Black Films Matter (V.O.)

Cycle consacré aux films afro-américains

Alors qu’aujourd’hui encore, aux États-Unis, les afro-américains doivent plus que jamais réaffirmer leurs droits au cri de « Black lives matter ! », l’Institut de l’image propose de se pencher sur la culture des minorités noires à travers une histoire du cinéma noir. Comment le cinéma a-t-il pu lutter contre les clichés racistes, ou colonialistes (Daïnah) ? Comment les grandes figures qui ont œuvré pour la cause des Noirs (James Baldwin, Billie Holiday, Sidney Poitier) ont-elles changé le visage de l’Amérique et comment les représentations ont-elles évolué dans le cinéma, notamment grâce aux cinéastes afro-américains (Charles Burnett, Spike Lee, John Singleton) ? Mais nous évoquerons également la figure de Sembène Ousmane et son lien à la France et proposerons une escapade en Grande-Bretagne du côté du mouvement rasta et de la musique reggae (Babylon).
Cette programmation tentera d’aborder ces questions éthiques et esthétiques, historiques et politiques, à travers les films présentés et les débats avec des spécialistes de l’histoire du cinéma noir (Adrienne Boutang, Régis Dubois) ou du jazz (Raphaël Imbert, Frank Cassenti) et d’une réalisatrice de documentaire avec Becoming Black

Institut de l'Image - Cinéma de la Manufacture
Du 3 octobre au 27 octobre 2020
4/8 €
Rens. 04 42 26 81 82
www.institut-image.org
Cité du Livre - 8 rue des allumettes
13100 Aix-en-Provence
04 42 26 81 82

Article paru le mercredi 30 septembre 2020 dans Ventilo n° 445

Black Films Matter à l’Institut de l’Image

Black-out sur Hollywood

 

Le cycle d’octobre de l’Institut de l’Image à Aix-en-Provence met en lumière, à l’aune des mouvements afro-américains actuels, la question des représentations noires dans le cinéma hollywoodien, avec un chapelet de films à (re)découvrir sans hésitation !

    Le cinéma se faisant bien souvent – sauf exceptions – le reflet d’une société et de ses évolutions, il est toujours saisissant de pointer la place accordée aux Afro-Américains dans l’histoire cinématographique outre-Atlantique, à l’heure où les revendications plus que légitimes aux cris de Black Lives Matter secouent les sociétés occidentales, venant nous rappeler que nous sommes loin d’en avoir terminé avec le racisme endémique dont est victime tout être différencié par sa couleur de peau. D.W. Griffith avait planté ce sombre décor en 1915, avec un Naissance d’une nation terrifiant, adapté du livre de Thomas Dixon, à la gloire du Ku Klux Klan. Jusqu’aux années 50, la représentation de la communauté noire dans le cinéma américain — à l’image des lois ségrégationnistes en œuvre dans le pays — se limitera soit à une quasi absence, soit à l’utilisation d’acteurs blancs maquillés, soit aux rôles stéréotypés de serviteurs, musiciens ou danseurs. Jusqu’au Code Hays qui interdira l’évocation d’amours interraciales. Cette représentation connaîtra ses premières transformations avec l’essor des combats afro-américains contre les lois ségrégationnistes. C’est dire, dans le contexte actuel, comme la rétrospective consacrée ce mois-ci par l’Institut de l’Image se révèle tout à fait passionnante ! « Black Films Matter » revient sur les pages cinématographiques principales qui ont bouleversé le visage de l’Amérique, et œuvré pour la cause des Afro-Américains. À commencer par le classique de Stanley Kramer, Devine qui vient dîner…, porté par Sidney Poitier, premier acteur noir vraiment reconnu à Hollywood, qui mettra un point (presque) final aux règlements abjects du Code Hays. Un film dont on ne prend pas toujours bien conscience de la portée qu’il eut en 1967. Mais l’acmé sera atteinte lorsque surviendra, soudainement, en 1971, un courant cinématographique qui résonne encore de nos jours, la Blaxploitation (dont Quentin Tarantino nous livrera une copie conforme avec Jackie Brown). En quatre ou cinq ans, et une poignée de films, ce mouvement, considéré longtemps comme un sous-genre nanardesque, affirma sa volonté commerciale destinée à un public noir. Avec ses codes, et ses noms restés dans les mémoires, l’actrice Pam Grier et le cinéaste Melvin Van Peebles en tête. Un courant dont la partie musicale fut également sous-estimée avec, en l’occurrence, l’émergence du hip-hop. Ce cycle lui rend hommage, avec l’excellent Coffy, la panthère noire de Harlem de Jack Hill, que viendra présenter l’éminent auteur et réalisateur Régis Dubois, spécialiste du sujet, consécutivement à la projection de son documentaire À l'ombre d'Hollywood : le cinéma noir indépendant (1910-1950). Une part du cycle est ensuite consacrée aux cinéastes et œuvres ultérieures qui continuent jusqu’à nos jours à permettre une présence plus importante des noirs à l’écran, films imprégnés d’un engagement salvateur, à l’instar de l’extraordinaire Killer of sheep de Charles Burnett, Do the Right Thing de l’incontournable Spike Lee, I am not your negro de Raoul Peck (séance présentée par Jake Lamar), Get out de Jordan Peele (présenté par Adrienne Boutang), le très beau Queen & Slim de Melina Matsoukas ou l’actuel Billie de James Erskine, qui sort ce mois-ci en salle. Enfin, l’équipe de la salle aixoise se permet à l’occasion de ce cycle quelques chemins de traverse, avec l’évocation de la figure de Sembene Ousmane, ou les séances de Babylon de Franco Rosso, documentaire passionnant sur la scène musicale anglaise totalement imprégnée de culture noire.  

Emmanuel Vigne

 

Black Films Matter : du 3 au 27/10 à l’Institut de l’Image (Salle Armand Lunel – Cité du Livre, Aix-en-Provence).

Rens. : 04 42 26 81 82 / www.institut-image.org

Le programme complet du cycle Black Films Matter ici