Glory Garrigue

Dessins, sculptures, écritures et tissages de Lazare Lazarus, Clovis Deschamps-Prince, Nelo Gevers et Aurilian. En écho au livre Écologies Déviantes de Cy Lecerf Maulpoix.

Glory Garrigue est une exposition, un dialogue entre quatre pratiques artistiques en écho à la présentation du livre Écologies Déviantes de Cy Lecerf Maulpoix.

Lazare Lazarus, Clovis Deschamps-Prince, Nelo Gevers et Aurilian dessinent, écrivent, sculptent ou tissent ensemble différentes matières: végétales, minérales ou chimiques.

De la garrigue glorieuse agrippée aux flancs rocheux et nacrés des calanques aux zones de cruising du Montrose, gravures, dessins, céramiques, matériologies et assemblages nous racontent chacune à leur manière l'intimité d'une relation artistique et désirante avec les paysages marseillais.

 

*** À propos des artistes ***

 

* Clovis Deschamps-Prince

C'est dans le paysage que je trouve les formes, les sensations et les matériaux que j'utilise dans mon travail. J'erre, je glane, je bivouaque : en me réappropriant les ressources et les connaissances d'un milieu je crée les conditions d'un dialogue avec celui ci, pour l'habiter au mieux. Dans le paysage, je cherche la retraite, l'interstice. Je vois, ou je fantasme, la "Nature" comme une marge accueillante, un espace qui échappe aux contraintes des normes sociales, un lieu où je peux m'indéfinir.

 

* Nelo

En ce moment je suis obsessed des pierres, des corps minéraux qui fondent ou s’agglomèrent, de grottes et cavernes, des coulées hyper lentes et des surfaces qui s’émoussent. Mes langages sont matériels et désirants. Iels prennent forme et se partagent à travers des histoires, des instals, des collections qui circulent et des balades-fictions. Ce sont des espaces-portails, dans lesquels des fragments d'organismes et de mémoires se côtoient, se traversent, se font et se défont. Les rôle-plays y sont muables et indissociables des milieux dans lesquelles iels se déplient.

 

* Aurilian

Aurilian explore l’intimité et la vulnérabilité au travers de textes, d’installations, de performances, de dessins et de compositions sonores. Comme une boucle, une obsession, il dévoile une intimité profonde, une fébrilité sensible, et interroge le désir, l’amour, la vulnérabilité, la fragilité, ce qui se passe au fond du ventre. Un travail du souffle entre sincérité et mensonges, alternant suffocation, apnée, tension, relâchement, caresse. (Sissi Club).

 

* Lazare Lazarus

Je dessine des corps qui s’ouvrent comme des fenêtres sur des bouquets de garrigue brulante, sur des paysages solaires qui débordent sur le béton chaud.

Eaux-fortes, vêtements de garrigue, dessins à l'encre noire, herbiers, poèmes, films : je mêle des observations rigoureuses des mondes marseillais qui m'entourent à une approche plus intime sur la sexualité pédée.

Ainsi, je raconte le Mont Rose, le jardin du bois sacré, le Frioul, autant de promontoires arides depuis lesquels la ville déroule son ruban d’immeubles en chaleur, mais je parle aussi des iconographies des magazines pornos gay des années 1980/90, que  je glane aux archives «Mémoire des sexualités», pour faire grandir un monde botanique étrange, où les corps fleurissent et débordent, et se transforment en jardins luxuriants.


L'Hydre aux mille têtes
Jusqu'au 15/02 - Mar-sam 10h-19h
Entrée libre
https://www.facebook.com/Librairie.lhydre/
96 rue Saint-Savournin
13001 Marseille
04 91 81 55 15

Article paru le mercredi 9 fvrier 2022 dans Ventilo n° 458

Glory Garrigue à L’Hydre aux mille têtes

Nature peinture

 

Vous prenez-vous souvent à ressentir ce plaisir languissant qui vous anime lors d’une promenade au dehors, où les foules urbaines se raréfient, dans la nature peut-être ? Ce sont ces rapports entre désir et paysage que quatres artistes marseillais embrassent dans l’exposition Glory Garrigue présentée à la librairie L’Hydre aux mille têtes.

    À l’occasion de la présentation de son livre Écologies Déviantes, Cy Lecerf Maulpoix invitait l’artiste Lazare Lazarus à investir la librairie pour donner à voir des pratiques du paysage alternatives ; alternatives aux discours de plus en plus florissants de greenwashing (ou écoblanchiment), mais alternatives aussi et surtout aux normes et injonctions qui entravent parfois insidieusement nos désirs. À son tour, Lazare invitait trois artistes, habité.e.s chacun.e à leur manière par une relation désirante avec les paysages marseillais : Clovis Deschamps-Prince, Nelo Gevers et Aurilian. Plusieurs médiums sont ici à l’œuvre : dessins, peintures, cristaux, tentures teintes ou sculptures, faits d’autant de matériaux glanés sur les plateaux arides, comme les Créatures, vieilles palmes de palmiers, ou les ossements d’agaves que Lazare transforme en parures ; ou comme les Paquetons fruitons que Clovis et Nelo ont confectionnés avec des chutes textiles et des figues de barbarie, entre autres éléments. Les zones plus humides ne sont pas pour autant laissées dans l’ombre. Aurilian travaille avec l’eau salée et des cristaux qui peuvent se former ici et là, et ici, comme des moules à leurs rochers, de gros agrégats scintillants se sont arrimés à des câbles métalliques pour Bonding. Clovis façonne l’argile et peint avec les ocres qu’il prélève dans ses coins secrets. À découvrir d’ailleurs, la grande peinture réalisée avec Nelo sur la vitre du patio, qui se place — à point nommé — sur le fil entre intérieur et extérieur, intériorité et extériorité. Ce fil, c’est en fait aussi le corps. La relation avec les corps pourrait certes paraître évidente dans des discours du désir ! En effet, les quelques dessins offrent des corps figurés, comme dans Le Temps, silence, attention d’Aurilian qui fait danser ses personnages, ou avec les corps cagoulés de Lazare qui se caressent au centre de très fins détails végétaux et minéraux peuplant ses dessins. Mais dans ces œuvres, la relation au corps s’exprime aussi via les matières : le textile n’est-il pas la « vitre du patio » de l’humanité ? Notre barrière, à la fois intime et publique, entre le dedans et le dehors ? Et cette barrière, Clovis la pense également en modelant de la vaisselle d’argile. Il propose souvent à son public d’y boire et d’y manger, comme les personnes présentes pour l’inauguration ont été vernies d’en faire l’expérience ! La psychanalyse pourrait oblitérer : et d’une, une première pulsion sexuelle primaire assouvie. Vous l’aurez compris, l’exposition pense la notion de désir généreusement. Glory Garrigue, clin d’œil coquin au gloryhole et maline sublimation du paysage provencal, est aussi l’invitation des artistes à placer notre point de vue depuis d’autres perspectives, à explorer notre rapport au monde, notre désir du monde, à présenter notre intimité aux textures, aux formes, à des douces couleurs organiques et aux sensations que nous laisse notre univers parfois si insaisissable.  

Margot Dewavrin

 

Glory Garrigue : jusqu’au 15/02 à L’Hydre aux mille têtes (96 rue St Savournin, Marseille 1er).

Rens. : www.facebook.com/Librairie.lhydre/