L’Interview : Océanerosemarie

L’Interview : Océanerosemarie

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La dernière fois qu’on l’a vue à Marseille, elle partageait l’affiche avec sa copine Anaïs sous le pseudo d’Oshen. La revoici, sans sa guitare mais avec un nouveau sobriquet, pour un one woman show dans lequel elle raconte – plus ou moins – sa vie de lesbienne invisible

On t’a connue chanteuse à Marseille, on te retrouve humoriste à Paris. Que s’est-il passé entre temps ?
Je me suis inscrite à un stage de coaching personnel animé par des Américains au Palais des Congrès de Maubeuge (les Yes Men à Maubeuge Workshop, tu connais ?). Puis j’ai eu une petite phase raelienne, mais je suis partie parce que je n’aimais pas la nourriture à base de saucisses, et j’ai ensuite fait la rencontre astrale de Judith Butler. Ceci expliquant cela.

Pourquoi un one woman show ?
Au début, je voulais faire une grande création musicale et théâtrale avec cinquante musiciens et cent comédiens sur scène. Ensuite, j’ai fait le budget. A la fin, il ne restait que moi ; je me suis fait une fleur, j’ai accepté de bosser gratos.

Quelle est la part d’autobiographie dans le spectacle ? A quel point forces-tu le trait ?
Tout est vrai évidemment, à part quand je dis que je me suis inscrite dans un club de foot. En vrai, je faisais du cheval, mais je trouvais ça trop « segmentant » pour le grand public lesbien.

Tu déclares avoir « d’abord été invisible à [tes] yeux ». Qu’est-ce que cela signifie ?
Ça veut dire que, comme beaucoup de lesbiennes à travers le monde (dont une forte concentration à Paris intra muros), j’étais inconsciemment homophobe et donc je refusais de voir la réalité en face : ma préférence illimitée des kikis sur les zizis.

As-tu des modèles ou des références en matière d’humour ? Te sens-tu proche de certains humoristes ?
Le spectacle de Julie Ferrier a été un choc, un déclencheur, mais c’est déjà vieux. Aujourd’hui, j’ai peu d’affinités avec le travail des autres qui, en général, veulent faire rire et sont prêts à aborder n’importe quel sujet pour y parvenir, alors que moi je voulais parler des lesbiennes avant tout. Mais j’aime Audrey Vernon et son Comment épouser un millionnaire, ovni total avec une vraie pensée politique et féministe en filigrane, et Joséphine Ose de Joséphine Draï, hétéro hystéro cinglée comme il faut. Ah et les vidéos de Solange, complètement UFO aussi !

Quelles sont tes références d’une manière générale ?
Récemment, la série Girls, mais avant ça 30 Rocks, les frères Farrelly et Haneke, en particulier Amour que j’ai découvert à Cannes – sorry, babe, n’est pas VIP qui veut ! En littérature, gros choc à la lecture de Céline Minard (et son dernier So long, Luise). En musique, j’écoute surtout du Carlos (deuxième période) et du Montagné (surtout quand il conduit des 4X4), et il faut avouer que la reprise de Cabrel par Shakira est vraiment bien. Plus récemment, et en vrai, le dernier M.I.A., surtout pour le clip, et le single de Barbara Carlotti (L’Amour, l’argent, le vent) parce que moi aussi, j’étais à Rio en janvier et que c’était pas toujours la fête.

N’as-tu pas peur d’être taxée d’humoriste communautaire ?
Non, et d’ailleurs si c’est le cas, ça ne me pose aucun problème. Quand on est drôle, on est drôle, et comme le disait Mylène Farmer à l’époque où elle donnait encore des interviews : « L’humour n’a pas de frontières. » Ou « l’amour » ?… Je ne sais plus… Ah, quoique, c’était peut être « le Darfour »…

As-tu un nouveau spectacle en vue ? Le cas échéant, de quoi sera-t-il fait ? Ne seras-tu pas obligée de changer de registre ?
D’abord j’écris un film. C’est un peu la suite des aventures d’Océanerosemarie, où l’on retrouvera des personnages du spectacle, mais joués par de vrais acteurs. J’écris aussi une comédie musicale avec quatre personnes sur scène, parce que grâce à mon succès (ndlr : la représentation à Marseille sera la 456e !), j’ai des moyens de ouf. Mais je ne garantis pas de payer les autres comédiens par contre.

Quelle(s) question(s) aimerais-tu qu’on te pose ?
Est-ce que le spectacle ne s’adresse qu’aux lesbiennes ? Absolument pas ! C’est pour tout le monde à partir de treize ans, post bar/bat mitzvah ou première communion.
Est-ce plus dur d’être lesbienne qu’hétérosexuelle ? Oui, mais c’est aussi un cadeau du ciel, parce que ça m’a donné un destin unique. Ma faiblesse est ma force, comme disait Bruce Lee.
Veux-tu dire que les homosexuels sont supérieurs aux hétérosexuels ? Cela va de soi.

Propos recueillis par Cynthia Cucchi
Photo : Vale?rie Archeno

Océanerosemarie, la lesbienne invisible : le 2/06 à l’Espace Julien (39 cours Julien, 6e).
Rens. 04 91 24 34 10 / www.espace-julien.com / www.lalesbienneinvisible.com