Shabaka and The Ancestors © Leeroy Jason

Les festivals de jazz 2017

Summertime-en-Provence

 

Profusion de propositions jazz en terre provençale : comment se repérer dans le maquis des manifestations se revendiquant des notes bleues ?

 

Dès l’entame des vacances scolaires, si Vitrolles fait figure de must, le festival Jazz à Porquerolles offre la possibilité d’une île, nanti d’une programmation certes similaire mais toujours ambitieuse, entre figures tutélaires (le pianiste sénégalais Cheick Tidiane Seck y vivra l’acmé d’une tournée provençale aux côtés du vénérable Archie Shepp, parrain d’un festival militant) et soutien aux jeunes espoirs régionaux, voire internationaux. D’aucuns pourront goûter à l’ambiance villageoise de Jazz en Sol Mineur à Gréasque : le quintet de Andréa Caparros viendra notamment y confirmer sa version d’un jazz aux accents brésiliens, résolument populaire.

À Avignon, l’Association pour le Jazz et les Musiques Improvisées aligne plus que jamais une programmation décalée, loin des têtes d’affiche, avec des ambitions créatives sans ignorer un esprit de fête permanente. Entre des duos méditatifs (la saxophoniste Audrey Lauro et le contrebassiste Guillaume Séguron pour « la bande originale d’un film jamais réalisé ») et des formations d’improvisateurs déjantés (Big Four, notamment), le festival Têtes de Jazz s’impose comme le rendez-vous immanquable pour tout jazzfan perdu dans la foule qui envahit chaque été la Cité des Papes.

On pourrait aller au Nice Jazz Festival : espérons qu’un plateau comme Woman to Woman (alignant notamment Cecile McLorin Salvant, l’égérie du jazz vocal le plus swing, aux côtés de la clarinettiste Anat Cohen, grande pourvoyeuse de volutes bleutées) offrira un instant de répit dans les commémorations de la tragédie disruptive de l’été 2016… Quant aux voisins de Juan-Les-Pins, on souhaiterait qu’une soirée comme celle qui aligne Gregory Porter avec Shabaka and The Ancestors et Archie Shepp se termine en énorme bœuf. Pour autant, dépassera-t-on Toulon ? Le seul festival de jazz entièrement gratuit dans la région aligne notamment le quintet bebop du trompettiste Roy Hargrove, possédé par le feu sacré. On se régalera des artistes locaux à Brignoles (le Florence Tru Hong trio avec Eric Le Cardinal à la contrebasse et Chistian Bon à la guitare, la trop rare Virginie Teychéné) sans oublier de se rendre éventuellement à La Londe-Les-Maures écouter le trompettiste Nicolas Folmer aligner des blue notes face à la Grande Bleue. Devra-t-on rester sur la côte pour profiter de la programmation de Ramatuelle ? La figure tutélaire de l’un des derniers boppers français, le pianiste René Urtreger, donne le La d’une édition qui convie notamment la somptueuse et trop rare diva Lou Tavano, avec son jazz suave aux couleurs slaves. On précisera que les festivals varois susmentionnés sont engagés dans une démarche aux couleurs des vins locaux, révélant ainsi une diversité gustative au bénéfice de la qualité auditive (et inversement).

Gageons que les valeurs de fraternité universelle associées au jazz sauront perturber les tendances fascisantes qui, trop souvent, entachent notre belle Provence, a fortiori si elles sont associées à la dive bouteille…

 

Laurent Dussutour