Nicolas Cante & Mekanik Kantatik au Café Julien

Nicolas Cante & Mekanik Kantatik au Café Julien

Le son de piano

Du Cabaret Aléatoire jusqu’au Cri du Port, Nicolas Cante aura montré à plusieurs reprises que son projet Mekanik Kantatik, pour piano préparé, était avant tout taillé pour la scène. L’album du musicien aixois vient enfin de sortir, et il est à la hauteur.

Mekanik-Kantatik.jpgMi-homme machine, mi-homme piano, Mekanik Kantatik est un vrai mutant musical qui surprend autant qu’il fascine. Comme l’indique son nom, Sounds… from my piano est un disque dont tous les sons proviennent d’un bel instrument noir et à queue. Mais, aussi paradoxal que cela puisse paraître, il s’agit également de dance music : house originelle, pop digitale, électro-jazz raffinée… Le premier intérêt du projet réside dans la manière dont des sons habituellement émis par des machines, ou d’autres instruments, sont habilement reproduits par ce seul piano préparé. Sur le papier, l’idée est ingénieuse. Sur disque, le résultat s’avère carrément bluffant. On se prête vite au jeu des correspondances : ceci pourrait être un pied de TR 808, cela un riff de guitare… Mais le plus drôle demeure le fait d’imaginer Nicolas Cante, le jeune Aixois qui se cache derrière ce projet, taper comme un bûcheron sur le bois de son piano pour en extraire un “kick” digne de ce nom… Passés la curiosité et l’effet de surprise, on s’intéresse ensuite à la qualité des compositions : et là, rien à redire. Nicolas Cante n’est pas seulement inventif, il se révèle aussi un excellent musicien. De My piano and I, sorte de version 2.0 du Me and the gang de Bohannon au proto hip-hop de Machine en passant par la superbe pop song My sevdah, l’album contient plusieurs tubes forcément improbables, aux textes souvent drôles. Diplômé du conservatoire, Nicolas Cante a parfait son éducation musicale dans les raves des années 90. Une nécessaire ouverture. Grand fan de techno autant que de Duke Ellington (dont il reprend African Flower), il parvient ainsi à trouver le juste équilibre entre expérimentation et efficacité, musique savante et électro décomplexée. On pense parfois à Nôze, en plus complexe, pour la virtuosité au service de la bonne humeur, et le côté singe savant qui jouerait du Art Tatum en faisant des pitreries. Félicitons donc le label Dfragment, formé par des anciens d’Uwe, dont c’est l’une des premières sorties. En plus d’avoir permis à Cante de sortir tel un diablotin de sa boîte à musique, ces labels ramènent un peu de culture dans les clubs : merci.

Jean-Pascal Dal Colletto

Le 6 au Café Julien.
Dans les bacs : Sounds… from my piano (Dfragment/La Baleine)
www.myspace.com/mekanikkantatik