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Tribune | Que la nuit demeure marseillaise

Les réponses de la part des multiples institutions face auxquelles nous défendons la nuit marseillaise sont courantes et récurrentes, et elles deviennent de plus en plus en plus difficiles à entendre sans sourciller. La vie nocturne de notre ville, et plus généralement la culture, aurait atteint un degré d’élévation remarquable à l’heure actuelle, après des années de développement intense. L’argument est en général suivi de ce bel exemple : « Regardez la Joliette, il s’y passe de belles choses, alors qu’il y a quelques années, pas du tout ! »
Ne nous y trompons pas, il n’y a aucun souci avec l’offre culturelle proposée par le renouveau d’un quartier qui abrite notamment les Terrasses du Port et son toit-terrasse. Elle remplit même une forte demande au vu des taux de fréquentation, offrant souvent une programmation de grande qualité (quoiqu’assez onéreuse) dans un cadre magnifique. Et il est également impossible de nier que sur ces dernières années, il y a eu des progrès significatifs dans de nombreux domaines, dont la culture.
Mais il s’agit également de ne pas perdre de vue un point essentiel. Ce qui rend Marseille, et donc sa vie nocturne, si particulière est sa singularité. De tous les clichés de chez nous, c’est le plus vrai : ici, on ne fait rien comme ailleurs. Il est fondamental, non pas de préserver l’idée un peu mythologique d’une ville à part, mais de capitaliser sur les choses qui nous appartiennent et que nous savons mieux faire qu’ailleurs. Car il y a des choses que nous faisons mieux qu’ailleurs, du sud au nord de la ville, notamment grâce à un réseau de petits lieux aux engagements forts, animés d’une énergie et d’une rage de vivre impressionnantes malgré un abandon chaque année plus explicite de la part des institutions. Pourtant, ce sont bien les petits lieux qui constituent à Marseille la densité du tissu culturel que nous avons cet été l’occasion de montrer à l’Europe entière, à l’occasion d’une compétition sportive qui placera les projecteurs sur notre ville.
En une phrase, si le succès relatif des opérations de la Joliette est loin d’être illégitime, il ne s’agirait pas d’oublier que quelques centaines de mètres plus loin, un lieu emblématique comme le Dock des Suds a un avenir incertain.
Et il nous semble, à La Nuit Magazine, que l’originalité marseillaise n’est pas ce qui saute le plus aux yeux dans l’offre nocturne de ce quartier trop souvent porté en exemple du futur.

Iliès Hagoug (La Nuit Magazine)