions humaines.  

Emmanuel Vigne

   

Cycle « Intimité(s) / Immensité(s) » : du 27/09 au 8/12 à Coco Velten (16 rue Bernard du Bois, 1er).

Rens. : www.peuple-culture-marseille.org

Le programme du cycle « Intimité(s) / Immensité(s) » ici