Pour des siècles et des siècles 

Parcours visuel et sonore autour du sacré. Œuvres de Sourav Chatterjee, Gaëtan Parseihian, Mélissa Streicher, Annabel Schenck Chatterjee et Alberto Ruce

Dans les chapelles d’un ancien couvent, cinq artistes proposent un parcours d’art visuel et sonore en étroite relation avec ce lieu hors-norme et insolite.

L’ambition est d’aborder le thème du sacré, thématique qui coincide dans une immense proportion avec les démarches créatrices modernes et contemporaines.

Dans une société « désenchantée » où l’art ne semble plus à certains qu’objet de divertissement, lorsque la culture est médiatisée, économiquement évaluée, et finit souvent consommée comme un produit - alors que les artistes eux-mêmes rendent compte de ces phénomènes dans leur propres oeuvres et parfois y participent -, reste-t-il encore des traces du sacré dans la création artistique? Peut-on même les détecter en remontant jusqu’aux débuts de l’art moderne, lorsque se produisit la revendication de l’autonomie de l’artiste face aux systèmes de pensée et de pouvoir et, au premier chef, face à celui des Églises de toutes confessions ? Et en suivre les traces jusqu’aux développements les plus récents de l’art contemporain qui n’aurait donc pas perdu, n’en déplaise à certains, tout contact avec une spiritualité ? Telles sont en les synthétisant les questions qui ont présidé à l’essai visuel que constitue cette exposition.

L’intuition sur laquelle ce projet repose vient du constat que, dans une société sécularisée, l’art ne peut pas peur autant s’être vidé du sacre, ou de la spiritualité ; que d’une certaine manière et pris dans son sens métaphysique, le sacré reste partie intégrante de l’art. La démonstra- tion va plus loin elle suggère que le retrait du divin et la rupture du religieux ont amené une ère nouvelle dans le domaine de la creation. Dans le contexte de cette révolution intellectuelle, l’art moderne se constitue sur une relation industrialisée et non commandée par une croyance quasi obligée. L’art ne peut pas pour autant se passer d’un questionnement sur les fondements de l’être destin de l’individu, an- goisses existentielles, cycle de la vie et de la mort. Innombrables sont dès lors les oeuvres à examiner à travers ce prisme.

Depuis l’origine, la question de l’existence d’un au-dela de l’ordinaire du monde taraude l’humanité. Cette interrogation, des premiers signes tracés au flanc des cavernes aux envolées baroques, en passant par les splendeurs byzantines ou romanes, n’a cessé d’âge en âge de nourrir les expressions artistiques. Cette source féconde s’est-elle tarie au terme de ce long processus qu’il est convenu d’appeler le « désenchantement du monde » ? Telle est la question première abordée avec cette exposition qui suit le chemin emprunté par les artistes [...] pour rendre compte de la manière dont l’art de l’époque moderne et contemporaine continue de témoigner, par des voies nouvelles et souvent inattendues, du caractère irréductible d’une expérience de la singularité. Pour dire aussi comment, dans un monde d’où Dieu s’est retiré, l’art continue de tracer la voie d’une irrépréssible nécessité de l’élévation.

Ce faisant, c’est aussi à une quête qu’il nous est proposé de prendre part. La quête de l’homme moderne cherchant dans des cieux deve- nus profanes les réponses aux interrogations éternelles. L’histoire d’un lien défait. Entre l’homme et les dieux, entre l’homme et l’absolu, entre l’homme et les illusions prévisibles. Ces traces du sacré que l’exposition nous convie à suivre sont autant de pistes, d’essais, de questions, de cris et de silences qui portent au coeur des grandes interrogations de notre temps le questionnement singulier des artistes pour ouvrir au plus large public les chemins sensibles d’une compréhension plus intime des enjeux de notre époque.

Selon René Char, « seules les traces font réver ». Des traces que l’on guette non pas forcement les yeux levés au ciel, mais le regard ancré en soi, cette « sortie intérieure » où l’homme rejoint son humanité.

— Sources : Alain Seban et Alfred Pacquement, Traces du sacré, Paris, Éditions du Centre Pompidou


Le Couvent
Sam-dim 10h-19h + lun-ven sur RDV à asso.juxtapoz@gmail.com
2 € (adhésion au Couvent)
https://p-a-c.fr/le-festival
52 rue Levat
13003 Marseille