Du piment dans les yeux par la Cie AnteprimA

Du piment dans les yeux par la compagnie AnteprimA au Théâtre du Merlan

Piqué au vif

 

Artiste de la Bande du Merlan, Antonella Amirante vient y évoquer l’exil dans un spectacle au sujet fort et au titre prometteur : Du piment dans les yeux.

 

Du piment dans les yeux comme geste de punition des enfants, souvenir personnel du personnage inspirateur de la pièce, Momo. Du piment comme l’énergie de cet adolescent qui a parcouru plus de 7 000 kilomètres depuis la Côte d’Ivoire jusqu’à la France afin de connaitre les joies des études. Du piment aussi comme symbole du rituel du passage à l’âge adulte dans les civilisations andines, donc comme illustration du franchissement des frontières, qu’elles soient géographiques ou psychologiques.
En portant l’histoire de Momo à la scène, il s’agissait avant tout pour Antonella Amirante, directrice de la compagnie Anteprima, de s’axer sur la portée enrichissante d’une telle entreprise et de ses possibilités de rencontres.
A l’origine du projet, Olivier Favier, journaliste, rencontre Mohammed lors de son arrivée en France. Olivier soumet le projet à Antonella, qui à son tour le propose à Simon Grangeat, écrivain de théâtre. Ce dernier ne rencontrera pas Momo dans un souci d’objectivité, mais intégrera les témoignages de l’histoire de ce dernier dans son processus d’écriture. Il ajoutera deux conteurs et Inaya, qui en fuyant la guerre, croisera le destin du futur étudiant. « Je souhaite faire de ces deux jeunes gens non pas les victimes de notre monde, mais les héros de leur histoire », résumera Simon dans sa note d’intention. Pas d’exil, pas de voyage sans mouvement. Seulement, comment le matérialiser sur scène ? C’est là qu’intervient Mickaël Phelippeau, chorégraphe et également artiste de la Bande du Merlan, qui intégrera des éléments constitutifs de la danse dans la mise en scène, ajoutant par ce biais une nécessaire dose de poésie, teintée d’insouciance mais aussi de détermination. Face à la richesse de ces écritures, la scénographie se fait minimale et se pare de jerricans, objets-transferts de tous les autres, car unique chose que les migrants peuvent emporter lors de leurs déplacements périlleux.
Sorte de voyage initiatique, Du piment dans les yeux, s’il nous questionne sur les enjeux de l’exil de manière symbolique, déborde largement des contours du théâtre et en brouille les frontières. Antonella prend le parti de consulter régulièrement ses collaborateurs mais aussi Mohamed, qui s’intègre dans le processus de création jusqu’à jouer son propre rôle. Elle développe aussi des bords de scènes multidisciplinaires, notamment par le biais d’une lecture mise en espace avec les élèves du conservatoire d’après les textes de Philippe Claudel et d’Erri de Luca. Autre projet : Une bouteille à la mer, une sortie de scène des artistes du spectacle avec un groupe d’adolescents primo-arrivants. Ateliers d’écriture et observation d’expositions déboucheront en fin de cycle sur une installation sonore et plastique dans les quartiers de Lyon, nouveau reflet d’une rencontre, non pas entre deux personnes mais avec un pays d’accueil, la France.

Laura Legeay

 

Du piment dans les yeux par la Cie AnteprimA : les 8 et 9/12 au Théâtre du Merlan (Avenue Raimu, 14e).
Rens. : 04 91 11 19 20 / www.merlan.org

Pour en (sa)voir plus : www.cie-anteprima.com