Bettina Rheims - Détenues

Photos

Encouragée par Robert Badinter, la photographe Bettina Rheims a réalisé entre septembre et novembre 2014 Détenues, une série de portraits de femmes incarcérées au sein de quatre établissements pénitentiaires français.

Ce projet, soutenu par l'administration pénitentiaire, confronte l'univers carcéral avec celui de la création artistique ; dans un dialogue complexe, il interroge la construction et la représentation de la féminité dans les espaces de privation de liberté et d'enfermement. De ces rencontres, volontaires, sont nés des portraits saisissants qui nous renvoient au regard que nous portons sur la détention.

La série Détenues offre une fenêtre de conversation avec l'univers sensible et peu connu de la détention. Ces femmes photographiées en prison, dans un studio improvisé, ont pu s'engager avec la photographe dans une démarche de reconstruction de leur identité féminine et amorcer un travail de restauration de leur image.

« Il me fallait aller à la rencontre de femmes qui n'avaient pas fait le choix de vivre entre quatre murs. Nous avons beaucoup parlé. Elles se sont racontées, et j'ai tenté de leur offrir un moment hors de ce temps-là ». 
Bettina Rheims, novembre 2016.


Tour-Panorama / Friche La Belle de Mai
Mer-ven 14h-19h + sam-dim 13h-19h
3/5 €
www.lafriche.org
41 rue Jobin
Friche La Belle de Mai
13003 Marseille
04 95 04 95 04

Article paru le mercredi 13 novembre 2019 dans Ventilo n° 437

Bettina Rheims – Détenues à la Tour Panorama

Potentiel intact

 

La Friche la Belle de Mai invite l’exposition Détenues de la photographe Bettina Rheims, dans le cadre de la thématique Prison Miroir proposée par Lieux Fictifs. L’occasion de découvrir des portraits à la beauté surprenante.

  Sur une proposition de Robert Badinter, Bettina Rheims photographie, en 2014, soixante femmes de quatre maisons d’arrêt, dont quarante sont exposées ici. Refusant de retranscrire l’atmosphère du milieu carcéral, elle utilise le même protocole que celui des célébrités. Deux assistants, un maquilleur et la reconstitution d’un studio dans une pièce de la prison. Le résultat est prenant, voire spectaculaire. La scénographie, identique à celle de la première exposition, où les photographies sont éclairées par des néons, offre un contraste et une chromatique proches de l’hyperréalisme. Dans son format et ses détails, le portrait devient un face à face avec une inconnue que l’on devine dans son intériorité, ses soucis, son devenir. Qu’a-t-elle fait, pourrions-nous être amis, y a-t-il un désir ? La moindre ride, le plus petit rictus participe à un espoir d’en savoir plus, car c’est bien la seule fois où nous verrons ces personnes. D’ailleurs, pourrions-nous les reconnaitre au détour d’une rue ? Rien n’est moins sûr. Dans la clarté des yeux, dans l’épi d’une mèche, à la recherche d’un tatouage, nous devenons étrangement curieux, alors que nous serions frappés d’indifférence devant un photomaton. Pourtant, rien n’est chorégraphié ni extravagant. Seule une conversation intime entre la photographe et son sujet nous laisse deviner un moment de relâchement où le corps s’affiche de la manière la plus simple, se déployant dans l’espace de l’image, par un coude qui s’égare, un menton qui se relève, une main dans les cheveux. Simples gestes féminins qui animent une identité et lui donnent une importance perdue. Détenues dégage une atmosphère proche de la neutralité, là où la dramaturgie est anéantie par le protocole de la mise en scène. Dans la contemplation et le confort du regard, on se prend à rêver à tous les possibles.  

Karim Grandi-Baupain

 

Bettina Rheims – Détenues : jusqu’au 23/02/2020 à la Tour Panorama (Friche La Belle de Mai, 41 rue Jobin, 3e).

Rens. : www.lafriche.org