Long Play (LP)

Pièce de transe pour vingt interprètes du Ballet National de Marseille. Direction artistique et mise en scène : Alexandre Roccoli. Composition musicale : Adam Shaalan

La danse comme altération de la conscience anime le travail du chorégraphe Alexandre Roccoli depuis ses premières chorégraphies pour le club Berghain Berlinois à ses dernières pièces en Italie du Sud. Il s’engage ici avec Long Play (LP) dans une recherche pointue l'amenant jusqu’à la psycho-acoustique et aux pratiques thérapeutiques. En plus de sa collaboratrice régulière la danseuse Vera Gorbatcheva, il coécrit ce projet avec deux personnalités issues de la sphère électronique — l’auteur Jean-Yves Leloup, passionné d’ambient, et le compositeur égyptien Adam Shaalan, co-fondateur du label electro Hizz du Caire imprégné de transes soufies. Ce dernier a composé une bande-son aux variations subtiles, qui s'appuie sur les rythmes respiratoires des vingt danseurs et danseuses du Ballet national de Marseille les conduisants à une transe Techno hardcore incandescente.
Les corps traversent et s’unissent à la même partition chorégraphique tel un embrasement, une extase hypnotique collective, tout au long de cette boucle chorégraphique sans jamais se satisfaire de la fin.

BIOS

Pour étudier en Europe les phénomènes de transes vécus en Occident et autour de sa génération, Alexandre Roccoli obtient une bourse de l'Institut Français de la villa Médicis-hors-les-murs en 2004 pour chercher dans la scène techno Berlinoise. C’est dans le contexte Berlinois que nait son premier solo Ersatz, créé à Podewill, suivi immédiatement du trio A short term effect présenté au Hebbel Am Ufer à Berlin. 
De la nait une série de collaborations avec différents labels de musique Allemands mais aussi internationaux prestigieux : Ostgut du Grand club Berghain où il y chorégraphie les sections dansées de l'‘électro-’opéra After Hours créé par Marcello Buscaino et Heidi Moddle. Cet opéra sera joué dans le club toutes les semaines de l'été 2006 quand le club est fermé aux clubbers. Ce vif succès lui permet de rencontrer des figures de la musique électronique iconiques comme Ellen Alien du label Bpitch Control, Pantha du prince avec Rough-Trade, Jef Mills avec Axis ou encore DJ Chloé pour Kill the DJ. 
Plus récemment, il rencontre les artistes des labels du monde arabe comme Deena Abdelwahed en Tunisie, Daox au Maroc et actuellement avec le label Hizz en co-signant avec son directeur Adam Shalan du Caire, la dernière création Long Play (LP)

Adam Shaalan est né en 1991 dans la région de Qalyubia en Égypte. Il s’initie d’abord à la flûte et au tambour, avant d’aborder la guitare électrique puis la musique assistée par ordinateur. Diplômé de l’Institut Supérieur des Arts Appliqués de Giza en 2015, il co-fonde le label et le collectif Hizz, actif sur la scène musicale expérimentale du Caire. La musique d’Adam Shaalan se fait l’écho des rues, du quotidien et de la mémoire du peuple égyptien et puise ses inspirations aussi bien dans la culture urbaine que dans la tradition du shaabi, danse orientale populaire. Intéressé par le rapport entre son et image, l’artiste développe également des créations audiovisuelles en motion design.

Distribution

Direction artistique et mise en scène Alexandre Roccoli
Composition musicale Adam Shaalan
Interprétation danseurs et danseuses du Ballet national de Marseille - (LA)HORDE
Conseil chorégraphique Vera Gorbatcheva
Dramaturgie musicale Jean-Yves Leloup
Lumière et scénographie Hubert Colas
Costumes Nicole Murru et Alexandre Roccoli

Ballet National de Marseille
Les 02 et 3 oct. : sam 20h30, 21h30, 22h30 - dim 17h30, 18h30, 19h30
8/12/16 €
www.actoral.org
20 boulevard de Gabès
13008 Marseille
04 91 327 327

Article paru le mercredi 15 septembre 2021 dans Ventilo n° 450

Actoral 21

Le jour d’après

 

Pour sa vingt et unième édition, le festival Actoral se déploie dans ce qu’il sait faire de mieux, avec une programmation éclectique qui prend le pouls d’un XXIe siècle déjà bien installé.

    Le jour d’après est devenu la dramaturgie de notre quotidien. Tout un chacun cherche le commencement d’une histoire dont il ne maîtrise pas les aboutissants. Le monde redevient un laboratoire d’hypothèses dont l’imagerie est incertaine, parce que les grands dogmes ont explosé. Actoral a construit patiemment un réseau d’ententes et de rapprochements qui offrent au devenir de la scène un champ infini des possibles. De la danse au théâtre, de la performance au music hall, l’interprète ouvre des portes et passe de l’une à l’autre dans une aisance proche de la respiration. À la manière de Fritz the Cat, la déambulation devient le lieu d’une rêverie et d’un fantasme inassouvi. Aucune morale n’est pas épargnée et tout se désintègre dans une reconstruction de l’instant. Dans le prolongement d’une expérience génétique, l’art se jette dans des propositions éparpillées, sans ordre préétabli, abolissant la norme et la norme mâle. Il en ressort des sentiments plus ou moins marqués, des souvenirs éparpillés qui ne laisseront qu’une infime trace dans le lointain, mais la dynamique de l’instant présent persiste et construit des relations et des réseaux pérennes, comme autant de plateformes sur lesquelles le travail peut se reconstruire. Actoral aime les success story (Jonathan Capdevielle, Gisèle Vienne, Miet Warlop, Valérie Mréjen), des artistes accompagnés depuis leur début qui deviennent des références. De par l’ampleur de sa programmation, les sujets brûlants de l’actualité ne manquent pas (le transgenre, le féminisme, le dystopique, l’immatériel). Mais il n’est pas question de forum et de débat d’idées dont raffolent les plateaux télé. Ici, le cheminement et la construction d’une pensée se cognent à la réalité de la scène et transcendent le corps de l’interprète. Un halo diffuse le passage du temps, l’odeur du doute, le questionnement du sexe, l’inconscient, la famille, l’argent, le pouvoir. Tout ce qui interroge l’humanité dans son essence et son devenir, dans sa culture et sa rupture.  

Karim Grandi-Baupain

   

Actoral 21 : jusqu’au 9/10 à Marseille.

Rens. : www.actoral.org

Le programme complet du festival Actoral ici

 

Les incontournables de la quinzaine


 

Auréliens de François Gremaud

[caption id="attachment_35271" align="alignleft" width="300"] © Mathilda Olmi[/caption] Ils sont deux Aurélien à donner son titre au spectacle. Il y a d’abord l’astrophysicien Aurélien Barrau qui, en 2019 à l’Université de Lausanne, donne une conférence mémorable et alarmiste sur le dérèglement climatique. Et il y a le comédien Aurélien Patouillard, également physicien de formation, qui s’empare de son discours. Le metteur en scène suisse François Gremaud, qui a largement fait parler de lui avec son Phèdre, vif succès du In d’Avignon 2019, vient de faire l’ouverture du Festival d’Automne à Paris avec ce nouvel opus. Reprenant la forme de la conférence, il théâtralise, avec son art magistral du décalage joyeux (alors que l’on aurait plutôt envie de pleurer), cet énième cri d’alarme afin d’arrêter le drame en marche qu’Aurélien Barrau qualifie de « plus grand défi de l’histoire de l’humanité ». Raisonner par l’absurde, une manière d’éveiller autrement les consciences, doublement revigorante !

Marie Anezin

> les 21 & 22/09 à Montévidéo (6e)

   

Showgirl de Marlène Saldana & Jonathan Drillet

Monument de kitsch et d’outrance au point d’être devenu culte, le film Showgirls montre l’ascension et la déchéance de son héroïne, une ancienne prostituée déterminée à faire carrière à Las Vegas. Galvanisé par ses précédents succès Total Recall et Basic Instinct, Paul Verhoeven a le champ un peu trop libre pour son époque et ne trouvera pas son public parmi ses contemporains qui, au contraire, raillent son film pour son mauvais goût. La carrière cinématographique de son interprète, la belle Elisabeth Berkley (aka Jessie dans la série pour pré-ados Sauvés par le gong) en fera ainsi les frais. Tout étant affaire d’époques, presque trente ans plus tard, le tandem Marlène Saldana et Jonathan Drillet réhabilite l’œuvre choc dans un spectacle mêlant Beckett et culture queer. Un monologue sur fond de pole dance donnant à entendre les injonctions les plus cruelles du film et le son électro de Rebeka Warrior (Sexy Sushi).

BC

> les 21 & 22/09 à la Criée (7e)

 

Mahmoud ou la montée des eaux d’Antoine Wauters

[caption id="attachment_35269" align="alignleft" width="300"] © Lorraine Wauters[/caption] Malgré son sujet ardu, la Syrie, l’ouvrage d’Antoine Wauters est l’une des très bonnes surprises de la rentrée littéraire. Un vieux poète, qui chaque jour plonge de sa barque pour visiter les ruines désormais sous-marines de son village natal, en ressort un bouquet de réminiscences où horreurs vécues et douce nostalgie cohabitent dangereusement. Pour sa lecture, Antoine Wautres dit vouloir quelque chose de simple, juste les mots de Mahmoud : « C’est une expérience de plongée, une immersion dans la mémoire d’un homme qui a tout perdu, mais qui ne peut se résoudre à abdiquer, qui s’accroche à la vie et veut sauver ce qu’elle a de beau. C’est un message fraternel, une invitation à cesser de répondre à la brutalité du monde par toujours plus de brutalité, mais au contraire par du calme, de la paix et de la douceur. La poésie contient ces trois choses si précieuses. Calme, paix et douceur. » Et sous l’écriture de l’auteur belge, on peut rajouter « beauté » !

Marie Anezin

> le 23/09 à Montévidéo (6e)

NB : L’auteur sera également au festival Les Correspondances de Manosque en rencontre avec Julie Ruocco le 25/09.

 

Elisabeth Gets Her Way de Jan Martens

Comme le dit Jan Martens, venir voir « un portrait dansé d’Elisabeth Chojnacka, une claveciniste polonaise qui vivait à Paris, décédée il y a quatre ans, vous pourriez penser “Ce n'est pas pour moi (je le pensais aussi)”. » Et pourtant, le chorégraphe flamand réussit une fois de plus à réinventer sa danse. Il nous fait découvrir, corporellement et avec des documents d’archives, des souvenirs de ses collaborateurs, cette incroyable artiste engagée et avant-gardiste, pour laquelle plus de quatre-vingts compositeurs (parmi lesquels Ligeti, Montague, Krauze, Xenakis, Finzi, Nyman…) ont écrit des œuvres ! Une musique complexe et intense dont les boucles répétitives font vibrer le corps de Jan Martens, à la manière d’un capteur de sons, une vibration électrique, un chaos de pulsations rythmiques… Ou, devenue plus fluide, une musique qui mute en une danse tantôt énergique, enjouée, puis « caresse », en opposition aux frappés rugueux des touches du clavecin. Une musique qui reprend le pas sur la danse et confirme une fois de plus le talent de Jan Martens pour nous surprendre avec génie.

Marie Anezin

> les 28 & 29 à la Friche la Belle de Mai (3e)