Se sentir vivant de Yasmine Hugonnet © Anne-Laure Lechat

Festival ActOral

À l’origine

 

ActOral attaque sa dix-septième édition avec toujours plus d’envie et de reconnaissance. La nomination d’Éric Mangion (ancien directeur du FRAC PACA) à la présidence de cette édition est le signe d’une transversalité affirmée entre l’art contemporain et le théâtre, même si les frontières ont été abolies depuis longtemps.

 

Depuis 2013, ActOral est devenu un point de rencontre incontournable de la création contemporaine. L’ampleur du nombre de représentations (soixante) et de lieux (dix-sept) a poussé le réseau marseillais à mutualiser ses moyens pour écrire d’une seule voix l’avenir de la scène. Plus que jamais, les artistes d’aujourd’hui refusent le cloisonnement et les préjugés pour mieux entrer de plain-pied dans une représentation du corps qui sait déclamer à voix basse et bouger à voix haute, tout en recherchant un avenir commun avec la dématérialisation du numérique. Ce qu’il y a de formidable dans le théâtre, c’est que les formes changent, mais le fond des choses nous interpelle de la même manière. Le carnet de note reste intime, l’amour nous déstabilise et la guerre nous violente et nous fascine dans un même instant. Comment on se raconte et comment on le raconte aux autres ? Le silence a-t-il des choses à nous dire ? La question de la représentation est une éternelle question sur l’existence et plus l’homme progresse dans son individualité, plus il développe le storytelling. L’avenir du théâtre, c’est une mise en exergue de l’être et de son émancipation. Le héros ne se dresse plus au-dessus des barricades dans une représentation muséale qui valide l’histoire officielle. Le protagoniste devient un petit homme, une chose fragile qui utilise la multiplicité des médias pour crier ses peines et ses joies. Il zoome sur le particulier pour redéfinir l’original, il se sert des interstices pour agrandir de ses bras de nouveaux paysages. Là où jadis, le groupe s’éprenait d’avancer dans un même tempo, la dissonance et la dislocation ont pris le dessus dans un éclatement des sentiments qui organise un joyeux désordre. La frontière entre le parler et le déclamer s’estompe, la chorégraphie joue avec l’erreur spontanée. Tout devient incertain pour rendre tangible l’idée d’un avenir à construire. Le théâtre est un monde de questions qui redessine le synopsis de la mondialisation.

 

Karim Grandi-Baupain

 

Festival ActOral : du 26/09 au 14/10 à Marseille.
Rens. : 04 91 37 30 27 / www.actoral.org

Le programme complet du festival ActOral ici

 

 

— Les immanquables du festival —

 

Mercurial George de Dana Michel

© Jocelyn Michel

Performance étonnante et dérangeante, Mercurial George offre un aperçu de l’univers foisonnant et désarçonnant de Dana Michel. Dans la lignée de Yellow Towel, l’artiste questionne l’identité noire et les héritages culturels à travers un objet singulier, à la croisée de la danse contemporaine, de l’art et de la comédie. En clown claudiquant, la Canadienne explore la scène et expérimente avec les matériaux débris qui la parsèment (morceaux de gingembre, trompette, théière, micros, sac de toile noirs…), jouant sur le trouble pour créer des images éphémères, drôles et perturbantes.

BC

> les 27 & 28/09 au Théâtre des Bernardines (17 boulevard Garibaldi, 1er).
Rens. : 08 2013 2013 / www.lestheatres.net

 

 

These Are My Principles… If you don’t like them I have others de Phil Hayes

© Niklaus Spoerri

Les principes, en avons-nous encore et quelle est leur importance ? Comment choisissons-nous ou évitons-nous de faire des choix ? Avoir des lignes claires, un héritage idéologique, ne pas faire les choses uniquement pour l’argent, ne rend-t-il pas moralisateur tout en donnant un sentiment de supériorité ? Quelqu’un qui nous semble opportuniste a peut-être tout simplement d’autres principes que les nôtres… Et que sommes-nous prêts à faire pour le confort et la sécurité de notre famille ? Parfois un conflit intérieur n’est-il pas juste une question d’ego ? Dans un ping-pong de langage tendance Groucho Marx, Phil Hays et Nada Gambier se glissent dans l’espace disjoint de nos attentes et interrogent avec malice comment nos choix varient, finissant par nous faire douter de ce que nous pensons et de ce que nous sommes.

OP

> Les 30/09 & 1/10 au Mucem (7 promenade Robert Laffont, 2e).
Rens. : 04 84 35 13 13 / www.mucem.org

 

Se sentir vivant de Yasmine Hugonnet

© Anne-Laure Lechat

C’est une danse radicale, silencieuse, immobile et fascinante où se côtoient l’humour, la générosité et la virtuosité pour explorer de manière concrète les stratégies et rituels d’une femme visant à entrer en contact avec elle et parler de ce qui nous anime. La séparation et le lien ; séparation de la vie, de la mort, de l’amour, de sa propre image, de sa substance. Sa parole est immobile, les lèvres sont closes, l’air traverse le corps et les mots pour devenir audible, mais cette voix est totalement dissociée du geste, elle est prise dans sa physicalité pour dériver entre les multiples couches des discours qui traversent. Yasmine Hugonnet déploie son travail de dissection du langage incarné, utilisant avec rigueur et talent les limites du corps pour représenter le flux de la vie dans ses différentes intensités, mettant en jeu les éléments avec lesquels nous communiquons : le visage, le geste, la voix.

OP

> Le 4/10 au Théâtre des Bernardines (17 boulevard Garibaldi, 1er).
Rens. : 08 2013 2013 / www.lestheatres.net

 

Ergonomics de Rocio Berenguer et Marja Christians

© Pulso

Conférence scientifique de Rocio Berenguer et Marja Christians, Ergonomics s’intéresse aux possibilités d’adaptations de nos corps à l’espace et au mobilier urbains du futur, de concert avec les innovations technologiques. Une fiction chorégraphique à la vision transhumaniste soulevant des questionnements sur l’évolution des êtres humains à l’ère de la domotique et de l’intelligence artificielle.

BC

> Les 9 & 10/10 à la Scène 44 (Pôle Média de la Belle de Mai – 37 rue Guibal, 3e).
Rens. : www.nncorsino.com/fr

 

 

 

Rêve et Folie de Claude Régy

© Pascal Victor

Après avoir monté Marguerite Duras, Peter Handke, Edward Bond ou encore Sarah Kane, le maître Claude Régy choisit l’écriture cryptique et exigeante de Georg Trakl pour ce qu’il a annoncé comme étant sa dernière pièce. Œuvre occulte et incandescente, Rêve et Folie opère une lente et agonisante descente dans les tréfonds de la psyché tortuée du poète, dont la vie transgressive, en proie à la culpabilité et au déchirement intérieur, s’arrêta brusquement à 27 ans. Yann Boudaud est un violon qui pleure les mots de Trakl dans une scénographie crépusculaire et hypnotique, d’une éclatante obscurité.

BC

> Du 10 au 14/10 au Théâtre Joliette-Minoterie (Place Henri Verneuil, 2e).
Rens. : www.theatrejoliette.fr

 

Pour de Daina Ashbee

© Alejandro Jimenez

Dans Pour, Daina Ashbee sonde l’effet que les règles produisent sur son corps physique et émotionnel. La danseuse Paige Culley exhale force et pureté dans ce solo exigeant et intime. La chorégraphie brute et intense magnifie sa vulnérabilité consentie et transforme la douleur en énergie par le mouvement et la performance. Une pièce sombre avec une distance joyeuse et libératrice.

BC

> Les 12 & 13/10 à la Friche La Belle de Mai (41 rue Jobin, 3e).
Rens. : hwww.lafriche.org

 

 

 

Oblivion de Sarah Vanhee

© philedeprez

Oubli, inconscience, tel est le sens du mot « oblivion ». Sarah Vanhee invite le spectateur à une lente célébration des choses bannies, à un processus d’intimité retrouvée avec des déchets matériels et digitaux, à une réévaluation des scories du quotidien. Durant près de trois heures, elle se reconnecte à tout ce dont elle s’est débarrassée pendant une année de vie et de travail et qui se trouve là, autour d’elle sur le plateau. Elle crée un environnement foisonnant où naissance et mort se côtoient tel un système écologique, une critique de l’idéologie du jetable, tout en accompagnant ses gestes d’un discours jouant sur la détérioration du langage. Il y a des niveaux, différentes formes d’organisation qui émergent plus ou moins clairement de cette jungle, dessinant un voyage sursaturé à travers un certain « parti pris des choses » ; une tentative de renouveler notre perception du monde.

OP

> Les 13 & 14/10 à Montévidéo (3 impasse Montévidéo, 6e).
Rens. : 04 91 37 97 35 / www.montevideo-marseille.com