When the Ventriloquist Came and Spoke to Me de Ahmad Ghossein © DR

Beyrouth Ya Beyrouth au MuCEM

Tout proche Orient

 

Transporter Beyrouth à Marseille, c’est le pari que relève le MuCEM via le temps fort « Beyrouth Ya Beyrouth ». De rencontres littéraires en installations, projections, performances et concerts, la programmation s’articule autour de trois mots-clés : mémoires, guerres et représentations.

 

« La guerre affleure toujours au Liban », explique Thierry Fabre, en charge de la programmation artistique du MuCEM. La guerre du passé (de 1975 à 1990 notamment, qui a laissé de profondes séquelles) et celle du présent : le pays semble aujourd’hui bloqué entre son histoire et les réfugiés syriens à ses portes… Entre mémoire et oubli, les artistes libanais veulent pourtant insuffler une nouvelle énergie à leur capitale. Les installations au Fort Saint-Jean et au J4 vont dans ce sens : une plongée visuelle et sonore dans le Beyrouth d’aujourd’hui, entre poésie, urbanisme galopant et renouveau perpétuel.
Le choix d’ouvrir sur deux jours consacrés à Jean Genet n’est donc pas anodin. Présent à Beyrouth en 1982, il témoigne du massacre de Sabra et Chatila. D’où Quatre heures à Chatila, premier texte après plusieurs années de silence. Un texte lu par la comédienne Maria Micla, puis débattu avec Leila Shahid (ancienne ambassadrice de la Palestine auprès de l’Union Européenne) et Albert Dichy (spécialiste de l’écrivain). Silence, et renaissance : à l’image de Beyrouth aujourd’hui ? Entre amour et haine, la relation à la ville est compliquée… mais passionnelle, explique Thierry Fabre : « On ne peut pas avoir de relation sereine à Beyrouth. La ville est chaotique, et pourtant, il y a une énorme énergie de vivre et de créer. » Une ville multiple et multiforme, dont le MuCEM se veut le reflet le temps de deux mois. Il privilégie les scènes urbaines, propose « un fragment, ou des fragments pour découvrir des choses nouvelles. » Et, bien souvent, le pont est lancé entre un passé idéalisé et un présent qui se refuse au passéisme ; c’est le cas de la chanteuse Rima Khchreich, qui réinterprète le répertoire traditionnel libanais en lui insufflant des rythmiques jazz. Sans omettre un focus sur les femmes cinéastes : en parallèle d’une table ronde, plusieurs films seront projetés, parmi lesquels Civilisées de Randa Chahal Sabbag, censuré au Liban. La soirée de clôture se fera quant à elle en musique, en présence de Gurumiran et du joueur de oud Rabih Abou-Khalil, pour faire vivre les traditions au présent. Un bel équilibre, entre mémoire et transmission.

Léa Soula

 

Beyrouth Ya Beyrouth : du 4/05 au 26/06 au MuCEM (Quai du Port, Esplanade du J4, 2e).
Rens. : 04 84 35 13 13 / www.mucem.org

Le programme complet du temps fort « Beyrouth Ya Beyrouth » ici