Jose James

! Annulé ! José James + Mr Oat > le 21 à l’Espace Julien

Son registre vocal est trempé dans le meilleur des musiques afro-américaines, ne dédaignant pas les aigus, comme un rappel des pieds de nez que les meilleurs chanteurs black pouvaient adresser à la norme « blanche » d’un chant viril. On sait son appétence pour la soul la plus exigeante, entre Sam Cooke et Marvin Gaye, dont le plaisir de chanter emportait l’adhésion d’un public en quête de sens. Gageons qu’avec un dispositif musical dépouillé (deux musiciens sur scène, lui-même au chant, à la guitare et aux machines, et un batteur dj), cet artisan nu soul saura risquer sa voix dans les tréfonds de nos corps et de nos esprits, avec cette fragilité feinte et assumée. Nu soul ? C’est ce que donnerait à penser l’écoute de son dernier album, douceur R&B intitulée Love in a time of Madness. On se doute qu’il n’est pas un ravi cependant : l’amour qu’il prône est bien cette identification des différences, comme définie par le philosophe marxiste Alain Badiou. Car José James est (aussi) un pur jazzman, un cat comme on n’en fait plus. On le savait depuis son premier album : sa voix s’accorde aux notes bleues avec une grâce et une efficacité sans pareille. Ainsi de son hommage à Coltrane, où il retrouve la spiritualité du Souffleur Suprême, ou bien encore de son album de versions des thèmes les plus représentatifs du répertoire de Billie Holiday – aux côtés, entre autres, de l’immense pianiste Jason Moran, il renoue avec ce sublime décalage qui était l’apanage de Lady Day. On le sait proche des nouvelles créations afro-américaines que certains tenants de l’ordre et de la société du spectacle identifient trop rapidement à une nouvelle Harlem Renaissance, ce mouvement intellectuel et artistique total d’émancipation des années vingt new-yorkaises. Ces cuistres gentrificateurs ne devraient pas oublier que ce mouvement avait une ramification phocéenne en la personne de Claude Mc Kay, le sublime poète et romancier progressiste qui n’en aimait pas moins la fange et qui conta les prémisses du jazz à Marseille dans Banjo. José James, par des créations résolument populaires mais exigeantes, inscrit ses passages dans la cité comme autant d’actes créatifs résonnant avec l’esprit et la lettre de son illustre prédécesseur. On se doute qu’entre Marseille et lui, c’est plus qu’une histoire d’amour.

LD

 

www.josejamesmusic.com / www.criduport.fr/