Vasculum
Qu’est-ce qu’un paysage ? Peut-être, d’abord, et ensuite aussi, des mots. Nous voilà en Belgique, dans la province de Limburg, zone jadis minière, et les mots seront ceux de rapports d’expéditions menées entre 1865 et 1913 par un botaniste, qui nous déroulent ses transformations : telle colline, telle usine, leurs habitants. Un paysage malmené, alors que se devine, au loin, entre chien et loup, crépusculaire, une colline au seuil du visible. Des mots aux images et retour, voilà un autre voyage. (NF)
Double Reflection
« Est-ce un être humain ? ». De mystérieuses photographies apparaissent sur les murs du quartier de Ximen, à Taïpei. Une forme humanoïde et sombre. Il fait chaud comme en été, la foule est compacte comme à son habitude, difficile de deviner qu’il s’agit d’un soir de nouvel an. Le jeune réalisateur Wang Chun Hong signe un premier film aux allures de fiction épurée : d’abord captation d’un temps et d’une atmosphère urbaine, Double Reflection est progressivement contaminé par l’arrivée d’un corps que l’on va finir par suivre, fascinés par l’évidence d’une solitude promenée d’un parc ensoleillé jusqu’à une chambre vide dans la nuit. Il est photographe, peut-être. Mais qui ne photographie plus ou très peu. Subsiste la fascination pour le procédé photographique, cet oeil qui nous regarde. Au noir et blanc profond de l’image revient la tâche de souligner les quelques éléments qui le lient encore à son monde : la présence ou l’absence d’une femme, l’éblouissement d’un feu d’artifice… Au sein de cette cartographie sensible de Taïpei, une image froissée fait figure de passerelle vers le véritable langage de la ville : un système d’écho où le hasard a moins sa place que les symboles et un certain fatalisme. Alors, le personnage de Wang Chun Hong sait qu’il avance sur des rails ; un spectateur de sa propre vie conscient des étapes qu’il traverse et d’une douleur qu’il appelle autant qu’il la fuit. Double Reflection pose alors cette question : comment, enfin, changer d’angle ? (VP)
Emmanuel Vigne