Arles 2023, Les Rencontres de la Photographie

54e édition du prestigieux festival de la photographie, sur le thème "Un état de conscience". Plus d'une quarantaine d'expositions (et projections) dans toute la ville : Agnès Varda, Wim Wenders, Nicole Gravier, Hannah Darabi, Zofia Zulik, Saul Leiter, Yohanne Lamoulère, Eric Tabuchi, Nelly Monnier, Jean-Marie Donat, Emma Sarpaniemi...

Tel un relevé sismographique de notre temps, chaque année les Rencontres d’Arles se font l’écho de l’état de conscience de notre monde, aussi étrange qu’il puisse paraître. Les photographes, artistes et commissaires nous donnent à voir, à percevoir, avec une acuité aiguisée, les transformations que nous vivons. La prise en considération – a minima – du réchauffement climatique s’est imposée à nous, impactant directement nos habitudes.

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Arles
Du 3 juillet au 24 septembre 2023
0/4,50/15 €. Forfait toutes expos : 0/42 €. Forfait Journée : 0/34 €
https://www.rencontres-arles.com/
13200 Arles

Article paru le jeudi 29 juin 2023 dans Ventilo n° 485

Arles 2023 - Les Rencontres de la Photographie

La photo s'écoule

 

Pour l’édition 2023 des Rencontres Photographiques d’Arles, la recette reste inchangée : une multitude de lieux, des pionniers de la photo, des artistes émergents et des thématiques fortes. Parmi la foultitude, focus sur deux expositions : Les Enfants du fleuve de Yohanne Lamoulère au Jardin d’été, et 50 ans, dans l’œil de Libé à l’Abbaye de Montmajour.

    À Marseille, on ne présente plus la locale Yohanne Lamoulère, tant son travail résonne chez chacun d’entre nous, à travers une couverture de livre, une affiche ou un article de presse. Pendant des années, elle a travaillé sur la jeunesse en périphérie marseillaise, lui rendant hommage par la vitalité de ses clichés. Pour la première fois dans la sélection des Rencontres d’Arles, c’est un retour aux sources pour celle qui fut diplômée de l’École nationale supérieure de la photographie en 2004, dans cette ville qu’elle a tant vu évoluer depuis presque vingt ans. Pour son projet Les Enfants du fleuve, elle a travaillé sur l’insularité au large de Port-Saint-Louis-du-Rhône, avant d’en faire son point de départ pour remonter le Rhône, donc, et ce sur une embarcation qui ne ressemblerait à aucune autre. C’est avec une coque de caravane montée sur une péniche à l’abandon que se fait le premier tronçon jusqu’à Lyon, puis c’est un combo canot-mobylette qui assure le trajet jusqu’à Genève. Le glacier où il prend sa source sera atteint en voiture. En résulte un travail au long cours fait de rencontres avec les habitants du fleuve, de ses écluses et de ses affluents, avec une préférence pour les arrêts dans les petits ports respectueux du fleuve : ceux qui n’accueillent pas les croisiéristes pullulant sur le Rhône. Lausanne fut une étape importante : des rencontres et de la lumière particulière au lac d’Annecy résultent quelques-unes des photos les plus marquantes de la série. Épaulée de son Rolleiflex, Yohanne Lamoulère noue une relation de confiance avec ses sujets. En quelques échanges, elle installe une atmosphère propice à la création d’un portrait unique. Ses sujets, s’ils sortent parfois de leurs zones de confort, ne sont jamais pris au dépourvu et prennent une véritable part au cliché. Seule exposition gratuite (en dehors, bien sûr, du Off), l’expo a aussi l’avantage notable de se situer en plein air et en centre-ville. Et pour y rentrer au mieux ou pour poursuivre la visite, la photographe conseille vivement la lecture du livre de l’autrice et militante écosocialiste Corinne Morel Darleux, Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce, Réflexions sur l’effondrement, un essai philo-littéraire promouvant « l’instauration de la dignité du présent », qui a conditionné en partie ce vaste projet. À l’Abbaye de Montmajour, légèrement à l’écart de l’agitation du festival, le lieu pourrait se suffire à lui-même. Qu’il accueille une exposition autour du photojournalisme dans la lignée du festival perpignanais Visa pour l’image, alors, c’est la promesse d’un moment marquant, remonté au fil de l’histoire. À travers les grands noms de la photographie, la majorité des photos ne nous est pas inconnue, inscrivant Libé comme marqueur de notre rapport à l’actualité de ce demi-siècle passé. À l’heure où la presse papier essaie de survivre, cette exposition rappelle que ce médium a encore toute sa place dans notre quotidien et on espère vivement voir une rétrospective Libé pour ses soixante ans en 2033.  

Romain Maffi

 

Arles 2023 - Les Rencontres de la Photographie : du 3/07 au 24/09 à Arles et alentours. Rens. : www.rencontres-arles.com